La Nation Bénin...
La réforme structurelle de la décentralisation, marquée surtout par la création du poste de secrétaire exécutif des mairies au Bénin, fait son petit bonhomme de chemin. Plus d’un an après sa mise en œuvre, les premiers impacts sont visibles dans les communes du Borgou et de l’Alibori.
Le Bénin tient enfin les clés du développement à la base, avec la loi N° 2021-14 du 20 décembre 2021, portant code de l’administration territoriale en République du Bénin. La grande innovation, c’est l’avènement, depuis vendredi 1er avril 2022, de nouveaux acteurs notamment les secrétaires exécutifs des communes.
Ce qui consacre désormais la séparation des fonctions politiques de celles administratives et techniques au sein de l’administration communale. Plus d’un an après la mise en œuvre de cette réforme structurelle dans le secteur de la décentralisation, le bilan dans les communes du Borgou et de l’Alibori augure, malgré quelques difficultés, de perspectives prometteuses.
L’apprentissage de la séparation des
pouvoirs
La réforme de la décentralisation met fin à la politisation à outrance de la gestion de l’administration communale et aux pratiques peu orthodoxes constatées lors de la passation des marchés. L’option a été faite de décharger les élus des fonctions qui les mettaient en délicatesse avec les principes de bonne gouvernance. Désormais, il existe deux organes délibérants, le Conseil communal et le Conseil de supervision. A leurs côtés, un organe administratif et technique qui se résume au secrétariat exécutif a également vu le jour. Il est chargé de mettre en œuvre les orientations et les décisions des organes délibérants.
A sa tête, le secrétaire exécutif a, après
avoir été tiré au sort, hérité d’un certain nombre de pouvoirs comme la gestion
des ressources humaines et financières. En tant qu’ordonnateur du budget
communal, il est chargé des tâches de mobilisation des ressources et
d’exécution des dépenses. A ce titre, il est au centre de la mise en œuvre de
la politique et des programmes de développement local.
Dans le Borgou et l’Alibori, les secrétaires exécutifs des mairies assurent avoir appréhendé l’immensité de la tâche qui leur incombe et les responsabilités qui pèsent sur leurs épaules. Eric Franck Mongbo, secrétaire exécutif de la mairie de Gogounou, rappelle que le président de la République, au cours de son discours sur l’état de la nation, le 8 décembre 2022, a précisé que cette réforme a été instaurée pour mettre les communes en compétition. « C’est un défi qu’il nous a lancé. Nous avons l’obligation de le relever», confie-t-il.
Déjà au charbon
C’est donc à juste titre que, aussitôt après
leur entrée en fonction, les secrétaires exécutifs des communes du Borgou et de
l’Alibori se sont rapidement mis à l’ouvrage. En témoigne le bilan réalisé par
chacun d’eux, après une première année passée à leur poste. Ils ne se sont pas
reposés. Tous ont préféré prendre le taureau par les cornes.
A l’instar de Térence Kpassèlokohinto, secrétaire exécutif de la mairie de Nikki, Cyr-Renald Cobamidé à Pèrèrè, Arnos Sossou à Tchaourou, Eric Franck Mongbo à Gogounou, et Wilfried Hounkpon Agoli-Agbo à Banikoara, ont d’abord fait l’état des lieux de l’administration de leurs communes respectives, avant de procéder à sa réorganisation. Ont suivi des séances pour mettre le personnel en confiance, puis l’instauration d’un cahier de contrôle des présences. L’objectif, soutiennent-ils à l’unanimité, est de remettre le personnel au travail.
