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Code électoral modifié et complété: Les points de flexibilité et d’ouverture

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ADOPTION D’UN NOUVEAU CODE ÉLECTORAL ADOPTION D’UN NOUVEAU CODE ÉLECTORAL

La réforme du code électoral, mardi 5 mars 2024, présentée par certaines voix comme étant discriminante, porte cependant de nombreux points de flexibilité et d’ouverture, dans la perspective des prochaines joutes électorales. Les nouvelles dispositions sont plutôt de nature à renforcer le système partisan béninois. 

Par   Ariel GBAGUIDI, le 12 mars 2024 à 04h09 Durée 3 min.
#Code électoral modifié et complété
Des critiques tendent à faire croire que certaines reformulations et dispositions nouvelles dudit code sont discriminantes. L’opposition, aussitôt le vote de la nouvelle loi acquis, s’est fait échos d’une telle perspective. A la lecture des dispositions que la plupart des critiques retiennent contre cette réforme, il apparait toutefois qu’elles constituent davantage des points de flexibilité et d’ouverture que d’exclusion. Il en est ainsi de la règle qui élimine de l’attribution des sièges tout parti qui n’obtient pas 20 % des voix dans une circonscription, lors des élections législatives.
En effet, retient la nouvelle loi, pour être éligible et accéder au partage des sièges, les partis doivent obtenir 20 % des suffrages dans chacune des circonscriptions électorales du pays, soit 1/5e des suffrages. Cette disposition, loin d’être discriminante comme certaines voix tendent à le faire croire, fait des partis au Bénin désormais de réels partis nationaux, qui ne seront plus l’otage d’un leader régional puisqu’ils ne peuvent se contenter d’être représentatifs dans quelques régions seulement. C’est encore le cas aujourd’hui, alors que dans son esprit, la réforme du système partisan proscrit un tel schéma.

Une innovation significative

Et tout en corsant en apparence le verrou, la nouvelle disposition fait une ouverture : elle permet aux partis, à travers un accord de législature (une innovation significative de flexibilité), de sommer leurs suffrages dans certaines circonstances, lorsque individuellement, aucun des partis en question n’a obtenu les 20 % dans une circonscription. Cette dérogation n’exclut toutefois pas l’exigence en vigueur et réitérée par le nouveau code de réunir 10 % des suffrages au plan national.
Et si la charte des partis interdit les alliances et les coalitions aux élections, et astreint ceux-ci à devoir présenter chacun sa liste, le nouveau code permet des accords de gouvernance ou de législature. Ce qui ouvre la perspective à deux avancées majeures : les aménagements actuels permettent aux partis de même obédience de conclure des engagements formels entre eux portant sur leur volonté de travailler en intelligence pour un même but, et partant ces partis ont la latitude de constituer de grands groupes parlementaires une fois qu’ils décrochent des sièges de député ; toutes choses qui favorisent la cohérence des courants politiques, ce qui est encore loin le cas actuellement. Aussi, les partis de moindre envergure pourront également siéger au Parlement.
Une passerelle, en somme, que les partis peuvent ériger désormais pour se sortir de difficulté. Celle notamment de ne pouvoir individuellement, le cas échéant, réunir les 10 % de suffrages exigés par la loi au plan national lors des législatives et les 20 % par circonscription également exigés et sans lesquels on ne peut lever de siège de député. Car à la lettre, si un parti obtient même 40 % des suffrages dans plusieurs circonscriptions électorales et vient à manquer d’avoir les 20 % exigés dans une seule des 24 circonscriptions électorales, il perd toute possibilité d’accéder au partage des sièges. D’où l’ouverture que représente l’accord de législature.  
Cette disposition a vocation à tuer désormais toute velléité à animer au Bénin des partis d’envergure régionale ou ethnique. Du reste, le multipartisme se trouve renforcé par cette disposition qui permettra aux partis de moindre gabarit de se tenir à flot à travers des accords de législature ou de gouvernance. Ainsi, l’opposition pourra parler d’une seule voix en fédérant ses forces, face éventuellement à un pouvoir fort qui tendrait à l’écraser par sa machine politique. Du côté de la mouvance, si l’on reste dans le contexte actuel, les partis comme Moele Bénin et Rassemblement National qui ont quelque peu mal à tirer les marrons du feu face aux mastodontes que sont l’Union progressiste le Renouveau et le Bloc Républicain, pourront mieux s’en sortir en réunissant leurs forces pour pouvoir décrocher des sièges de député.
A bien des égards, le vote intervenu mardi 5 mars dernier consacre la volonté de l’Assemblée nationale de donner un contenu réel au renforcement des partis politiques au Bénin et, par conséquent, de promouvoir le développement équilibré du Bénin ainsi que l’unité nationale. Loin de pénaliser par ciblage, le seuil retenu de 20 % des suffrages par circonscription électorale impose à tous les partis, y compris ceux qui s’estiment forts actuellement, de redoubler d’ardeur et de décupler leurs énergies sur le terrain, dans la perspective des prochaines joutes électorales.