La Nation Bénin...
Depuis
quelques jours, l’annonce de la délocalisation du grand marché de Dantokpa fait
couler beaucoup d’encre et de salive. Pourtant, cette option du gouvernement
vise le développement et la modernisation en marche au Bénin depuis huit ans.
La
directrice générale de l’Agence nationale de gestion des marchés (Anagem)
aurait jeté le pavé dans la mare en annonçant tout récemment la délocalisation
du grand marché de Dantokpa. C’est du moins ce qu’on constate à la suite de ses
propos sur le sujet, qui déchaînent les passions depuis quelques jours. «
Dantokpa n’existera plus », a affirmé sans ambages Eunice Loisel Kiniffo,
directrice générale de l’Agence nationale de gestion des marchés, lors d’une
sortie médiatique. A l’occasion, elle a invité toutes les personnes qui vendent
dans ce centre commercial qui végète dans une insalubrité notoire et où règne
une insécurité sans pareil, à se rapprocher de l’agence pour s’inscrire afin
d'intégrer les nouveaux marchés. De façon objective, ces propos ne devraient
pas être source de polémique puisque cette démarche de la directrice éviterait
les plaintes et cris d’angoisse lorsque l’autorité va déployer l’arsenal
nécessaire et commencer les opérations de démolition sur le site. D’ailleurs,
l’information ne devrait non plus surprendre puisque cette annonce avait été
faite depuis plus de cinq ans par le président de la République lors d’une
rencontre avec les femmes des marchés. Patrice Talon avait déclaré en 2018 que
le marché Dantokpa ne peut plus rester en ce lieu. « Vous savez que je ne fais
pas la langue de bois. Je vous le dirai tel que cela se présente. Le marché
Dantokpa ne peut plus rester en ce lieu», a déclaré en toute franchise le chef
de l’Etat. A l’époque, Patrice Talon a indiqué que le relogement se fera sur
deux sites distincts déjà identifiés et dont les travaux d’études sont presque
terminés. « Tout ce qui est bijoux, pagnes, sacs, chaussures seront envoyés
ailleurs, précisément à Kouhounou. La seconde partie sera délocalisée vers
Akassato dans la commune d’Abomey-Calavi », a-t-il clarifié tout en rassurant
les femmes qu’elles ne seront pas délogées de Dantokpa tant que les travaux ne
seront pas bouclés au niveau des nouvelles destinations. Le président de la
République est en train de tenir parole puisque à l’étape actuelle, le centre
commercial de Kouhounou et le marché de gros d’Akassato sont presque achevés et
l’Anagem, pour sa part a lancé le recensement des commerçants du marché
Dantokpa. Si tout se passe comme prévu, la prochaine étape sera le relogement
de tout le monde avant l’étape fatidique
qu’est la démolition du marché Dantokpa. La directrice générale de
l’Agence nationale de gestion des marchés est revenue sur ces dispositions en
donnant les orientations pour le bon déroulement du processus de délogement. «
Dans le portefeuille de l’Anagem, nous avons à charge la gestion du pôle
commercial général Mathieu Kérékou de Kouhounou. Ce pôle commercial va abriter
essentiellement quatre activités qui seront délogées de Dantokpa. Il s’agit des
vendeuses de pagnes, de bijoux, de la maroquinerie et des vendeuses de produits
cosmétiques. Il n’y a pas de produits alimentaires sur ce site», précise Eunice
Loisel Kiniffo.
