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Commerce mondial: Entre stabilité et incertitudes pour 2025

Economie
Le commerce mondial face à ses défis Le commerce mondial face à ses défis

Le commerce mondial a connu une croissance record en 2024 mais à cause des tensions géopolitiques et politiques commerciales changeantes, les défis sont croissants. Au lieu de consolider leurs chaînes d’approvisionnement, les entreprises les diversifient et les gouvernements adoptent des mesures protectionnistes qui redessinent les flux commerciaux. Les déséquilibres commerciaux se creusent, avec un déficit accru pour les États-Unis et un excédent renforcé pour la Chine et l’Union européenne, influençant les échanges mondiaux. Le dernier Global Trade Update par Onu Commerce et Développement (Cnuced), basé sur des données jusqu’à début mars, signale cette évolution du paysage. 

Par   Catherine Fiankan-Bokonga, Correspondante accréditée auprès de l’Office des Nations Unies à Genève (Suisse), le 17 mars 2025 à 01h29 Durée 3 min.
#Commerce mondial

En 2024, sous l’impulsion des économies en développement et de la vigueur du commerce des services, le commerce mondial a connu une expansion record pour atteindre 33 000 milliards de dollars, soit une hausse de 3,7 % par rapport à 2023. Cependant, de nouveaux risques se profilent à l’horizon, notamment des déséquilibres commerciaux, des politiques en mutation et des tensions géopolitiques.

L’écart entre les économies en développement et les économies avancées se creuse. L’Asie et l’Amérique latine demeurent les principaux moteurs du commerce, mais la croissance s’est ralentie dans de nombreuses économies avancées. Si le commerce Sud-Sud se maintient, les échanges intra-africains se contractent, annulant ainsi les gains réalisés ces dernières années. Par ailleurs, le commerce entre l’Europe et l’Asie centrale a diminué, reflétant une évolution de la demande.

Les tendances à la délocalisation de proximité, comme le friendshoring et le nearshoring, se sont inversées en 2024. Les entreprises diversifient désormais leurs réseaux commerciaux dans plusieurs régions afin de réduire les risques, créant ainsi de nouvelles opportunités tout en augmentant la complexité des échanges. La dépendance commerciale évolue également. Alors que des pays comme la Russie, le Viêt Nam et l’Inde ont renforcé leurs liens avec des partenaires spécifiques, d’autres, comme l’Australie et l’Union européenne, réduisent leur dépendance aux marchés traditionnels. La diminution de la concentration des échanges suggère que les petites économies jouent un rôle croissant dans les dynamiques commerciales mondiales.

Redéfinition des flux commerciaux

Par ailleurs, les gouvernements intensifient l’utilisation des droits de douane, des subventions et des politiques industrielles, ce qui redéfinit les flux commerciaux internationaux. Les États-Unis, l’Union européenne et d’autres pays intègrent de plus en plus la sécurité économique et les objectifs climatiques dans leurs stratégies commerciales, tandis que la Chine recourt à des politiques de relance pour soutenir ses exportations. La montée du protectionnisme, qui favorise les industries nationales à travers des droits de douane ou des restrictions, suscite des mesures de rétorsion de la part des partenaires commerciaux et complexifie davantage le commerce mondial. Parallèlement, les politiques industrielles redessinent des secteurs clés tels que l’énergie propre, la technologie et les matières premières essentielles, ce qui risque de fausser la concurrence.

En 2024, les déséquilibres commerciaux mondiaux ont retrouvé les niveaux observés en 2022. Le déficit commercial des États-Unis s’est creusé, l’excédent de la Chine a augmenté, tandis que l’Union européenne est devenue excédentaire, notamment en raison de l’évolution des prix de l’énergie. Le déficit entre les États-Unis et la Chine s’est aggravé, tandis que l’excédent de l’Union européenne avec la Chine a augmenté. En parallèle, le déficit de l’Inde avec la Russie s’est accentué sous l’effet de l’évolution du commerce de l’énergie. Ces tendances pourraient donner lieu à de nouveaux droits de douane, à des restrictions commerciales ou à des réorientations d’investissements, ce qui ajouterait à l’incertitude économique.

Variation de la croissance selon le secteur

Alors que l’agroalimentaire, les technologies de la communication et les transports ont connu une expansion, l’énergie, l’habillement et les industries extractives ont ralenti, principalement en raison de l’affaiblissement de la demande et des changements de politique. Les tendances du transport maritime indiquent également un ralentissement, la baisse des indices de fret signalant un affaiblissement de l’activité industrielle, notamment dans les secteurs fortement dépendants des chaînes d’approvisionnement.

Alors que l’incertitude commerciale s’intensifie, la coopération mondiale et des politiques équilibrées restent essentielles, selon la Cnuced, pour maintenir la stabilité. Si les mesures de relance mises en place en Chine et la baisse de l’inflation dans certaines régions pourraient soutenir le commerce, le protectionnisme et l’évolution des politiques dans les grandes économies constituent encore des risques majeurs. Le défi pour 2025 consistera à éviter la fragmentation mondiale, où les nations formeraient des blocs commerciaux isolés, tout en gérant les changements de politique sans compromettre la croissance à long terme. Les décisions prises aujourd’hui par les gouvernements et les entreprises joueront un rôle clé dans la résilience du commerce mondial pour les années à venir.

Catherine Fiankan-Bokonga