La Nation Bénin...
Bruno Vikou, reporter d’images de l’Office de radiodiffusion et télévision du Bénin à la retraite, a rejoint le royaume des cieux, le mois dernier, laissant derrière lui des actes qui témoignent des principes et valeurs qu’il incarnait. Vendredi 21 avril dernier, à Cotonou, ses parents, anciens collègues et amis lui ont rendu un dernier hommage.
C’est un hommage bien mérité. Une succession de témoignages émouvants et inspirants qui illustrent la vie de feu Bruno Vikou sur terre. Il fut un agent modèle. Vendredi dernier, ses anciens collègues, parents et amis lui ont rendu un vibrant hommage, d’abord en se recueillant devant sa dépouille et en signant le livre de condoléances, puis en se rappelant quelques moments forts passés avec lui quand il était encore en activité.
Reporter d’images de l’Office de radiodiffusion et télévision du Bénin (Ortb) à la retraite, Bruno Vikou a, tout au long de son séjour sur terre, posé des actes qui sont restés gravés dans la mémoire collective. L’unanimité est faite sur son sens du travail, de disponibilité et de professionnalisme. Eloi Dansi, son ancien collègue avec qui il avait été missionné, aux côtés d’un autre, pour le démarrage des activités de la télévision nationale, ouvre le bal des témoignages. « Je me rappelle encore les instances révolutionnaires qu’on appelait organes locaux et pouvoir d’Etat. Quand moi j’étais dans le Nord, Bruno Vikou était dans le Mono et Justin Houndjo dans l’Ouémé. Lorsque nous nous retrouvions ensemble sur un même terrain, sachez que c’est le 1er août ou un match de football, un méga concert,… et quand nous finissions, nous nous faisions des accolades pour avoir bien fait le travail… », se rappelle Eloi Dansi.
A l’époque, Bruno Vikou était capable de couvrir à lui seul plusieurs reportages par jour sans se plaindre. Il était aussi capable de faire l’impossible pour ramener des images à sa base. L’un de ses anciens assistants informe que Bruno Vikou était revenu de Freetown avec le président Kérékou qui lui a tapoté l’épaule au salon d’honneur de l’aéroport de Cotonou, pour un acte de bravoure qu’il avait posé sur le terrain, à l’étranger. A l’époque, Bruno Vikou a défié deux rangs de l’armée sierra-léonaise lourdement armée, pour aller filmer le discours du Général Mathieu Kérékou en visite dans ce pays. Parmi les nombreux cadreurs à qui il avait été interdit l’accès au site, il était le seul à avoir désobéi aux militaires. La suite est que tous les autres cadreurs ont fait un rang devant lui pour copier les images qu’il a ramenées.
Rassembleur et défenseur des droits humains
L’illustre disparu est aussi un homme de justice, de paix, un défenseur des droits humains. Dans un café, lors d’une mission au Burkina Faso, lui et son assistant ont vu leur table renversée par un couple qui se battait. Ce jour-là, Bruno Vikou les a réconciliés. Le lendemain, un sergent des Forces armées burkinabè se met au garde-à-vous devant lui à l’hôtel où il séjournait avec son assistant. Surpris, ce dernier lui demanda qui est ce type en treillis. Il répondit qu’il s’agissait de l’homme qui s’était battu avec sa femme au café. C’est alors que l’assistant le surnomma ‘‘Mon Général’’. Un sobriquet devenu populaire à l’Ortb surtout pour le trio qu’il formait avec ses deux autres collègues.
David Ogouchina, un ancien collègue à lui témoigne, dans une correspondance qu’il a envoyée depuis Parakou, que Bruno Vikou avait aussi manifesté sa colère face à des militaires du temps de la révolution lors d’une opération contre les braconniers impénitents de Tawékpara (Karimama). La mission consistait à mettre la main sur ces présumés criminels et leur arsenal de travail. Mais la prise des militaires armés jusqu’aux dents, était ridicule au point où le chef de la troupe a ordonné à ses éléments de mater tous les hommes interpelés afin qu’ils révèlent les caches d’armes. La bastonnade était d’une rare violence. C’est alors que Bruno Vikou descendit sa caméra de l’épaule et cria : « ce sont quand même des humains après tout ! Vous ne pouvez pas les traiter de la sorte ». Le chef du contingent le regarda et lui lança : « occupe-toi de ta caméra ». Bruno Vikou refusa de continuer par filmer la scène. Pendant longtemps, la phrase « occupe-toi de ta caméra » est restée comme un mot de passe entre lui et ses collègues qui étaient présents à Tawékpara ce jour-là. Voilà quelques-uns des témoignages recueillis, qui illustrent la vie inspirante de Bruno Vikou sur terre.
L’illustre disparu était marié et père de quatre enfants. Ces derniers ont été invités à emboiter le pas à leur feu père. Emue par l’hommage rendu à leur fils, la famille adresse sa gratitude aux anciens collègues et amis du défunt et invite à l’union de prières afin que son âme repose en paix.
Bruno Vikou a été conduit à sa dernière demeure, samedi 22 avril dernier, au cimetière de Ouidah.