Une des importantes mannes financières de la municipalité de Parakou
« Pour marquer la présence de l’Etat dans
cette commune frontalière au Nigeria, où c’est le naira qui a surtout cours,
j’ai fait rentrer la cérémonie de la montée des couleurs, tous les lundis à
7h45, dans les habitudes du personnel. J’ai également instauré l’inscription
dans le registre de présences et le cahier de sorties, sans lesquels
l’administration ressemblait à la cour du roi Pétaud », a laissé entendre Rose
Sébastienne Gbassi, secrétaire exécutive de la mairie de Sègbana. « Ce que nous
avons constaté à notre prise de fonction, c’est qu’il y avait un découragement,
un désintéressement et un dégoût pour la chose publique au niveau du personnel
», soutient son homologue de Kandi, Antoinette Aoudi.
Acquéline Béhanzin, secrétaire exécutive de la
mairie de Bembèrèkè, a suivi la même démarche, celle consistant à remobiliser
le personnel autour des objectifs de développement. « A travers des échanges
qui nous ont permis de faire ensemble le diagnostic, direction par direction,
nous avons saisi l’occasion pour identifier les attributions qui sont fortement
exercées et celles qui l’étaient le moins, ainsi que les grands défis. Les
résultats de ce travail, avec des propositions d’actions, ont été restitués au
Conseil de supervision. Nous avons également déployé un certain nombre d’outils
dont l’élaboration des fiches de poste pour tous les agents, assorties des
objectifs de performances annuelles à évaluer », poursuit-elle.
A Parakou, le secrétaire exécutif de la
municipalité a assigné des contrats d’objectifs aux différents cadres appelés à
l’accompagner dans l’accomplissement de
sa mission. « Nous avons eu la chance d’avoir tous les outils de planification
en place. Il fallait les arrimer aux enjeux de la réforme. Ce que nous nous
sommes attelés à faire avec le concours des différents cadres », avoue
Hyacinthe Elégbédé.
En dehors du personnel, les secrétaires
exécutifs ont également rencontré et sensibilisé les couches
socioprofessionnelles, les membres des associations et de la société civile. Au
terme de cette prise de contact, la secrétaire exécutive de la mairie de Sègbana
a recensé et inscrit dans son plan de travail, les problèmes soulevés.
A ces actions, s’ajoutent des initiatives
prises dans le cadre de l’assainissement de leurs communes, des séances de
reddition de comptes, la poursuite et l’achèvement de certaines infrastructures
communautaires dont les travaux étaient en cours. Ailleurs, les secrétaires
exécutifs ont fait avancer des chantiers qui étaient en souffrance, puis lancé
le processus d’élaboration du Plan de développement communal 4e génération de
leurs communes. Tout cela, grâce aux directives et orientations de leurs maires
et conseils communaux.
Un autre défi qui s’est imposé à certains secrétaires dans le Borgou et l’Alibori, à leur entrée en fonction, a été le report de crédits traduit par la non-anticipation dans la consommation des fonds Fadec, malgré la disponibilité des ressources. Toutefois, des solutions ont été trouvées pour l’utilisation rationnelle de ces ressources. Sur le terrain, les secrétaires exécutifs des communes du Borgou et de l’Alibori travaillent à l’amélioration des ressources propres, en rivalisant d’initiatives.
De la mobilisation des ressources
Venus, pour la plupart, retrouver des plans
stratégiques de mobilisation des ressources en place, ils n’auront eu qu’à les
actualiser et les renforcer au regard du nouveau contexte. Ailleurs, il a fallu
les élaborer.
Mais partout, ils ont d’abord cherché à avoir
une idée du potentiel économique de leurs communes. A cette fin, un recensement
des "gisements" de taxes au niveau des marchés, des carrières et des
ressources minières, ainsi que des différentes valeurs inactives et des
infrastructures marchandes a été effectué. Il s’agit des niches et des
opportunités qui s’offrent, mais qui n’avaient jamais été explorées.
« En dehors des recettes classiques, fiscales
et non fiscales, l’emphase a été mise sur certaines ressources dormantes telles
que les autorisations de construire et de démolir qui, jusque-là ne généraient
aucune recette au profit de la commune. Leur paiement a commencé par rentrer
dans les habitudes. Il y a également le foncier. Aujourd’hui, la délivrance des
actes est redevenue réalité. A notre arrivée, tout était en suspens », alerte
Hyacinthe Elégbédé, Se de la mairie de Parakou.
