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Epargne et placement: Des instruments de développement diversement appréciés

Economie

Les Fonds communs de placement (Fcp) peinent à séduire un public encore marqué par les scandales financiers de ces dernières décennies au Bénin. Pourtant, ces instruments proposés par des institutions bancaires légalement reconnues diffèrent radicalement des mécanismes des structures illégales de collecte d’épargne.

Par   Babylas ATINKPAHOUN, le 20 déc. 2024 à 06h59 Durée 3 min.
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Dans l'imaginaire collectif béninois, les promesses d'investissements lucratifs évoquent souvent des souvenirs douloureux. Les mots "investissement" ou "rendement" sont parfois source d’inquiétude pour de nombreux épargnants. De l'affaire Icc-Services à d'autres scandales financiers retentissants qui ont laissé des cicatrices profondes dans la société, les épargnants peinent à retrouver confiance. Pourtant, dans l'ombre de cette méfiance généralisée, des outils modernes comme les Fonds communs de placement (Fcp) se révèlent porteurs d'avenir. Encadrés par des réglementations strictes, ces instruments financiers restent encore méconnus et largement sous-exploités au Bénin. Pourquoi les épargnants n'osent-ils pas franchir le pas ? Les affaires de collecte illégale d’épargne ont marqué une génération entière. Avec des promesses de rendements faramineux, ces structures ont attiré des milliers de Béninois dans leurs traquenards, qui y ont souvent placé des économies de toute une vie. La plupart de ces initiatives fonctionnaient sur des bases insoutenables, ressemblant à des systèmes pyramidaux, jusqu’à leur effondrement. Pour Antoinette Assogba, une ancienne victime de l'affaire Icc-Services, le souvenir est vécu comme un traumatisme. « J’ai perdu toutes mes économies dans cette histoire. Depuis, je n’ose plus confier mon argent à quelqu'un, même pas aux banques », confie-t-elle, la voix chargée d'émotion. Ce type d’expérience a nourri une psychose qui continue de freiner l’adoption d’instruments financiers légitimes. D'autres formes de collecte illégale de fonds émergent régulièrement, souvent basées sur des systèmes électroniques. Ces plateformes opèrent avant de disparaître avec les fonds collectés, laissant les victimes sans recours. Leur mode de fonctionnement repose sur une discrétion totale, rendant leur traçabilité presque impossible. L’autre manche est la tontine locale communément appelée “Adogbè”. Avec de nombreux tontiniers opérant dans l'informel, ces systèmes séduisent grâce à une approche conviviale et des promesses de retraits rapides. Leur fonctionnement repose uniquement sur la confiance, car ils n'offrent aucune garantie légale ni traçabilité des fonds. A l'approche des fêtes de fin d'année, période où les épargnants espèrent récupérer leurs économies pour les dépenses festives, certains tontiniers disparaissent subitement, emportant l'ensemble des cotisations. Ce scénario, malheureusement récurrent, laisse des milliers de familles dans le désarroi et alimente davantage la méfiance envers toute forme d'épargne, y compris formelle. Ce qui continue de freiner l’adoption d’instruments financiers légitimes. « Beaucoup de gens associent automatiquement tout ce qui n’est pas un compte d’épargne classique ou un bien immobilier à une arnaque », constate Fidèle Essouan Agossa, économiste et spécialiste en gestion de patrimoine.

Démarcation nécessaire

Les Fonds communs de placement proposés par des banques et institutions financières légalement établies, offrent des garanties et une transparence qui les distinguent radicalement de ces systèmes frauduleux. « Il est important de faire la différence entre des fonds réglementés et les structures qui opèrent dans l’illégalité. Les Fcp sont supervisés par les autorités étatiques et financières comme la Bceao et leur gestion est encadrée par des règles strictes », explique Fidèle Essouan Agossa. Contrairement aux structures illégales comme Icc-Services, les Fcp permettent à plusieurs investisseurs de mettre en commun leurs capitaux pour les investir dans un portefeuille diversifié d’actifs tels que des actions, des obligations ou des produits monétaires. Ces produits sont gérés par des experts et leur performance est régulièrement contrôlée par les autorités de régulation. Benoît Mahougbé Dossou, entrepreneur et habitué de placement, témoigne des avantages qu’il a tirés des Fcp. « J’avais des doutes à cause de tout ce qu’on entend sur les placements. Mais avec les conseils d’une banque, j’ai investi dans un fonds obligataire. Aujourd’hui, mes rendements me permettent de financer une partie de mes projets », affirme-t-il. Au Bénin, bien que leur adoption reste faible, plusieurs banques ou institutions proposent des Fcp adaptés aux réalités locales, avec des tickets d’entrée accessibles. On peut citer les fonds obligataires, adaptés aux profils prudents, les fonds en actions, pour ceux qui visent des rendements plus élevés mais acceptent une prise de risque et aussi les fonds mixtes, qui combinent les deux approches. Les Fonds communs de placement (Fcp) offrent des rendements basés sur des analyses rigoureuses et des stratégies réfléchies, loin des promesses irréalistes des structures frauduleuses. Pour surmonter la méfiance héritée des scandales passés, il est crucial de promouvoir l'éducation financière, de différencier les produits légaux des systèmes illégaux, et d'augmenter la visibilité des Fcp par les banques. « Un accompagnement personnalisé via des services de conseil est également nécessaire pour rassurer les nouveaux investisseurs », conseille le spécialiste en gestion de patrimoine.

Option d’avenir

Malgré les obstacles, les Fonds communs de placement restent une alternative crédible et prometteuse pour diversifier et valoriser son patrimoine. Ils permettent non seulement de sécuriser l’épargne, mais aussi de soutenir des investissements dans des secteurs porteurs pour l’économie nationale tels que l’immobilier. En cela, la Caisse des dépôts et consignations du Bénin (Cdc-Bénin) se distingue par son offre diversifiée d'investissements, incluant l'immobilier, l'agro-industrie et d'autres secteurs, permettant ainsi aux épargnants de diversifier leur portefeuille en toute sécurité. Aussi, la Bourse régionale des valeurs mobilières (Brvm), moteur de financement des économies de l'Uemoa, constitue également un exemple concret d'opportunité de placement accessible à une large palette d'investisseurs. Dernièrement, l'introduction de la Loterie nationale du Bénin (Lnb) sur la Brvm a marqué un tournant historique, faisant la fierté des investisseurs béninois et régionaux. Cette opération, qui a entraîné un engouement notable, témoigne du potentiel attractif des entreprises locales sur le marché financier sous-régional. Elle ouvre également la voie à une démocratisation de l'investissement boursier, permettant à de nombreux épargnants de devenir actionnaires et de participer à la croissance économique. Pour Fidèle Essouan Agossa, les Fonds commun de placement, loin d’être des mirages, représentent une opportunité accessible et encadrée, qui pourrait devenir un pilier de l’épargne et de l’investissement au Bénin. L’enjeu reste d’en finir avec les stigmates des scandales passés et d’instaurer une nouvelle culture de confiance dans les investissements formels. « C'est  en recevant mon argent dans des systèmes fiables que j'ai réalisé à quel point cela pouvait générer de la richesse sur le long terme. Aujourd'hui, je suis fier d'avoir pris cette décision  », témoigne Benoît Mahougbé Dossou. À travers une éducation financière renforcée et une meilleure communication sur leur fiabilité, les Fcp pourraient jouer un rôle crucial dans la transformation du paysage financier béninois.