...à de nombreux paramètres que beaucoup semblent perdre de vue
Autopsie
Dantokpa est un marché implanté depuis plus de 80 ans sur un espace qui a été chaque fois revu au point où il ne reste plus rien autour aujourd’hui pour continuer l’extension. Il se retrouve au cœur de la ville de Cotonou sur une superficie d’environ 25 hectares et a englouti les maisons et populations environnantes. Il compte près de 40 000 commerçants aujourd’hui, alors que ce marché installé au bord de la lagune de Cotonou n’accueillait qu’à peine 1000 commerçants. Pourtant, cela n’émousse pas les ardeurs et le marché continue d’accueillir de nouveaux venus. Dans ce sens, le président de la République se demandait lors de sa rencontre avec les femmes des marchés si ce marché peut-il continuer à exister dans 20, voire 30 ans si rien n’est fait dans une vision plus grande. « Je ne travaille pas seulement pour le présent. Je le fais aussi pour le futur. Le marché Dantokpa ne peut plus rester en ce lieu », a-t-il lancé une énième fois pendant cette rencontre. Les nouveaux venus dans ce marché devenu désormais trop exigu pour contenir cet effectif n’ont pas de choix que de s’installer dans les allées et même au bord des caniveaux. Ce qui crée un véritable problème d’aménagement et de circulation des personnes avec tout ce qui va avec. Ceux qui ont l’habitude de fréquenter le marché sont les mieux placés pour en témoigner. Au demeurant, s’il faut opter pour un désengorgement du marché, qui accepterait parmi les commerçants de quitter ce lieu ? Mieux, Dantokpa se confond aux domiciles qui se trouvent aux alentours, au point où il serait difficile aujourd’hui de véritablement délimiter le marché. Conséquence, l’insécurité y règne en maître et l’insalubrité y est notoire. José Tonato, ministre du Cadre de vie et du Développement durable justifie lors d’une sortie médiatique, que la décision de fermer Dantokpa émane de ces conséquences majeures qui ne favorisent plus une vie saine dans ce marché. « Il y a un mélange total des genres et des activités commerciales, allant du détail au gros, mélangeant tous les types de produits, agricoles, manufacturés, nobles, textiles, bijoux, cosmétiques…», a-t-il souligné. Une situation critique, surtout du point de vue environnemental à laquelle il fallait trouver forcément une solution, selon le ministre en charge du Cadre de vie. La rénovation à laquelle plusieurs régimes ont eu recours dans ce marché serait-elle encore la solution aujourd’hui, au regard des multiples drames, incendies, braquages enregistrés par le passé ? L’autre option proposée par certains pourfendeurs est la reconstruction sur site. Mais en effet, il va falloir déplacer tout le monde et raser tout ce qui est en place afin de respecter une certaine norme en la matière comme c’est le cas avec les marchés urbains. Quel espace dans la zone peut contenir les près de 40 000 commerçants du marché alors qu’il existe suffisamment d’espace dans les nouveaux marchés modernes en attendant que les pôles commerciaux de Kouhounou et d’Akassato ne viennent absorber le reste ?
Ce
qui va changer
Cette décision du gouvernement qui cause aujourd’hui des remous ne vise que l’intérêt général et regorge de points positifs que certaines personnes ne perçoivent pas encore ou font simplement semblant de ne pas percevoir. Peut-être qu’ils se rendront compte plus tard de la pertinence de la mesure comme ce fut le cas pour plusieurs autres infrastructures dont les marchés urbains modernes, les routes et autres, dont se félicitent aujourd’hui les populations. Concrètement, la délocalisation du marché Dantokpa va résoudre d’énormes problèmes liés à l’encombrement, à la fluidité de la circulation; que ça soit au sein du marché, aux alentours ou de façon générale dans la ville de Cotonou. L’insalubrité dans cette zone et celles environnantes sera désormais un vieux souvenir. L’insécurité qui est un problème crucial dans ce marché sera mieux gérée avec des mesures sécuritaires appropriées. Il existe plusieurs ghettos au sein de ce marché, souvent à des endroits où les forces de l’ordre ont du mal à accéder. Il en est de même pour les soldats du feu qui n’arrivent pas à intervenir promptement en cas d’éventuel drame. Il faut dire que le Bénin n’est pas le premier pays au monde ou en Afrique à vouloir délocaliser un marché, et pour qui connaît le gouvernement et son chef pour le goût et le travail bien fait, ne devrait pas s’inquiéter du visage que présenteront les nouveaux sites avec leurs occupants. En ce qui concerne l’installation des commerçants dans les nouveaux marchés, le problème ne va pas se poser non plus puisque les autorités compétentes ont prouvé leur capacité à gérer convenablement cet aspect avec l’ouverture du marché de Cadjèhoun où les occupants ont été installés à l’issue d’un tirage au sort au vu et au su de tout le monde. Pour ce qui est du site du marché Dantokpa, il ne restera pas un point noir à Cotonou, selon Wilfried Léandre Houngbédji, secrétaire général adjoint et porte-parole du gouvernement. Ce dernier a rassuré lors d’une rencontre avec les médias, qu’il y aura de nouveaux investissements en ce lieu qui ne perdra rien de son attractivité. Des propos qui devraient dissiper les inquiétudes et rassurer plus d’un.