Pour ce faire, les populations et les organisations des acteurs économiques à divers niveaux, ont dû être sensibilisées. Il y a ensuite eu le recrutement des agents collecteurs ou le renforcement de leurs effectifs.
La
commune de Kandi est décidée à tirer le maximum de profits de cette réforme
mise en œuvre
« Le recouvrement a été effectué à un peu
moins de 80 %. Comparé à l’année dernière, nous avons réalisé un bond d’environ
5 %. Le défi désormais, c’est de ne plus reculer », précise Wilfried Hounkpon
Agoli-Agbo de Banikoara. A Bembèrèkè, Aquéline Isabelle Béhanzin a, avec
l’appui du maire, fait remettre des contrats d’objectifs aux chefs
d’arrondissements qui, à leur tour, les ont déclinés à tous les chefs quartiers
et chefs villages. « C’est sur cette base que nous avons demandé qu’il soit
inscrit parmi les points à débattre lors des conseils d’arrondissement
mensuels, un volet relatif à la mobilisation des ressources avec les
difficultés rencontrées, matière par matière, délégué par délégué »,
laisse-t-elle entendre. Dans le Code de l’administration territoriale,
explique-t-elle, les membres des conseils d’arrondissements sont considérés
comme des auxiliaires dans leurs localités, pour identifier les matières
imposables et assurer leur recouvrement, en compensation d’une ristourne. « Nous
sommes dans la dynamique d’amener les populations à mieux comprendre la
nécessité de payer leurs impôts et taxes, tout en cherchant les meilleures
stratégies pour tout recouvrer. Si nous évaluons les potentialités de la
commune, c’est que nous n’arrivons pas encore à recouvrer 50 % des ressources
attendues », informe-t-elle.
Gogounou fait face à la même situation. «
Beaucoup reste encore à faire, parce qu’il fallait marcher comme sur des œufs.
Il s’agit de procéder doucement et méthodiquement », se défend le secrétaire
exécutif de la mairie, Eric Franck Mongbo. « Un autre défi actuellement, c’est
le suivi et le contrôle des agents collecteurs », prévient, quant à lui, Arnos
Sossou de la mairie de Tchaourou.
Mais malgré ces difficultés, des défis ont été
relevés par les secrétaires exécutifs des communes du Borgou et de l’Alibori.
L’impact en si peu de temps sur la gestion desdites communes n’est pas
négligeable.
Une impulsion nouvelle aux communes
Avec la réforme, il y a une amélioration dans
la consommation des ressources au niveau des mairies du Borgou et de l’Alibori.
Dans certaines communes, comparativement aux années antérieures, leurs taux de
mobilisation ont plus que doublé au mois de février dernier.
Selon le maire de Kalalé, Tidjani Bani Chabi,
dans sa commune, la réforme a permis des changements positifs, surtout en
matière de mobilisation des ressources. Il fait également constater les
avancées réalisées dans l’élaboration du budget, sous l’égide du secrétaire
exécutif de sa mairie. « Pour la première fois, nous avons soumis un budget à
la préfecture qui n’a pas eu droit à des reproches. C’est à l’actif du
secrétariat exécutif », avoue-t-il. « A l’avènement de la réforme, nous avions
eu des appréhensions. En apprenant que nous n’étions plus les ordonnateurs du
budget de nos communes, ces rôles étant désormais dévolus aux secrétaires
exécutifs, nous avions été un peu frustrés. Mais avec le démarrage du
processus, nous nous sommes rendu compte de sa justesse. C’est une aide, un
soulagement que l’Etat nous a apporté, dans le cadre du développement de nos
communes », appuie le maire de Tchaourou, Jonathan Awo.
