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Robert Dossou et Théodore Holo: Deux vies au service de l’Etat de droit

Droits et Devoirs

Après les mélanges en l’honneur de la première mandature présidée par Elisabeth Pognon et des deux suivantes présidées par Conceptia Ouinsou, la sixième mandature de la Cour constitutionnelle va honorer, le 14 mars prochain, les 4e et 5e mandatures de la Haute juridiction respectivement présidées par le bâtonnier Robert Dossou (2008-2013) et le Professeur Théodore Holo (2013-2018). Deux hommes qui ont marqué l’histoire politique du Bénin

Par   Anselme Pascal AGUEHOUNDE, le 19 avr. 2023 à 12h33 Durée 3 min.

Chaque année, la période allant du 19 au 28 février laisse un souvenir élogieux : celui de la Conférence des Forces vives de la Nation ; ces assises historiques que le Bénin a organisées avec brio et qui restent une référence en Afrique. Mais il est impossible de relater l’histoire démocratique du Bénin sans évoquer certains noms parmi lesquels Robert Dossou et Théodore Holo. Deux hommes aux parcours convergents.
Hommes de droit, tous deux se sont illustrés dans la pratique et l’enseignement des sciences juridiques. Ils ont formé plusieurs promotions qui aujourd’hui font leur fierté dans la discipline. Intellectuels de grande influence, tous deux ont activement participé aux travaux de la Conférence nationale et œuvré pour l’instauration de l’Etat de droit au Bénin. Hommes politiques, ces deux personnalités ont été ministres des Affaires étrangères sous le président Nicéphore Dieudonné Soglo; d’abord Théodore Holo puis Robert Dossou. En 2008, les deux hommes vont encore se retrouver au sein d’une même institution, la Cour constitutionnelle dont ils ont contribué à l’instauration à travers les travaux de la conférence nationale. Cette fois, c’est d’abord Robert Dossou qui assure la présidence avant de passer le témoin à Théodore Holo reconduit pour un second mandat en 2013. En retrait de la politique, les deux hommes restent des figures de proue dans l’histoire politique et constitutionnelle du Bénin.
La sixième mandature de la Cour constitutionnelle va d’ailleurs honorer les quatrième et cinquième mandatures de la Haute juridiction respectivement présidées par le bâtonnier Robert Dossou (2008-2013) et le Professeur Théodore Holo (2013-2018) à travers la remise de deux études le mardi 14 mars prochain à la salle Mgr Isidore de Souza au siège de la Cour. Il s’agit des études « Jurisprudence de la Cour constitutionnelle : la régulation » en l’honneur de la 4e mandature présidée par le bâtonnier Robert Dossou et des études « Jurisprudence de la Cour constitutionnelle : le citoyen » en l’honneur de la 5e mandature présidée par le Professeur Théodore Holo. « Ces deux personnalités ont en commun d’avoir été de hautes personnalités universitaires ; de hautes personnalités de la transition politique que le Bénin a connue pour passer au renouveau démocratique ; et deux membres de la commission qui a rédigé la Constitution béninoise», va reconnaitre Gilles Badet, secrétaire général de la Cour constitutionnelle, au micro de la télévision nationale.

Avocat dans l’âme

Dans l’Ordre national des avocats du Bénin, Me Robert Dossou est admiré non seulement parce qu’il a été bâtonnier et formateur de tant de jeunes avocats mais aussi pour sa grande culture et la qualité de ses interventions. Ecouter les plaidoiries de Me Robert Dossou est toujours enrichissant.
Ancien bâtonnier, ancien député, ancien ministre, doyen honoraire de la Faculté de droit de l’Université nationale du Bénin, Me Robert Dossou est un homme politique et un consultant international… Né en 1939 à Covè, Robert Dossou a fait ses études secondaires au Lycée Victor Ballot à Porto-Novo où il obtint un baccalauréat philosophique en juin 1959. A Paris, il fait une licence en droit public et passe le Certificat d’aptitude à la Profession d’avocat en 1965. En mars 1966, Robert Dossou obtient un Diplôme d’Études Supérieures de Droit public ; puis en mars 1968, un Diplôme d’Études Supérieures de Droit privé et un Diplôme d’Études Supérieures de Sciences Criminelles.
Intellectuel influent au Bénin, Robert Dossou joue un rôle déterminant dans la tenue de la Conférence nationale des Forces vives de la Nation. Il fut président du Comité national préparatoire de la Conférence nationale qui a travaillé de décembre à février 1990. A l’aube de l’ère démocratique, il est nommé ministre des Affaires étrangères (1993-1995) dans le gouvernement du président Nicéphore Dieudonné Soglo puis dans le gouvernement du président Mathieu Kérékou. De 2008 à 2013, Robert Dossou préside la quatrième mandature de la Cour constitutionnelle.
Entre autres publications qu’on lui connait : « Le Marxisme, le Droit et la Justice » ; « La Science Juridique exclut-elle la philosophie? » ; « La Démocratie et les Droits de l’Homme » ; «La responsabilité de l’Administration »; « L’Etat, le Pouvoir et l’Armée »; « La Perception Africaine de la notion de Sécurité»; « La dialectique Etat-Nation à la lumière de la pensée de Frantz Fanon»; «L’Expérience de la Conférence Nationale Béninoise» ; « Le Juge administratif et les droits économiques et sociaux au Bénin ». Robert
Dossou a reçu plusieurs distinctions parmi lesquelles : Commandeur des Palmes académiques (France) ; Ambassadeur de bonne volonté de l’Etat d’Arkansas-Usa…

