La Nation Bénin...
La
hausse des taux d’intérêt, bien qu’indispensable pour contenir l’inflation,
pourrait fragiliser la stabilité financière, en particulier dans les systèmes
bancaires vulnérables.
La
gestion de l’inflation reste l’une des préoccupations majeures des banques
centrales, et une récente analyse du Fonds monétaire international (Fmi) sur le
sujet met en lumière les défis croissants posés par la hausse des taux
d’intérêt. Alors que plusieurs grandes économies mondiales font face à une
inflation galopante, les répercussions sur la rentabilité des banques et la
stabilité financière sont devenues une source d’inquiétude. En Afrique de
l’ouest, la Banque centrale des États de l’Afrique de l’ouest (Bceao) doit
naviguer entre deux impératifs : maintenir la maîtrise des prix tout en
préservant la stabilité du secteur bancaire. L’analyse du Fmi révèle que,
contrairement à une idée reçue, les systèmes bancaires, dans leur ensemble,
semblent plutôt protégés contre l’inflation. En effet, les variations de
l’inflation ont généralement un impact compensé sur les revenus et les dépenses
bancaires, les deux évoluant en réponse aux taux d’intérêt. Cependant, ce tableau
rassurant cache des vulnérabilités spécifiques, notamment dans certaines
banques exposées à des modèles de gestion des risques plus fragiles. Ces
établissements pourraient voir leurs pertes se multiplier en période de hausse
des taux, risquant ainsi de déclencher une instabilité plus large dans le
secteur financier. Avant la pandémie de la Covid-19, les préoccupations se
tournaient vers la faiblesse persistante des taux d’intérêt et de l’inflation,
perçue comme un frein à la rentabilité des banques. Cependant, la réouverture
post-Covid a révélé une autre facette de la problématique. Il s’agit de la
hausse de l’inflation et des taux d’intérêt des grandes banques centrales. Cela
a particulièrement affecté certaines banques vulnérables, comme la Silicon Valley
Bank, dont la faillite a secoué les marchés financiers au début de l’année
2023. Cette situation a alimenté les préoccupations selon lesquelles une hausse
des taux pourrait entraîner une instabilité généralisée.
L’équilibre
Les résultats des recherches menées par le Fmi soulignent que les banques centrales, dans leurs efforts pour maîtriser l’inflation, doivent intégrer la stabilité financière dans leurs stratégies. Le Fmi indique que certaines banques, bien que minoritaires, sont particulièrement vulnérables en raison de leur sensibilité aux variations de l’inflation et des taux d’intérêt. Des recherches ont révélé que 3 % des banques des pays avancés et 6 % de celles des pays émergents sont particulièrement exposées à ces risques. En Afrique de l’ouest, où l’indexation des prix est encore plus répandue, la vulnérabilité des banques pourrait être exacerbée, mettant en danger la stabilité financière régionale. En réponse à ces défis, la Bceao a adopté une approche plus prudente en réévaluant son cadre de politique monétaire. Dans un contexte de hausse des taux, elle a renforcé ses outils de régulation, en mettant l’accent sur la gestion des risques dans les établissements bancaires et la surveillance des expositions à l’inflation. La Bceao a également initié des réformes visant à renforcer la transparence dans le secteur bancaire et à encourager des pratiques plus solides en matière de gestion des risques. Des initiatives qui cadrent parfaitement avec les recommandations du Fmi qui trouve que le renforcement de la réglementation et du contrôle prudentiels, le relèvement du niveau obligatoire de gestion des risques dans les banques, l’amélioration de la transparence et le recours aux évaluations granulaires de risques contribueraient à endiguer systématiquement les expositions à l’inflation. Le Fmi estime que malgré ces améliorations, si les pertes subies par certaines banques laissent place à une contagion plus généralisée, les banques centrales devront peut-être trouver un équilibre entre hausse des taux pour enrayer l’inflation et possibilité d’instabilité financière. Il est clair que dans ce contexte économique complexe, la politique monétaire ne peut se permettre d’ignorer la dimension financière. La Bceao doit désormais jongler avec des ajustements monétaires nécessaires tout en protégeant les banques d’une contagion potentielle qui pourrait résulter de la concentration de pertes dans des institutions fragilisées par l’inflation. La stabilité financière ainsi que la rentabilité des banques, sont désormais au cœur des préoccupations de la politique économique régionale. Alors que la lutte contre l’inflation demeure primordiale, la Bceao doit veiller à ce que l’ajustement des taux n’entraîne pas des conséquences trop lourdes pour un secteur bancaire déjà confronté à une série de vulnérabilités. Le défi majeur consiste à trouver un juste équilibre entre la nécessité de freiner l’inflation et la protection du secteur financier, cruciale pour la stabilité économique de la région.