Ce qui a bien marché, révèle le maire de
Pèrèrè, Nouhoun Alassane, c’est la mobilisation des ressources. Au niveau de la
collecte des recettes non fiscales par exemple, sa commune a connu un taux
d’augmentation de 20 % de 2021 à fin 2022.
« Actuellement, il y a un peu d’accalmie au
sein des conseils communaux. Le problème de destitution des maires n’est plus
tellement d’actualité. Le maire n’est plus l’adversaire à abattre à tout prix.
Tout le monde est désormais concerné », fait observer Arnos Sossou, secrétaire
exécutif de la mairie de Tchaourou. «Le Conseil de supervision que le maire
préside, se réunit tous les mois pour examiner ce que fait le secrétaire
exécutif et lui donner des directives et des orientations. A son tour, le Conseil
communal vient approuver ou valider le travail qui est fait », détaille-t-il.
Pour Térence Kpassèlokohinto de Nikki et Antoinette Aoudi de Kandi, la réforme
a été instituée pour un développement harmonieux du territoire. Ainsi, les
communes ont été entièrement responsabilisées pour prendre en main leur destin.
Bien que sa mise en œuvre soit encore à ses débuts, le secrétaire exécutif de la mairie de Gogounou estime que la réforme a déjà produit deux impacts. Le premier, c’est par rapport à la qualité des agents qui intervenaient dans les communes. «Même si certains agents sont des cadres bien formés, ils n’étaient pas mis en valeur. Aujourd’hui, grâce à la réforme et aux tirages au sort effectués, ils ont été révélés à la lumière. Les hommes politiques les avaient étouffés », insiste-t-il. Le deuxième impact, poursuit-il, c’est que les populations constateront à la longue que la réforme a renforcé davantage l’unité nationale. « Cela, en permettant aux fils et filles du pays que nous sommes et qui remplissent les conditions, d’aller servir dans n’importe quelle commune», s’est-il voulu plus explicite. Comme Wilfried Hounkpon Agoli-Agbo de Banikoara, Aquéline Isabelle Béhanzin de Bembèrèkè et Hyacinthe Elègbédé de Parakou, Antoinette Aoudi de Kandi va également louer le choix audacieux effectué par le chef de l’Etat. « Avant, rien n’était à sa place dans les communes. L’Etat vient d’actionner le dispositif qu’il fallait, afin que le développement à la base devienne réalité », souligne à leur suite Cyr- Renald Ifèdé Cobamidé de Pèrèrè.
Travailler main dans la main
Passés les atermoiements inhérents à tout
début, les différents acteurs impliqués dans la mise en œuvre de la réforme
s’emploient à jouer leur partition. Le secrétaire exécutif a un rapport
hiérarchique et fonctionnel avec le maire.
« Chacun a été mis dans son rôle et son
couloir », clarifie le secrétaire exécutif de la mairie de Tchaourou. « La
gestion de l’administration communale est de la responsabilité du secrétaire
exécutif. Quant aux fonctions politiques, le maire, le Conseil de supervision
et le Conseil communal sont les organes spécifiques appelés à les assurer. La
réforme a permis à chaque acteur de se focaliser dans son rôle », ajoute son
homologue de Bembèrèkè.
En effet, dans les communes du Borgou et de
l’Alibori, les secrétaires exécutifs avouent être très bien accompagnés et
appuyés par leurs maires et les membres de leurs conseils communaux. Ma chance,
confie celui de Banikoara, c’est que mon maire était le représentant de l’Ancb
au sein du comité de mise en place de la réforme. « C’est ce qui fait qu’il est
souvent en avance par rapport à certaines réalités sur le terrain », se réjouit
Wilfried Hounkpon Agoli-Agbo. Comme lui, sa collègue de la mairie de Bembèrèkè
vit également une expérience particulière. « Avec mon maire, nous tenons
régulièrement des rencontres pour échanger, planifier les activités à mener,
puis en cas de difficultés, envisager ensemble ce qu’il y a lieu de faire »,
souffle-t-elle.
