La Nation Bénin...
La
réforme sur la décentralisation est une aubaine pour les communes et les
autorités locales. Grâce à elle, les activités politiques du maire se déroulent
sans flottement et l’administration communale fonctionne sans discontinuité.
Dans cet entretien, Ibrahim Baparapé Taïrou, deuxième adjoint au maire de
Kouandé, apprécie les impacts de la réforme, après un an de mise en œuvre.
La
Nation : La commune de Kouandé, à l’instar des autres communes du Bénin, a
intégré la réforme sur la décentralisation. Un an après, quelle appréciation en
faites-vous ?
Ibrahim
Baraparé Taïrou : Mon appréciation sur cette réforme est positive. Depuis son
avènement, nous avons un chef d’équipe à la mairie, qui est disponible,
contrairement à ce qui se faisait. Auparavant, c’est le maire qui doit être sur
le terrain, aller écouter sa population, suivre tout ce qui se fait au niveau
de la commune et penser à la fois à la politique et à l’administration… Tout
cela constitue assez de charges pour l’autorité communale. Avec la mise en
œuvre de cette réforme et surtout l’avènement des secrétaires exécutifs, le
maire n’a plus à s’occuper de l’exécution des travaux et des tâches
administratives et techniques de la mairie, qui demandaient assez d’énergie. Il
ne s’occupe désormais que de la politique communale, la politique de
développement et aussi de la recherche de nouveaux partenariats pour booster le
développement de sa commune. C’est l’appréciation que je peux donner de la
réforme.
Quels
sont les enjeux de cette réforme pour votre commune ?
Les enjeux pour le développement de la commune de Kouandé, c’est d’abord la mobilisation des ressources propres. Nous savons qu’il y a de grandes potentialités à Kouandé que nous n’arrivons toujours pas à saisir. Avec l’arrivée de la Secrétaire exécutive qui se positionne comme moteur de recouvrement et n’ayant pas été investie d’un mandat politique, elle peut faire cette mobilisation sans arrière-pensée, contrairement aux maires qui n’y mettent pas la rigueur parce qu’on a besoin de l’électorat.
Mais
l’une des préoccupations essentielles à Kouandé, c’est le manque de cadres
compétents. Il faut dire que depuis le début de la décentralisation, Kouandé
n’a pas bénéficié d’un service technique avec des cadres qui sont à la hauteur
de la tâche, des cadres vraiment compétents. Kouandé a beaucoup souffert de ce
manque de cadres compétents, ce qui fait que pour les infrastructures
réalisées, la qualité laisse à désirer. Le défi pour la commune de Kouandé,
c’est donc la disponibilité de cadres compétents, pour exécuter les tâches de
développement de la commune suivant la politique que les élus locaux ont
définie.
Quels sont les acquis, un an après
la mise en œuvre de cette réforme ?
Ce serait trop tôt de faire une
comparaison de la période d’avant la réforme avec celle de sa mise en œuvre.
Mais les résultats frappent déjà à l’œil. Cette mandature a fait de la
mobilisation des ressources, le vecteur principal de sa gouvernance. Ce qui
fait que l’année passée, Kouandé s’est positionnée comme la première commune en
termes de mobilisation de ressources propres et d’accroissement de ressources
pour le développement. Au regard de cette réalité, on peut dire que l’action
des Se n’est pas restée sans conséquence quant à cette réussite.
Ce qui a changé après la mise en
œuvre de cette réforme ici dans la commune de Kouandé, c’est que même les
organes infracommunaux s’animent désormais. Les conseils d’arrondissement se
tiennent régulièrement, les conseils de village aussi par endroits et au niveau
de la commune même, les différents conseils se sont tenus avec moins de
réclamations. Il faut le souligner, avant, les maires étaient confrontés aussi
à cette réalité où chacun cherche à tirer le drap de son côté ; même lors de la
répartition des ressources au moment de l’élaboration du budget, chacun tire de
son côté. Aujourd’hui, c’est suivant les priorités que les choses se décident.
Que suggérez-vous pour parfaire la
réforme afin qu’elle atteigne ses objectifs ?
Si nous avons une suggestion à
faire, c’est par rapport à la diminution du pouvoir du conseil communal où,
avec cette réforme, tous les conseillers ne se retrouvent pas dans la politique
de décision. C’est d’abord le conseil de supervision qui valide avec seulement
sept membres, dont le maire, les adjoints et les présidents des quatre
commissions permanentes. Le conseil communal ne se charge que de valider ce qui
a été adopté par le conseil de supervision. C’est mal vu des autres
conseillers, car, au niveau du conseil communal, c’est là où on a le grand lot
de conseillers. Donc c’est seulement sept personnes qui adoptent la politique
et les autres n’ont pour options que de valider ou de demander à ce que ce soit
revu avec de nouvelles propositions concrètes. A ce niveau, le conseiller
communal, sans tâche assignée, se trouve dénudé de son ‘’ pouvoir de
décideur’’. Il reste à revoir cet aspect de la réforme pour que le conseiller
se sente véritablement impliqué dans la gestion de sa commune.
L’autre chose, c’est que les
agents des mairies relèvent directement des Se et non des maires. Si à Kouandé,
la collaboration entre le maire et la Se est sans anicroche, ailleurs où des Se
pourraient se montrer très ‘’arrogants’’, cela peut créer des difficultés dans
la mise en œuvre des politiques de développement au niveau de la commune. Les
Se ont plein pouvoir dans certains domaines, par exemple celui de la signature
de la demande de partenariat dans le cadre des coopérations, ce qui relève du
domaine du maire qui décide de la politique de développement de sa commune.
Que conseillez-vous aujourd’hui
aux différents acteurs pour accompagner la réforme sur la décentralisation ?
Pour que la réforme sur la
décentralisation connaisse du succès, il faut que chacun maitrise son domaine
d’intervention, ce qu’il a à faire, les responsabilités qui sont les siennes et
que chacun essaie de respecter les attributions de l’autre. C’est ainsi qu’une
bonne collaboration peut naître entre les deux acteurs pivots du développement
de la commune. Quant à la population, elle doit comprendre que les communes
sont dans une nouvelle ère. Ce qui fait le poids de la commune, c’est la
mobilisation des ressources propres, et qui dit mobilisation des ressources,
dit contribution des citoyens qui sont dans la commune. C’est l’heure pour nous
d’inviter chacun à s’acquitter de son devoir. C’est à ce prix que l’objectif de
développement de la commune sera atteint, à la satisfaction de tout le monde?