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Escalade du conflit au Soudan: L’Onu alerte sur les conséquences humanitaires dramatiques

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A l’heure où le Conseil des droits de l’homme se réunit à Genève, les membres de la Mission internationale indépendante d’établissement des faits de l’Onu sur le Soudan, alertent la communauté internationale sur l’intensification du conflit et les conséquences que cela aura sur les civils. Les experts mandatés demandent, entre autres, qu’un embargo soit mis sur les armes et de traduire les responsables en justice.

Par   Catherine Fiankan-Bokonga, Correspondante accréditée auprès de l’Office des Nations Unies à Genève (Suisse), le 18 juin 2025 à 09h31 Durée 3 min.
#Conseil des droits de l’homme #Soudan #Onu

Depuis avril 2023, la guerre oppose les Forces armées soudanaises (Saf) aux paramilitaires des Forces de soutien rapide (Rsf). En deux ans, le conflit a coûté la vie à des dizaines de milliers de civils, déplacé plus de 13 millions de personnes, et laissé derrière lui un sillage de violences sexuelles, de destructions massives et de famine. Le président de la Mission, Mohamed Chande Othman, a averti lors d’une conférence de presse à Genève (Suisse), que « le conflit au Soudan est loin d’être terminé ».

Rapport accablant

La Mission d’enquête de l’Onu a présenté le 17 juin dans le cadre de la 59e Session du Conseil des droits de l’homme, un rapport mentionnant l’intensification de l’usage d’armes lourdes en zones habitées, l’explosion des violences sexuelles et sexistes, l’instrumentalisation de l’aide humanitaire, les attaques ciblées contre les hôpitaux. Les infrastructures médicales ne sont pas épargnées. Le rapport dénonce le ciblage répété du Saudi Hospital à El Fasher par les Rsf, et une frappe de drone sur l’hôpital international d’Obeid ayant causé six morts. Quant à l’aide humanitaire, elle est entravée par des restrictions administratives imposées par les Saf, ou détournée par les Rsf. Le 2 juin, un convoi des Nations unies a été bombardé à Al Koma, causant la mort de cinq membres du personnel humanitaire.

A la complexité de la situation s’ajoute une crise sanitaire alarmante. Médecins Sans Frontières (Msf) alerte sur une flambée de cas de rougeole dans plusieurs régions du Darfour. Depuis les premiers cas recensés à Rokero, en juin 2024, jusqu’à fin mai 2025, plus de 9 950 patients ont été traités dans les structures médicales soutenues par Msf, dont 2 700 cas graves nécessitant une hospitalisation et 35 décès ont été enregistrés. Le conflit, en paralysant les campagnes de vaccination, en bloquant les approvisionnements en vaccins et en favorisant les déplacements massifs de population, a exacerbé la propagation de la maladie. Le 10 juin, une vaste campagne de vaccination orale contre le choléra a été lancée afin de protéger plus de 2,6 millions de personnes dans cinq localités de l’État de Khartoum, où l’épidémie a déjà fait 239 morts. Le Soudan fait face à un effondrement sanitaire aggravé par les pénuries d’eau, les déplacements massifs et l’effritement des services publics.

Crimes internationaux 

Mona Rishmawi, membre de la Mission, déplore une situation devenue « une urgence humanitaire et une crise des droits humains d’une gravité inouïe», où des crimes internationaux entachent toutes les parties impliquées. « Il est inconcevable que cette guerre entre dans sa troisième année sans aucune perspective de paix.» La violence à l’encontre des femmes s’est répandue et les violences sexistes ont explosé de manière impressionnante. Les femmes et filles, en particulier dans les camps sous contrôle Rsf, sont les principales victimes de cette brutalité systématique.

Malgré le refus de Khartoum d’autoriser l’accès au territoire soudanais, la Mission a mené 240 entretiens, recueilli 110 témoignages écrits et vérifié des dizaines de vidéos et d’attaques géolocalisées. Des dossiers nominatifs ont été constitués pour identifier les auteurs présumés des violations les plus graves. Des consultations ont aussi été organisées à Addis-Abeba et Nairobi, notamment avec le soutien de la Commission internationale de juristes. « L’impunité est le carburant de ce conflit », affirme Joy Ngozi Ezeilo, également membre de la Mission.

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La Mission exhorte les Etats à respecter l’embargo sur les armes, tel que prévu par la résolution 1556 du Conseil de sécurité. Mohamed Chande Othman a insisté sur la nécessité d’éviter toute complicité dans les crimes en cours : « Nous appelons à une action immédiate, à un respect rigoureux du droit international humanitaire. Les promesses de protection ne suffisent plus, elles doivent devenir réalité ».

 Catherine Fiankan-Bokonga