A Nikki, l’heure est également à l’harmonie. «
Nous avançons dans le respect des dispositions légales prévues par le code de
l’administration territoriale. Sinon que chacun de nous a compris sa mission.
Quelle que soit la situation, nous savons nous élever et mettre le
développement de la commune au-dessus de nos intérêts personnels », rassure
Térence Kpassèlokohinto. Cyr-Renald Cobamidé, à Pèrèrè, abonde dans le même
sens. « Les textes ont tout prévu. Je connais mes attributions. Mais cela ne
m’empêche pas, avant de les exercer, de prendre le soin de discuter ou
d’échanger avec le maire. C’est l’approche que nous avons adoptée à Pèrèrè »,
soutient-il.
« Avec le maire, nous travaillons en bonne
intelligence et dans le respect des textes. Il a l’habitude de me répéter que
si ça se passe mal entre nous, que ce sont les populations et le développement
de la commune qui vont en pâtir», clame Arnos Sossou, Se de Tchaourou. A
Parakou, Hyacinthe Elégbédé privilégie aussi les échanges avec son maire. «
Nous avons compris que c’est ensemble, avec tous les autres élus, que nous
allons donner un souffle nouveau au développement de la commune», fait-il
observer.
Toutefois, apprend-on avec un des secrétaires
exécutifs, il arrive que directement et au-delà de ses attributions, le maire
interpelle le Se et cherche à lui donner des ordres. « C’est souvent sous
l’influence de ses alliés politiques, pour leur montrer que c’est lui qui
commande. Mais après, c’est pour vous présenter ses excuses », informe-t-il.
Toute réforme, admet Eric Franck Mongbo, a ses
spécificités dans sa mise en œuvre. « Il faut savoir opter pour un compromis,
sans compromission. Les cartes sont sur la table et on apprécie »,
conseille-t-il. « En fait, chacun crée son paradis. Je suis venue avec la
posture d’un administratif et d’un technicien, pour aider le maire à développer
sa commune», fait observer Rose Sébastienne Gbassi. La secrétaire exécutive de
la mairie de Kandi ajoute : « Pour le développement de la commune et sur la
base des orientations données par le politique, nous faisons des propositions
qui sont soumises à son appréciation ».
Loin de désavouer son secrétaire exécutif, le
maire de Tchaourou, Jonathan Awo, confirme que tout va bien entre eux. « Avant
de poser un acte ou prendre une décision, il m’en informe. S’il y a lieu de
discuter, nous le faisons», avoue-t-il.
Grande est également la satisfaction du maire
de Malanville, Gado Guidami, au regard du contenu du rapport de performance
2022 présenté dernièrement par le secrétaire exécutif de sa mairie. « Grâce aux
actions qu’il a entreprises avec son équipe, la commune est en train de se
repositionner en matière de mobilisation des ressources», a-t-il reconnu, tout
en louant les mérites de son secrétaire exécutif, Olivier Alloukoutoui. Comme
lui, le maire de Kalalé, Tidjani Bani Chabi, apprécie également le coup de pouce
que la secrétaire exécutive, Ida Senassi Tossou, apporte au développement de sa
commune.
Dans le Borgou, les acteurs de la Société civile suivent avec attention ce qui se passe. Selon Rigobert Orou Gani de Social Watch, il est trop tôt pour faire un bilan. « Les organisations et les citoyens chargés de faire la veille citoyenne n’ont pas baissé les bras. Ils utilisent les moyens à leur disposition, pour faire le suivi des différents acteurs de cette réforme au niveau des collectivités locales, et pour accompagner les autorités locales dans leur rôle de redevabilité », rassure-t-il. Quant au président de l’association pour le développement économique, social et économique de Parakou (TemBI), Imorana Assouma, le plus important est d’œuvrer pour le bien-être des populations.