La rigueur

Avec Théodore Holo, l’heure après l’heure n’est plus l’heure. C’est un homme d’une grande ponctualité. La mine souvent sérieuse, l’homme ne manque pas pour autant d’humour
subreptice.
Né le 15 avril 1948 à Porto-Novo dans une famille chrétienne originaire d’Abomey, Théodore Holo est un juriste de grande réputation, Professeur des universités et homme politique. Il fait ses études primaires à l'école catholique Saint-Joseph puis secondaires au Collège Notre-Dame de Lourdes et au lycée Béhanzin où il obtint un bac philosophique en 1968. La même année, il entame ses études de droit à Brazzaville et les poursuivra à Orléans puis à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne où il obtint en février 1979 son doctorat d’Etat en droit. Brillant, il est major ex aequo de sa promotion au Concours d'agrégation en droit et sciences politiques en 1985.
Jeune intellectuel de son époque, Théodore Holo s’est montré très actif dans l’organisation de la conférence nationale et dans la transition démocratique du Bénin. Il a d’abord été membre du présidium qui a dirigé les travaux de la Conférence nationale des Forces vives de la Nation, ensuite membre du Haut Conseil de la République (Hcr), organe législatif durant la transition ; puis membre de la commission constitutionnelle qui a rédigé la Constitution béninoise qui sera promulguée le 11 décembre 1990. Théodore Holo a été plusieurs fois ministre, président de la Haute cour de justice puis président de la cinquième mandature de la Cour constitutionnelle.
De 1991 à 1996 il fut successivement ministre des Affaires étrangères ; Garde des sceaux, ministre de la justice ; ministre chargé des relations avec les institutions et porte-parole du gouvernement du président Nicéphore Dieudonné Soglo. Après le retour du président Mathieu Kérékou au pouvoir, le partisan fidèle du Renouveau démocratique Théodore Holo se consacre à sa fonction d’enseignant à l’université. Il est nommé Titulaire de la Chaire Unesco des droits de la personne humaine et de la démocratie. Puis le 7 juin 2018, il est installé conseiller à la Cour constitutionnelle du Bénin. Lors de cette quatrième mandature présidée par Robert Dossou, le Professeur
Théodore Holo est élu le 25 juin 2009, président de la troisième mandature de la Haute Cour de justice du Bénin, composée de 13 membres dont six députés, six des sept membres de la Cour constitutionnelle à l’exception de son président, et le président de la Cour suprême. Il est réélu le 2 décembre 2011 pour un deuxième mandat au sein de cette institution. Reconduit par le bureau de l'Assemblée nationale pour un nouveau mandat à la Cour constitutionnelle,
Théodore Holo a été élu président le 10 juin 2013. Sa présidence est marquée par des décisions jugées hardies, fondées sur l’esprit et la lettre de la Constitution. Quelques-unes de ces décisions restent cependant critiquées. En juin 2018, il passera le témoin à Me Joseph Djogbénou. Et plusieurs Béninois regrettent le départ du dernier constitutionnaliste ayant pris part aux travaux de la Conférence nationale.
Plusieurs publications portent son nom, parmi lesquelles : «Le contrôle de la légalité et la protection des administrés au Bénin » ; « La décentralisation au Bénin : mythe ou réalité ? »; « Le régime semi-présidentiel : la double illusion ». Théodore Holo a reçu plusieurs distinctions. Commandeur de l’ordre national du Bénin en 1991, il est fait Grand officier de l’ordre national du Bénin en 1996. La même année, il est distingué Grand officier de l’ordre national du Mérite en France. En 2009, Théodore Holo est fait Grand-Croix de l’ordre national du Bénin…