La Nation Bénin...
Le
leadership féminin s’exerce. Bien l’assumer contribue au développement. Les
féministes et autres défenseurs des droits des femmes en conviennent. La célébration
de la Journée internationale des droits de la femme édition 2024 a permis de
partager quelques astuces.
Les
aspirations à l’occasion de la Journée internationale des droits de la femme
2024 convergent vers l’affirmation d’un leadership féminin au service du
développement. C’est du moins l’idée au cœur des réflexions entrant dans le
cadre de la Jif.
Pour
entrer dans le vif du sujet, les féministes ont fait une clarification
conceptuelle du terme leadership avant de s’attarder sur le leadership féminin,
et mieux encore le leadership féminin au service du développement et de la
paix. Pour bon nombre de femmes, le leader féminin incarne la paix, la
combativité, la créativité, le dynamisme, l’esprit d’équipe et d’écoute….
Au
cours d’un panel de discussions organisé par le Programme d’appui à l’égalité
du genre (Paeg), mercredi 20 mars dans le cadre de la Journée internationale de
la femme, les langues des panélistes se sont déliées pour aborder de fond en
comble la notion du leadership.
Mido
Mahoulomè Adjahossou, cadre à la mairie de Zogbodomey, membre de la cohorte du
Paeg, n’attribue pas une définition toute faite au leadership, mais elle
ébauche tout de même quelques traits du leader. « C’est un ensemble de
thématiques qui permettent de définir le leadership. On peut l’associer à
l’aura d’une personne, à sa capacité à influencer et guider. Le leader, c’est
quelqu’un qui a une vision claire de ses objectifs et la capacité de fédérer
ses pairs autour de lui pour les atteindre ».
Pour
elle, le leadership n’est pas une question de niveau intellectuel ou de
diplôme. « Une femme de bas niveau en milieu urbain peut être l’intellectuelle
en milieu communautaire. Elle doit avoir un pouvoir d’achat, mener des actions
et ne demander de l’aide qu’à un niveau infime », relève-t-elle.
Des
valeurs
Fatoumatou
Batoko Zossou, présidente de la Coalition nationale pour la paix, pense que
l’humilité, le charisme, l’honnêteté et la compassion doivent être les
maîtres-mots du leader et surtout de la femme leader politique. Le leadership
est incompatible avec le renoncement des valeurs. «Quand on est leader, il faut
éviter d’être en décadence avec sa coutume », martèle-t-elle.
A
en croire les politiciens, les suspicions, les intrigues et les coups bas sont
légion en politique. Les femmes politiciennes ne font pas exception sur ce
terrain. Beaucoup incriminent le manque de soutien et de solidarité entre
elles. Pourtant, elles ne devraient pas prêter le flanc à ces jeux à partir du
moment où elles-mêmes font souvent l’objet de critiques, de convoitises, et de
suspicions.
C’est
justement sur ce terrain qu’elles doivent se démarquer du lot. C’est du moins
l’invite de Maxime Houinato, représentant Onu femme pour l’Afrique de l’Ouest
et du Centre, qui engage par ailleurs la responsabilité des hommes à plusieurs
niveaux afin d’inverser la tendance. Les hommes doivent être des exemples pour
les femmes dans le milieu professionnel ; ils doivent assurer la sécurité des
femmes partout, adopter un comportement responsable d’un homme à domicile. Il
relève également l’humanisation des consciences masculines, en les exhortant à
s’impliquer dans la promotion de l’égalité homme-femme.
Mais
les hommes ne sauraient être les seuls maîtres du jeu. Patrick Hinnou,
sociologue politiste, enseignant chercheur à l’Université d’Abomey-Calavi,
encourage la gent féminine à bannir les clichés négatifs et étiquettes
nuisibles qui leur collent à la peau. Il s’attarde sur le profil de la femme
leader politique qui, selon lui, doit maîtriser son environnement, s’assumer,
assurer ses valeurs féminines et être méthodique. A ce niveau, il mentionne
quelques approches qui doivent guider la femme leader. D'abord, il soutient
l’approche directive. «Le leader doit savoir prendre des décisions et orienter
les autres», explique-t-il avant d’évoquer ensuite l’approche persuasive. « La
femme leader politique doit pouvoir partager avec les autres sa vision »,
poursuit-il. Le sociologue politiste mise enfin sur l’approche délégative. « La
femme doit pouvoir déléguer aux autres une parcelle de son pouvoir et être dans
une dynamique évolutive », recommande-t-il.
En
insistant sur ces points, Patrick Hinnou relève les fossés qui ont longtemps
contribué au retard des femmes en politique. Il fait une rétrospection dans les
années 1970 pour constater que les femmes ont toujours été évincées du jeu
politique. «Sur le terrain politique, elles ont été dépendantes de la volonté
des hommes. En dehors des amazones qui se sont illustrées, les femmes béninoises
sont restées longtemps absentes du milieu politique. Elles ont été mises en
marge des responsabilités majeures. Celles qui pouvaient oser étaient peu
valorisées », fait-il savoir.
Des
progrès en dépit des disparités
Huguette
Bokpè Gnacadja, présidente de l’Institut national de la femme (Inf),
relativise. A la célébration de la Journée internationale de la femme, lundi 25
mars au ministère des Affaires étrangères (Mae), elle a exhibé les grandes
améliorations notées en faveur de l’effectif numérique des femmes depuis 2016
au sein des instances décisionnelles, améliorations qu’elle met à l’actif du
chef de l’Etat, Patrice Talon. Le Bénin enregistre depuis 2021 une femme au
poste de vice-président ; 23,80 % de femmes occupent des portefeuilles ministériels
; 26,61 % sont élues députées à la neuvième législature ; 34 % sont nommées
secrétaires exécutives ; 39,9 % sont directrices ou directrices adjointes de
cabinet ; 38,8 % sont secrétaires générales de ministères.
Le
défi pour les femmes et les pouvoirs publics, c’est de maintenir ces
pourcentages, à défaut de les améliorer. Beaucoup espèrent que la
présidentielle de 2026 permettra à notre pays de les porter davantage au
pinacle.
Là-dessus,
elles ont intérêt à se mettre davantage en évidence et à faire montre de
leadership. Ce travail doit prendre corps à partir du cercle familial. « Les
femmes doivent militer en politique tout en promouvant la paix. La paix
commence à partir du foyer et dans les partis politiques», indique Mido
Mahoulomè Adjahossou, membre de la cohorte 1 du Paeg.
Fatoumatou
Batoko Zossou, présidente de la Coalition nationale pour la paix renchérit : «
Il serait difficile pour une femme leader politique d’exposer sa vision dans un
environnement chaotique. Les femmes leaders doivent promouvoir le dialogue
communautaire ».
Aux
femmes et aux leaders politiques, Mido Mahoulomè Adjassohou, prodigue quelques
conseils. « Il faut voir le chemin parcouru, renforcer les acquis tout en
impulsant sa dynamique aux autres et travailler pour atteindre sa vision ».
En
un mot, le leadership est une question de possibilité, de capacité et de
volonté.