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Mise en œuvre du Programme élargi de vaccination: La marche du Bénin

Santé
Par   Marius IBIKOUNLE, le 27 févr. 2023 à 17h03
Le Bénin a fait du chemin en matière de vaccination. Les acquis enregistrés ces dernières décennies dans ce domaine sont révélateurs de sa détermination et son expérience au fil des ans. Quelques dysfonctionnements restent cependant à corriger pour renforcer les performances. Reconnue aujourd’hui comme efficace au plan mondial, la vaccination contribue à l’amélioration des conditions de vie des populations et au développement des communautés. De ce fait, le Programme élargi de vaccination (Pev) constitue un pilier fondamental de la mise en œuvre des soins de santé primaires et de l’atteinte de la couverture sanitaire universelle. Le Bénin a bien tracé son canevas afin de faire de son programme de vaccination un succès. Les soixante-dix-sept communes administratives du pays sont organisées en quatre-vingt-six communes Pev. Le pays dénombre neuf cent quatorze centres de santé publics et privés offrant les services de vaccination. Actuellement, le Pev couvre quatorze antigènes et cible treize maladies. Les enfants semblent les mieux lotis. Orienté vers les enfants de zéro à onze mois, ce programme commence par les protéger depuis le ventre de leur mère. Mais pour être complètement vacciné, les spécialistes expliquent qu’un nourrisson doit recevoir tous les quatorze antigènes du Pev depuis sa naissance et suivant cinq rendez-vous avant de fêter son premier anniversaire. Le vaccin Bilié de Calmette et Guérin communément appelé Bcg est retenu comme le tout premier antigène que reçoivent les enfants dès leur naissance et qui les protège contre la tuberculose. Cette composition a été renforcée récemment par l’introduction du vaccin contre l’hépatite B.

Ce qu’il faut savoir des antigènes

En marge de l’Assemblée générale statutaire de la Fondation Pev Bénin, vendredi 10 février dernier, Euripide Avokpaho, médecin appui au service de vaccination à l’Agence nationale des soins de santé primaires, a levé un coin de voile sur les différents antigènes et les maladies contre lesquelles ils protègent notamment dans les rangs des enfants. On retient de sa présentation que dans le domaine de la vaccination, rien n’est fait dans l’à-peu-près. Selon lui, le pentavalent comporte cinq antigènes et protège contre l’hépatite B, l’Haemophilus influenzae type b, la diphtérie, la coqueluche, le tétanos. La méningite et la fièvre jaune sont respectivement prévenues par les vaccins Men A et le vaccin anti-amiral (Vaa) contre la fièvre jaune. Le vaccin Rr comporte deux antigènes et est dirigé contre la rougeole et la rubéole tandis que les vaccins Pcv-13 et le rotavac sont respectivement utilisés dans la prévention de l’infection à pneumocoque et les diarrhées à rotavirus. Toutefois, l’efficacité des vaccins est liée au respect d'un calendrier. « Après six semaines, le nourrisson reçoit sa dose de pentavalent avec le vaccin polio oral, le vaccin rotavirus et le vaccin Pcv-13. Ces doses se répètent pendant les trois mois suivant sa naissance. Au dernier rendez-vous, plus précisément neuf mois après sa naissance, l’enfant reçoit quatre antigènes contre la rougeole/rubéole, fièvre jaune et méningite », précise le médecin. [caption id="attachment_93368" align="alignnone" width="450"] L'administration du vaccin salvateur est aujourd'hui
admise par tous et partout[/caption] La protection vaccinale de l’enfant dépend également de la dose vaccinale de sa mère. Une femme enceinte ou une femme en âge de procréer doit recevoir cinq doses du vaccin antitétanique-antidiphtérique (Td). Cette précaution vis-à-vis de la femme enceinte vise à protéger le nouveau-né contre le tétanos néo-natal et à donner une immunité complète à sa mère. Le calendrier vaccinal chez la femme enceinte exige aussi l’administration de deux doses de vaccin antitétanique au cours de la première grossesse. La première doit être administrée le plus tôt possible pendant la grossesse et la deuxième un mois après la première injection. Il faut préciser que ces dernières années, le Programme élargi de vaccination a enregistré des avancées majeures. Si auparavant le vaccin contre la fièvre jaune avait une validité de dix ans, aujourd’hui, ce vaccin octroie une immunité à vie. Mieux, depuis 2022, le Pev a enregistré le vaccin contre la Covid-19 au profit des enfants.