Des dysfonctionnements à corriger
Malgré les embellies, quelques
dysfonctionnements sont à déplorer. Dans le département du Borgou, les
problèmes de frais d’état civil, de transactions foncières, de la contribution
des marchés au budget local et du transfert des ressources Fadec restent prégnants.
Selon le président de l’Association de développement des communes du Borgou
(Adecob), Inoussa Zimé Chabi, ces problèmes continuent d’être des handicaps
pour les secrétaires exécutifs, comme ils l’avaient été avec les maires, alors
ordonnateurs des budgets communaux. Les communes n’arrivent pas encore à
maîtriser correctement la situation. Au niveau des arrondissements, la
mobilisation des ressources est encore plus préoccupante.
La difficulté, informe le secrétaire exécutif
de Banikoara, c’est qu’il était prévu la désignation des secrétaires
administratifs d’arrondissements. Mais, malheureusement, ce n’est pas encore le
cas. « Ce qui freine un peu notre élan et nos initiatives dans la mobilisation
des ressources», regrette Wilfried Hounkpon Agoli-Agbo. Son souhait est de voir
tous les autres outils de la réforme être mis en place. « Je veux parler des
décrets d’application qui sont toujours en attente », précise-t-il. « C’est une
première au Bénin », lance sa collègue de Kandi qui tient à voir la réforme
aboutir. Elle espère voir des ressources humaines de qualité être mises à la
disposition de son administration. « Avec la réforme, pendant que nous manquons
de personnel qualifié, le travail s’est décuplé. Ce n’est pas rare de voir un
directeur seul dans son service et en train d’accomplir tout seul, le travail
qui relève de ses compétences », souligne-t-elle.
A cela s’ajoute le fait que le personnel est
vieillissant et qu’on y compte très peu de cadres de conception, mais beaucoup
d’agents d’exécution, renchérit Hyacinthe Elégbédé. Concernant la mobilisation
des ressources, il estime que les populations n’ont pas encore pris l’habitude
de payer leurs impôts. Elles continuent d’ignorer, selon lui, que ces impôts
servent à développer leurs localités. « Mais, l’absence de ces arrêtés
d’application ne doit pas entraver le processus. Allons-y progressivement, déjà
que la Cellule de suivi et de contrôle de la gestion des communes est présente
pour nous accompagner », finit-il par recommander. Par ailleurs, il ne faut pas
occulter le problème du cumul des postes, plus spécifique aux communes à statut
ordinaire. Il alourdit les procédures, alors qu’il faut aller très vite,
prévient le secrétaire exécutif de la mairie de Gogounou, Eric Franck Mongbo.
Ces dysfonctionnements sont appelés à être corrigés. Ce sera avec les ajustements à opérer. L’objectif à terme, c’est d’avoir une administration communale qui ne sera plus politisée, familiale et clanique.
Les prochains défis
Au cours des quatre prochaines années, la
secrétaire exécutive Ida Sènassi Tossou nourrit l’ambition de faire passer
Kalalé de son statut de commune ordinaire, à celui de commune intermédiaire. Ce
sera en créant un environnement propice pour les investisseurs.
Wilfried Agoli-Agbo n’attend pas moins pour
Banikoara. De commune à statut intermédiaire, il veut la voir être éligible à
celui particulier. Obligation nous est faite chaque année, poursuit-il, de
progresser de 10 %, par rapport à la mobilisation des ressources.
En dehors des engagements pris dans le cadre
de la mobilisation desdites ressources, Antoinette Aoudi, quant à elle,
envisage des investissements structurants pour la commune de Kandi. «Faisant
partie des grandes communes productrices de céréales au Bénin, Kandi a besoin
de la construction d’un marché de céréales. Chef-lieu de l’Alibori et entourée
par les cinq autres communes du département, puis frontalière avec le Nigeria,
la commune de Kandi doit être dotée, non seulement d’un parc pour les camions gros
porteurs, mais également d’un parking voyageurs », soutient-elle. Le problème
de l’assainissement dans la commune, ajoute-t-elle, ne doit également pas être
négligé. Jusqu’ici, Kandi ne dispose pas encore d’un mécanisme de collecte et
de traitement des ordures ménagères.
