La Nation Bénin...
Formés aux maniements des armes sans perspective d'une carrière militaire et en proie au chômage depuis la fin de ladite formation, les appelés démobilisés du Service militaire d’intérêt national (Smin) dénoncent l’injustice dont ils sont victimes. A travers une marche suivie de sit-in au ministère du Travail, lundi 08 août à Cotonou, ils ont protesté contre cette situation avec le soutien de Paul Issè Iko, secrétaire général de la Confédération des syndicats des travailleurs du Bénin (Cstb).
Mine grise, visage serré, Eugénie Houndjo en tee-shirt et casquette rouge est déjà en sueur en cette matinée du lundi 8 août. Il est à peine 9h 15 minutes à la place de l’Etoile Rouge de Cotonou. Taille moyenne, la jeune dame venue de Bopa, a comme quelques centaines d’autres, répondu à l’appel du collectif des appelés démobilisés du Service militaire d’intérêt national. Enrôlée en 2007, par l’armée dans le cadre de ce service militaire, la promotion « Espoir », elle vit depuis la fin de sa formation dans un désespoir sans précédent. « Je veux avoir une nouvelle vie professionnelle », indique-t-elle la voix grave. « A quoi a servi le service militaire ? », s’interroge un autre à ses côtés qui répond avec dédain, « Rien. Si ce n’est pour nous avoir fait perdre du temps ». Le ton est donné. L’ambiance est chaude.
Les revendications
Les revendications du collectif portent sur la réinsertion sans condition et sans délai avec rappel de salaire des appelés démobilisés, le paiement des primes de démobilisation, le dédommagement sans délai des familles des victimes et l’audit de toutes les structures militaires et civiles ayant intervenu dans l’organisation du service militaire d’intérêt national. La seule escale non moins anodine du parcours, a eu lieu devant la rue menant vers la maison de l’ancien président Boni Yayi, à Cadjèhoun. Aux dires des manifestants, c’est le régime de celui-ci qui est coupable de leurs mésaventures quoi que l’Etat soit une continuité. Harangué par ses collègues, Claude Tossa, l’un des responsables du collectif menace avec véhémence : «Nous avons trop attendu. Si rien n’est fait, on va utiliser la violence pour exiger que justice soit faite. Nous n’avons plus peur. L’Etat nous écoute ou il met le pays en danger ». Ceux-ci avaient servi dans l’enseignement et l’administration. Là où le bât blesse davantage est la réinsertion de leurs camarades ayant servi dans la santé. Cela aggrave le sentiment d’abus auprès des marcheurs qui estiment par ailleurs que cette « injustice flagrante » a été orchestrée en sourdine par le régime défunt.
Pour justifier la légitimité de leurs actions, Moïse Otodji, un autre responsable du collectif, argumente : «Nous sommes en train de réclamer nos droits après avoir accompli notre devoir ». Dans cette atmosphère déjà suffoquée, les sons de vuvuzelas, de gongs et autres cris, ont conduit les marcheurs, épaulés par le secrétaire général de la Cstb, Paul Issè Eko, jusqu’au ministère du Travail, de la Fonction publique et des Affaires sociales, où ils ont fait un sit-in.
Réponse urgente
En l’absence du ministre Adidjatou Mathys, c’est son directeur de cabinet, David Vidéhouénou qui a reçu les manifestants. Il a promis une réponse urgente à leur «misère». Après avoir salué « l’appel à la justice, le don de soi et la patience » dont les marcheurs ont fait montre, il a évoqué les raisons de cet état de fait. « Votre situation n’est rien d’autre que les conséquences de l’improvisation, de l’imprévision car gouverner c’est prévoir », a-t-il affirmé. Il a ensuite invité les responsables du collectif à une réunion le jeudi prochain à 17h à son cabinet afin de trouver des « essais de solution » à la crise. Evoquant la gravité de la situation, Paul Issè Iko s’est adressé au chef de l’Etat, qu’il invite « à rétablir la justice du peuple ». « Il exige la compétence. Nous avons la compétence. La rupture est venue rompre avec l’injustice alors nous demandons que la justice règne désormais », a-t-il soutenu. « Je ne veux pas devenir un braqueur. Trouvez-moi un emploi », sont autant d’inscriptions sur leurs pancartes.?