Du chemin avec le Pev

Selon la fondation Pev, le déclic pour le Programme élargi de vaccination remonte à environ quatre décennies. « De 1987 à 1992, la mise en œuvre de l’initiative de Bamako (une réforme de la gestion des systèmes de santé) au Bénin s’est soldée par de bonnes performances, notamment en matière de couverture vaccinale des enfants. Ces efforts ont été appréciés au plan international, à travers le prix Comlan Quenum pour la santé publique en Afrique. Depuis, le Bénin ne s’est plus arrêté. Les initiatives du gouvernement et d’autres structures ont permis depuis plusieurs décennies d’asseoir un programme efficace au service des enfants, des femmes enceintes, des mères et des communautés. Lancé en 1995 par Véronique Lawson, alors ministre de la Santé, le Pev vise à pérenniser les acquis des interventions vaccinales au Bénin. A cet effet, les partenaires au développement et des structures telles que la fondation Pev s’illustrent sur le terrain pour accompagner le gouvernement.

Le sens des efforts

Il faut souligner que le chemin parcouru par le Bénin avant d’arriver à ces performances n’a pas été un long fleuve tranquille. Des sources sanitaires renseignent que la dernière décennie du XXe siècle a été assez difficile pour les acteurs de la santé. Vers la fin des années 1990, les progrès accomplis par les programmes internationaux d’immunisation stagnaient. Plus de trente millions d’enfants dans les pays en développement n’étaient pas totalement immunisés contre les maladies mortelles et beaucoup d’autres n’avaient pas reçu un seul vaccin. Aussi préoccupée par la question, la fondation Pev Bénin note des disparités dans la couverture vaccinale aux niveaux régional et local, allant de l’insuffisance des ressources à la mauvaise gestion des systèmes de santé en passant par le déficit de suivi et de supervision. Pour relever ces défis, il faut une mobilisation des acteurs pour des initiatives plus soutenues contre les maladies, ce qui passe par la réduction de la fracture vaccinale entre les pays, les régions et les communautés. Au regard de ces défis, cette fondation se positionne comme une association citoyenne au Bénin. Elle est le précurseur des grandes fondations intervenant aujourd’hui dans la vaccination comme la Fondation Bill et Melinda Gates. Sur le plan international, l’Alliance globale pour les vaccins et l’immunisation (Gavi) constitue également un engagement citoyen majeur en faveur de la vaccination. Cette alliance est fondée pour remédier à une défaillance du marché et garantir un approvisionnement sûr en vaccins à des prix abordables pour les pays en développement. L’engagement de ces différentes structures en faveur du vaccin permet d’enregistrer des avancées majeures dans le monde. Selon Cathérine Fiankan-Bokonga, correspondante accréditée auprès de l’Office des Nations Unies à Genève, « la croissance du taux d’immunisation a contribué à réduire de moitié la mortalité infantile en évitant environ 16,2 millions de décès et a fait chuter de façon spectaculaire l’incidence des maladies infectieuses mortelles et débilitantes ».

Défis

Si les efforts du Bénin en matière de qualité et de couverture sont palpables, des actions restent à mener pour parfaire certains indicateurs. Les défis ne sont pas moindres. A ce jour, le Bénin note encore l’existence des enfants (ndlr : avec zéro dose de vaccin) ainsi que des enfants sous vaccinés, relève l’Agence nationale des soins de santé primaires. L’agence met l’accent sur la bonne collaboration entre le ministère de la Santé et les plateformes des Organisations de la société civile afin d’améliorer les données. Au nombre des défis au Bénin, Euripide Avokpaho, médecin appui au service de vaccination à ladite agence évoque « les foyers d’épidémie repérés par le système de surveillance du ministère de la Santé, la faible qualité des données du fait de l’estimation du dénominateur des cibles à vacciner ». Le Bénin sait que pour demeurer parmi les bons exemples en matière de couverture vaccinale, il lui faudra retrousser ses manches et agir sur ses faiblesses. Partant de cette logique, le gouvernement envisage l’introduction de la 2e dose du vaccin Rr (vaccin associant la rougeole et la rubéole) et du Vpi (Vaccin polio inactivé dans le Pev), l’élargissement des cibles du Pev avec la vaccination au-delà de la première année de vie. Pour les acteurs sanitaires, il est nécessaire d’actualiser les plans normatifs du Pev et d’étendre le processus d’équité en vaccination « avec réduction des zéro doses ». Aussi, le Bénin penche-t-il pour des campagnes de suivi de l’introduction de nouveaux vaccins contre le paludisme, le choléra, la fièvre jaune, le cancer du col de l’utérus. Le renforcement du partenariat public-privé et de la communication pour renforcer le Pev à travers le plaidoyer et la mobilisation sociale sont des pistes à explorer. Pour relever ces défis, améliorer ses indicateurs et renforcer ses acquis, le pays compte sur l’existence de ses partenaires techniques et financiers et des plateformes comme la Fondation Pev ■