La croissance en Afrique subsaharienne a continué à ralentir au début de l’année en raison de divers problèmes propres à chaque pays et de l’aggravation des perturbations économiques extérieures. Selon les tendances récentes de la Banque mondiale, les reprises après les chocs économiques et climatiques antérieurs, déjà fragiles et incomplètes dans de nombreux pays, ont été freinées par la persistance d’une inflation élevée, un nouveau resserrement des conditions financières mondiales, un durcissement des politiques intérieures et une flambée de violences et de troubles sociaux dans certains pays. « L’inflation galopante a aggravé les difficultés économiques des pauvres et a fortement accru l’insécurité alimentaire », fait observer l’institution financière. Elle explique que l’Afrique subsaharienne a entamé cette année avec 35 millions de personnes supplémentaires en situation d’insécurité alimentaire aiguë par rapport au début de l’année 2022.
Selon les estimations, la croissance des trois plus grandes économies de l’Afrique subsaharienne- Afrique du Sud, Angola et Nigeria - est tombée à 2,8 % en 2022 et continuera à fléchir au premier semestre 2023. L’économie sud-africaine, pénalisée par de graves pannes d’électricité, a encore ralenti du fait d’une inflation persistante, d’un durcissement des politiques intérieures et d’un affaiblissement de la demande extérieure. En Angola et au Nigeria, les plus grands producteurs de pétrole de la région, la dynamique de croissance est au point mort en raison de la baisse des prix de l’énergie et de la stagnation de la production pétrolière. Le rebond post-pandémique du secteur non pétrolier du Nigeria a marqué le pas au début de l’année en raison d’une inflation toujours élevée, des pénuries de devises étrangères et du manque de billets de banque consécutif à la refonte des coupures de la monnaie nationale.
Risques de surendettement
Selon la Banque mondiale, la croissance de l’Afrique subsaharienne devrait encore reculer à 3,2 % en 2023 avant de remonter à 3,9 % en 2024. L’Afrique du Sud devrait voir sa croissance baisser à 0,3 % cette année, les pannes d’électricité généralisées pesant lourdement sur l’activité et contribuant à la persistance de l’inflation. Celle du Nigéria restera sans doute à peine supérieure à la croissance démographique, ce qui est bien trop lent pour faire des progrès significatifs dans l’atténuation de l’extrême pauvreté. La dégradation des perspectives s’étend en outre au-delà des principales économies régionales, car le coût élevé de la vie limite la consommation privée et le durcissement des politiques empêche la reprise de l’investissement dans de nombreux pays. Plus généralement, l’aggravation des vulnérabilités nationales, le resserrement des conditions financières mondiales et la faiblesse de la croissance mondiale devraient freiner la reprise. Le revenu par habitant en Afrique subsaharienne devrait progresser de moins de 1 % par an en moyenne en 2023-2024 : dans plus d’un cinquième des économies de la région, dont les trois plus importantes, la hausse moyenne du revenu par habitant sur la période ne devrait pas dépasser 0,5 % et l’évolution sera négative dans plus d’un dixième des pays. Ainsi, les perspectives de réduction de la pauvreté restent sombres, avec près de 40 % de la population d’Afrique subsaharienne vivant dans des pays où le revenu par habitant sera plus faible l’année prochaine qu’en 2019. Si les pressions inflationnistes devaient perdurer plus longtemps que prévu ou si les tensions dans le secteur bancaire des économies avancées s’étendaient au système financier mondial, les conditions financières de l’Afrique subsaharienne pourraient se détériorer encore plus, renseignent les perspectives de la Banque mondiale. Cela entraînerait de nouvelles dépréciations monétaires et de nouvelles sorties de capitaux, et accroîtrait les risques de surendettement.