Comme à Kandi, les perspectives s’annoncent
également heureuses pour Sègbana. Rose Sébastienne Gbassi veut que cette
commune profite de sa proximité avec le Nigeria. Pour rendre son administration
communale plus performante, elle entend aussi élaborer un plan de formation
pour le personnel.
A la faveur de l’avènement de la réforme, les
communes du Borgou et de l’Alibori sont donc décidées à rattraper le retard
qu’elles ont accusé. Sur fond de défis, elles entendent redoubler d’ardeur au
cours des quatre prochaines années.
Gogounou va accroître, sinon doubler la
mobilisation des ressources, souffle son secrétaire exécutif. La commune
s’attaquera ensuite aux infrastructures indispensables pour améliorer le
quotidien de ses populations. «La commune ne dispose même pas d’une pharmacie
et de stations-service. Pour prendre un médicament ou s’approvisionner en
carburant, il faut se rendre jusqu’à Kandi ou Bembèrèkè », déplore Eric Franck
Mongbo. Le tracé de plan de voirie, assure-t-il, est également une question
cruciale.
Grâce à la réforme, la commune de Gogounou réalise le retard qu’elle accuse par rapport à son développement
A Bembèrèkè, il y aura la mise en œuvre du
Plan de développement communal 4e génération, l’accroissement des ressources
propres et l’affermage de certaines infrastructures. «Avec l’implication des
populations, nous ambitionnons de développer des projets à base communautaire
dans le domaine de l’assainissement. Une autre priorité, ce sera la mise en
place des infrastructures économiques pouvant produire des retours sur
investissements susceptibles de déboucher sur la création d’une nouvelle vie
pour Bembèrèkè, avec des espaces de loisirs, des hôtels, des habitats modernes,
les montagnes et les autres potentialités touristiques à valoriser autour de la
résistance de Bio Guerra », assure Aquéline Isabelle Béhanzin. Elle compte
fortement sur la coopération décentralisée. C’est la même démarche que Nikki
envisage de suivre, en misant surtout sur le partenariat public-privé. « Nous
pensons organiser un dialogue public-privé auquel seront conviés les acteurs
privés et toutes les parties prenantes», a laissé entendre Térence Kpassèlokohinto.
Tchaourou et Parakou ne manquent également pas d’ambitions. Toutes misent, à en
croire leurs secrétaires exécutifs, sur leurs Plans de développement communal
4e génération, avec les différents projets qui y sont inscrits pour les cinq prochaines
années.
Une part belle aux femmes
Sur l’ensemble des 14 communes des
départements du Borgou et de l’Alibori, 5 communes ont des femmes au poste de
secrétaire exécutf. Il s’agit de Kandi, Bembèrèkè, Kalalé, Sègbana et Karimama.
« Si le chef de l’Etat n’avait pas institué
l’affaire du quota, ce n’était pas évident que nous soyons de la partie. C’est
un défi qu’il nous a lancé. A nous de ne pas le décevoir, en essayant de nous
montrer à la hauteur de la tâche », conseille la secrétaire exécutive de la
maire de Sègbana, Rose Sébastienne Gbassi. Antoinette Aoudi, Se de Kandi
renchérit : « A nous de lui montrer qu’il a raison de croire que les femmes
sont également capables de beaucoup de choses. Mon souhait, c’est qu’à la
deuxième mandature des acteurs de la réforme, qu’une part belle soit encore
accordée aux femmes ». A leur suite, Aquéline Isabelle Béhanzin de Bembèrèkè
promet que les femmes donneront le meilleur d’elles-mêmes, pour la réussite de
cette réforme. Une détermination que partagent Ida Sènassi Tossou et Anne
Bertille Gnanvi Ahiffongbé, les secrétaires exécutives respectives des mairies
de Kalalé et de Karimama.