La Nation Bénin...
Réunie en audience plénière
spéciale ce jeudi 23 octobre 2025, la Cour constitutionnelle du Bénin a examiné
sept dossiers de recours, dont cinq ayant un lien direct avec le processus de
parrainage des candidats à la présidentielle de 2026.
Au cœur de ces affaires : la
contestation de l’ordonnance du président du tribunal de première instance de
première classe de Cotonou, rendue le 13 octobre 2025, et qui avait provoqué
l’annulation du parrainage du député Michel Sodjinou.
Parmi les requérants figurent
Abdel Kamar Ouassagari, Franck Oké, Habibou Woroucoubou, Antonin Midofi Hounga
et Souley Malam Moucouré Boko, qui ont saisi la Cour pour faire constater
l’inconstitutionnalité de cette ordonnance. Après examen, la haute juridiction
a rendu sa Décision EP 25-006 du 23 octobre 2025, dans laquelle elle s’est
déclarée incompétente pour statuer sur ces recours.
Un recours politique devenu
juridique
A l’origine, le parti Les
Démocrates, principal parti d’opposition, estimait que la décision du président
du tribunal de Cotonou violait la Constitution et le Code électoral, en
s’ingérant dans un domaine réservé au juge constitutionnel. Selon le député Abdel
Kamar Ouassagari, secrétaire administratif du parti, le juge des référés avait
outrepassé ses pouvoirs en intervenant dans une affaire qu’il qualifie de
contentieux électoral. L’ordonnance en question, qui avait ordonné la
restitution à Michel Sodjinou de sa fiche de parrainage nominative, avait
conduit la Commission électorale nationale autonome (Cena) à l’invalider.
Devant les sept sages, les
conseils du parti, Me Sadikou Alao et Me Victorien Fadé, ont plaidé que le
tribunal de première instance n’avait aucune compétence pour se prononcer sur
une question électorale. « Les dispositions juridiques sont claires : le contentieux
électoral relève exclusivement de la Cour constitutionnelle », ont-ils soutenu,
en dénonçant une procédure précipitée et entachée d’irrégularités.
Ils ont ajouté que la
sommation adressée à Boni Yayi, l’assignation à restitution et l’audience en
référé s’étaient déroulées le même jour, privant le parti du temps nécessaire
pour exercer ses droits de défense. Le parti Les Démocrates a alors demandé à
la Cour de déclarer inconstitutionnelle l’ordonnance du 13 octobre, et de tirer
toutes les conséquences de droit, notamment la réhabilitation du parrainage de
Michel Sodjinou.
Une décision qui redéfinit les
frontières institutionnelles
La Cour constitutionnelle a
tranché autrement. Dans sa décision, la haute juridiction a considéré que le
litige en cause ne relevait pas de la Constitution, mais du droit commun, et
qu’il avait déjà été examiné par les juridictions ordinaires, notamment la Cour
d’appel de Cotonou.
Autrement dit, pour la Cour,
le différend entre Michel Sodjinou et son parti Les Démocrates ne saurait être
assimilé à un contentieux électoral, mais plutôt à un conflit interne de nature
civile lié à la gestion d’un document nominatif, en l’occurrence une fiche de
parrainage.
Cette interprétation consacre
une relecture prudente des compétences juridictionnelles, en rappelant que la
Cour constitutionnelle n’est pas habilitée à intervenir dans tous les
différends à caractère politique, même lorsque ceux-ci ont un impact sur le processus
électoral.
La décision d’incompétence
rendue le 23 octobre marque une nouvelle étape dans l’affaire du parrainage de
Michel Sodjinou. Elle vient conforter la position du tribunal de Cotonou,
validée par la Cour d’appel, tout en laissant ouverte la question de la place
du juge constitutionnel dans la régulation du processus électoral.
Pour le parti Les Démocrates,
cette issue est une désillusion juridique, mais aussi un signal politique,
révélateur des tensions institutionnelles qui entourent la présidentielle de
2026.