La Nation Bénin...
Moins de vingt-quatre heures après la tentative de coup d’État du dimanche 7 décembre, les principaux partis politiques béninois, de la mouvance présidentielle à l’opposition, se sont retrouvés lundi 8 décembre à Cotonou pour afficher un front commun inédit. Ils ont condamné la tentative de prise de pouvoir par la force et réaffirmé leur attachement à la démocratie et à l’État de droit.
A l’appel de plusieurs formations politiques, une rencontre exceptionnelle s’est tenue ce lundi 8 décembre à Cotonou. A la place Bulgarie et sous le regard attentif des militants, responsables de partis de la majorité et de l’opposition se sont rassemblés pour une déclaration commune, à la suite de la tentative de coup d’État de la veille. L’image est rare dans un paysage politique souvent polarisé. L’Union progressiste le Renouveau (Upr), le Bloc républicain (Br) et les Forces cauris pour un Bénin émergent (Fcbe), côte à côte, unis par un même message : la défense de la République. Tous ont mesuré la portée de ce qui s’était joué quelques heures plus tôt. Sans triomphalisme, mais avec gravité, les leaders politiques ont insisté sur la nécessité de préserver la stabilité institutionnelle, alors que le pays sortait à peine de la stupeur provoquée par les événements du dimanche.
Au nom de l’Up Le Renouveau, Gérard Gbénonchi a rappelé que la direction exécutive nationale de sa formation s’était réunie en session extraordinaire pour analyser la situation nationale consécutive à la tentative avortée de mutinerie menée par quelques éléments des forces de défense et de sécurité. Il a insisté sur la condamnation de toute velléité de déstabilisation des institutions nationales, tout en réaffirmant l’attachement du parti à la légalité constitutionnelle, à l’ordre républicain et à la continuité de l’État. Il rappelle dans sa déclaration que cet acte intervient plus de cinquante ans après les événements de 1972, et se retrouve carrément aux antipodes des ambitions du pays. Le parti a salué la vigilance et le professionnalisme des autorités compétentes, appelant à la poursuite d’enquêtes avec diligence et fermeté afin d’établir toute la vérité et de situer les responsabilités.
Un front politique rare
Du côté de l’opposition, la Fcbe s’est inscrite dans la même logique. Son représentant, Ruffin Nansounon, a estimé les faits d’une extrême gravité. Selon lui, l’objectif des mutins était de remettre en cause un acquis fondamental : la démocratie issue de la Conférence nationale des forces vives de février 1990. Il a rappelé l’engagement historique des forces de défense et de sécurité à ne plus s’immiscer dans la vie politique et a tenu à féliciter la majorité de l’institution militaire, restée selon lui fidèle à cet engagement. Il a salué la bravoure des forces loyalistes et rendu hommage aux soldats tombés, tout en exigeant que la rigueur de la loi s’applique à tous les auteurs et complices.
Dans un langage imagé, le député Assan Séibou du Bloc républicain a décrit le scénario redouté : la dissolution des partis politiques et la fin de la vie démocratique. « Ces gens voulaient envoyer le pays dans le décor », a-t-il lancé, évoquant un retour aux instabilités des années 1960. Il a salué ce qu’il a présenté comme une protection divine du pays et exprimé sa gratitude envers le président Patrice Talon, indemne à l’issue des événements.
Moment fort de la rencontre, l’intervention de Joseph Djogbénou, président de l’Up Le Renouveau, a tenté de dépasser les clivages partisans. Dans une adresse tournée vers la jeunesse, il a insisté sur le fait que la mobilisation n’était pas celle des partis, mais celle de citoyens. « L’unité nationale, l’État, nos valeurs démocratiques dépassent toutes les obédiences politiques », a-t-il déclaré. Il a mis en garde contre la tentation des coups de force, qualifiant le coup d’État d’illusion d’une journée et de tragédie des années.
Au-delà des déclarations, cette séquence marque un moment particulier dans la vie politique béninoise. La convergence publique entre formations rivales, en pleine crise sécuritaire et institutionnelle, constitue un signal politique fort. Chacun, dans son registre, a appelé au retour complet à la normalité, au respect de la Constitution et à la consolidation de l’État de droit. Le mot d’ordre est de tourner la page de la peur et refermer la brèche ouverte par les armes.