A l’horizon 2030, chaque Béninois devrait jouir d’un état nutritionnel optimal pour son bien-être, lui permettant de participer activement à la création de richesse et au développement durable. C’est la vision définie dans la nouvelle Politique nationale d’alimentation et de nutrition (Pnan 2023-2033) dont la finalité est le développement humain durable.
Son élaboration relève de la nécessité de disposer d’un document fédérateur des interventions liées à l’alimentation et à la nutrition, pour une réponse coordonnée des différents acteurs dans le domaine. Les orientations stratégiques mettent l’accent sur la création d’un environnement favorable à la mise en œuvre des interventions, la lutte contre toutes les formes de malnutrition, d’insécurité alimentaire, de toxi-infection alimentaire et de retard psychomoteur, ainsi que le renforcement du programme d’alimentation en milieu scolaire.
Quatre défis majeurs sont identifiés dans le document à savoir la performance du cadre institutionnel, la capacité du Bénin à satisfaire aux besoins alimentaires et nutritionnels en quantité et en qualité, l’offre de services et soins liés aux maladies nutritionnelles et le développement des services sociocommunautaires et éducationnels en faveur de la sécurité alimentaire et de la nutrition. Pour y parvenir, quatre programmes proposés seront coordonnés par le Conseil de l’alimentation et de la nutrition. Il s’agit du Programme d’appui institutionnel pour l’amélioration des environnements alimentaires (Paiaea), du Programme national d’alimentation, de nutrition et de développement de la petite enfance (Pnandpe), du Programme de renforcement de l’alimentation scolaire (Pras) et du Programme de la nutrition adéquate de la femme enceinte et de suivi du fœtus (Pnaff). Leur mise en œuvre contribuera à résorber la persistance de la malnutrition qui explique un essor des maladies non transmissibles telles que le diabète, les maladies cardiovasculaires, l’hypertension artérielle, le cancer.
Situation préoccupante
La politique nationale est élaborée sur la base du diagnostic peu reluisant de la situation alimentaire et nutritionnelle au Bénin. L’Analyse globale de la vulnérabilité et de la sécurité alimentaire (Agvsa) 2017-2018 a montré que 14,1 % des ménages béninois avaient une consommation alimentaire inadéquate, c’est-à-dire inappropriée en termes de fréquence et de diversité alimentaires ; pendant que 9,6 % de la population (soit plus d’un million de personnes) était en insécurité alimentaire et 0,7 % en insécurité alimentaire sévère.
Le cas des enfants de moins de 5 ans est particulièrement alarmant. En effet, 32 % des enfants souffraient encore de malnutrition chronique et 11 % sous sa forme sévère au Bénin, d’après la cinquième Enquête démographique et de santé (Eds 2017-2018). De même, 5 % des enfants sont émaciés et 1 % le sont sous la forme sévère ; 72 % des enfants de 6 à 59 mois sont anémiés et 3 % sous la forme sévère. La prévalence du retard de croissance et de l’émaciation est plus prononcée en milieu rural (36 %) qu’en milieu urbain (28 %). Par ailleurs, l’on comptait 17 % d’enfants souffrant d’une insuffisance pondérale et 4 % présentant une insuffisance pondérale grave.
La carence en micronutriments, notamment en fer, constitue un fléau aussi bien chez les enfants de moins de 5 ans (72 % des enfants de 6 à 59 mois sont atteints d’anémie) que chez les femmes en âge de procréer (58 %) en 2017.
Plus récent, le bulletin hebdomadaire du Mobile Vulnerability Analysis and Mapping (Mvam), réalisé par le Programme alimentaire mondial (Pam), sous la supervision de la Cellule technique de suivi et appui à la gestion de la sécurité alimentaire (Ct-Sagsa/Maep), sur la période de mai à juillet 2021, a estimé à 5,1 millions, le nombre de Béninois ayant une consommation alimentaire insuffisante en raison d’une hausse notable des prix des denrées alimentaires.
Facteurs
La persistance de l’insécurité alimentaire s’explique, entre autres, par la pauvreté ; l’inexistence en général de dispositifs appropriés de prise en charge nutritionnelle, en particulier pour ce qui concerne les personnes du troisième âge ; la non disponibilité ou la faible accessibilité des aliments à haute valeur nutritive, notamment des produits protéiniques et des fruits et légumes ; la faible diversification du régime alimentaire des populations ; l’existence de tabous alimentaires. En effet, la production animale est encore marquée par les pratiques traditionnelles d’élevage des espèces bovines, ovines, porcines, caprines et des volailles. De même, la production halieutique reste confrontée à diverses contraintes qui limitent sa performance. Quant à la production agricole vivrière, elle reste déficitaire. A cela s’ajoutent l’insuffisance des pratiques d’hygiène et d’assainissement dans les unités de production, les pratiques inadéquates de conservation des produits agricoles avec des risques d’intoxication et l’insuffisance d’informations et de connaissances sur les bonnes pratiques alimentaires.
Tous ces facteurs font qu’environ 98 % de la population adulte du Bénin présente le risque de contracter une maladie non transmissible (ministère de la Santé, Pnds 2018-2022). La surcharge pondérale (surpoids + obésité) est élevée (23,2 % en 2015) avec une prédominance féminine à 27,2 % à l’échelle nationale et un rebond de l’obésité morbide (indice de masse corporelle = 30) à 26,2 %, selon les données de l’Enquête nationale sur les maladies non transmissibles (Steps, 2015). Le diabète (hyperglycémie) est devenu inquiétant au vu de sa prévalence estimée à 12,4 % en 2015. Les mauvaises habitudes alimentaires caractérisées par une forte consommation de glucides, de matières grasses, de sel/sodium, de sucre et d’aliments sucrés y compris les sodas, la faible consommation de fruits et légumes et d’aliments riches en fibres et le manque d’activités physiques régulières, sont autant de facteurs de la surcharge pondérale constatée au sein de la population.