La Nation Bénin...
Là
où les matériaux conventionnels de construction présentent des défis, le sable
argileux encore appelé la terre de barre se révèle une opportunité sous
exploitée. Si les pays en voie de développement veulent accélérer le
développement des infrastructures, il est important pour eux de standardiser
les matériaux de construction localement disponibles, notamment la terre de
barre au Bénin. C’est ce à quoi ont exhorté les experts animateurs de la 2e
édition des Sdp Talks, vendredi 19 avril dernier, à Cotonou.
Le
matériau de construction terre de barre (sable argileux) que l’on retrouve
abondamment dans le Sud du Bénin est valablement utilisable dans la
construction des bâtiments et infrastructures de transport routier. Face à la
raréfaction et la cherté des matériaux conventionnels, la terre de barre est
l’alternative pour le Bénin afin d’atteindre assez rapidement ses objectifs en
matière de développement des infrastructures et d’adaptation aux changements
climatiques.
Les
potentialités de ce matériau durable ont été dévoilées aux acteurs du secteur
des Btp, vendredi dernier, lors de la deuxième édition des Sdp Talks, afin
d’encourager l’utilisation innovante du sable argileux pour des infrastructures
modernes, économiquement adaptées et climatiquement résilientes.
«
Aujourd’hui, l’utilisation de la terre de barre est une préoccupation majeure
dans notre pays et dans la plupart des pays en voie de développement parce que
dans le secteur de la construction, plus de 40 % du coût de la construction est
lié aux matériaux utilisés… », explique Georges Alé, président directeur
général de la Société de développement des projets (Sdp), structure
organisatrice des Sdp Talks.
Dans
sa communication, professeur Mohamed
Gibigaye, enseignant-chercheur, docteur en mécanique des solides,
ingénieur-concepteur à l’Université d’Abomey-Calavi, a présenté le matériau, le
contexte de la construction au Bénin, l’application innovante et les avantages
et challenges liés à l’utilisation du matériau. Il boucle sa présentation par
des recommandations et quelques exemples de construction contemporaines à base
de la terre de barre, au Bénin et dans la sous-région.
Un matériau durable
Professeur Mohamed Gibigaye renseigne que la terre de barre est mieux que les matériaux conventionnels utilisés dans la construction. Il illustre ses propos par des travaux scientifiques majeurs qui mettent en évidence l’utilisation innovante du matériau. « Regardez depuis quand le royaume d’Abomey est là en place, regardez toutes les constructions faites essentiellement en matériaux localement disponibles dont la terre de barre. Ce sont des ouvrages qui ont tenu 50, 100, 200, 300 ans. Alors pourquoi se gêne-t-on encore? La solution n’est pas ailleurs ! C’est à cause des publicités, du marketing, qu’on nous oblige à utiliser les matériaux standards », déplore-t-il, ajoutant que par le passé, les matériaux dits standards ne l’étaient pas. «Ils ont été standardisés et c’est ce que nous devons également faire pour la terre de barre afin que la construction reste durable, économique et viable », souligne-t-il, appelant aussi à un changement de mentalité de la part de tous.
Au
sein de l’assistance, la thématique a suscité d’importants commentaires,
contributions et analyses sur divers aspects du sujet. Somme toute,
architectes, urbanistes, ingénieurs et autres acteurs ont tous reconnu les
potentialités de la terre de barre. « On a vu qu’on pouvait s’en servir de
façon intensive dans le bâtiment, sur les infrastructures de transport, etc.
Cela appelle in fine à la prise de responsabilité au niveau des acteurs, à
commencer par nos gouvernants, un peu plus de courage pour oser et imposer
d’une certaine manière l’utilisation de matériaux locaux pour que cela ne soit
pas une utilisation éphémère… Les entreprises et les bureaux ont aussi leurs
responsabilités, c’est ce que nous essayons de faire : mettre tous ces acteurs
ensemble, définir des pistes d’amélioration possibles», a indiqué Georges Alé.
Pour
sa part, l’Etat béninois assure que des mesures sont prises et d’autres sont en
cours afin de permettre au pays de tirer le maximum de profit de la terre de
barre.
Tout
comme la première, cette deuxième édition des Sdp Talks a été une réussite et
le responsable de la structure promet de continuer, lors des prochains talks,
par mettre sur la table des sujets aussi importants et d’actualité dans le
secteur des Btp. « Les thématiques sont énormes. On a parlé de l’habitat et de
l’urbanisme, on a parlé des matériaux locaux, il y a le sujet du financement du
secteur des infrastructures, le sujet de l’environnement notamment la pollution
générée par nos travaux, il y a le sujet de l’éthique dans le secteur de la
construction, il y a le sujet de la planification. L’objectif premier de toute
planification est le transfert de compétences, la densification des tissus
locaux. Toute politique doit mener à cela et au niveau de Sdp, nous allons y
contribuer humblement », assure Georges Alé.