La Nation Bénin...
Journaliste rigoureux, formateur passionné et figure
respectée de la presse béninoise, Philippe Hado s’en est allé, laissant
derrière lui une empreinte indélébile. À l’occasion d’une cérémonie émouvante
d'hommage, ce mercredi 23 juillet au siège du quotidien de service public La
Nation, anciens collègues, confrères et autres personnalités ont retracé le
parcours d’un homme pour qui le journalisme était plus qu’un métier : une
vocation.
Devant un parterre d’invités, de proches et de
professionnels des médias, l’émotion était palpable. Tous étaient venus, ce
mercredi, saluer la mémoire de Philippe Hado. Né en 1957 à Lalo, dans le Mono,
marié et père de deux enfants, ce diplômé du centre d’études des sciences et
techniques de l’information (Cesti) a marqué de son empreinte plusieurs
rédactions et contribué à former des générations de journalistes.
Pour Paul Amoussou, directeur de publication du journal
La Nation, Philippe Hado était un homme de rigueur, quelque peu sous la retenue
mais qui ne manquait jamais de dire ce qu’il pensait. Il ajoute avec émotion
que la salle qui a été retenue pour lui rendre hommage n’est pas choisie par
hasard, car il y a longtemps partagé son savoir. Et de conclure, comme un
ultime adieu : « Doyen, va en paix et laisse-nous de cette rigueur qui t’a
toujours caractérisé».
Le parcours
Dès décembre 1980, Philippe Hado rejoint l’Onépi et enchaîne ensuite de nombreuses fonctions au sein de publications telles qu’Ehuzu/La Nation, Le Forum de la Semaine, Tam-Tam Express, Courrier de l’Éducation et Le Temps de l’Économie. Il a aussi collaboré comme correspondant pour Afrique Nouvelle, Vivre Autrement et Le Journal du Soir. Partout où il passe, il se distingue par sa rigueur, sa discrétion et son attachement profond au métier.
Le formateur de plusieurs générations
Si Philippe Hado a marqué ses collègues, il a également
façonné toute une génération de journalistes. Zakiath Latoundji, représentante
des organisations faîtières de la presse, rappelle que certains ont eu la
promotion de leur carrière grâce à l’intervention du regretté. «
Homme-orchestre, Philippe Hado en était un. C’est un homme assidu, de discipline,
de rigueur professionnelle, passionné et un amoureux du travail bien fait »,
a-t-elle témoigné en précisant que l’homme était tout simplement un
professionnel mais un professionnel accompli, un humaniste et un altruiste.
«Parfois incompris, on se rend compte plus tard que c’est lui qui avait raison
», a-t-elle déclaré.
Aline Assankpon, ancienne stagiaire à la Cellule
informatique de La Nation, se souvient avec reconnaissance de l’homme qui l’a
formée à ses débuts. Elle raconte comment, alors rédacteur en chef au quotidien
La Nation, il avait convaincu la Fondation Friedrich-Naumann de soutenir la
formation de jeunes diplômés, alors même qu’il n’existait aucune école de
journalisme au Bénin. Cette formation, souligne-t-elle, a été un véritable
tremplin. « Cette transition m’a permis de faire mon entrée à la rédaction »,
lâche-t-elle. Plus tard, elle retrouve Philippe Hado au magazine panafricain
Continental d’Afrique en Marche, où il devint secrétaire de rédaction. Elle
évoque une ambiance de travail rare, « très détendue et conviviale, sans
véritable hiérarchie apparente», et surtout un mentor toujours prêt à relire,
corriger et conseiller. «Philippe a toujours eu de la disponibilité pour relire
nos articles, même ceux destinés à d’autres rédactions», poursuit-elle. Elle
garde aussi le souvenir d’un homme d’une grande générosité, qui se rendait
disponible pour prêter volontiers ses services et prodiguer des conseils, y
compris sur le plan personnel. « Unique en son genre, il avait la connaissance
et n’hésitait pas à la partager », a-t-elle confié.
Plus qu’un mentor, Philippe Hado a été pour certains une figure quasi paternelle. Gaston Zossou, ancien ministre de la Communication sous le président Mathieu Kérékou, témoigne: «C’est mon maître qui est mort. Pas moins que ça », dit-il. Il remonte jusqu’à leur rencontre au lycée Béhanzin, dans les années 1970 : « J’avais 17 ans, et lui m’a tendu la main », a-t-il précisé en ajoutant que ce geste, apparemment simple, a changé sa trajectoire. « Il m’a donné du travail, m’a appris à appliquer les règles grammaticales. Si j’ai eu quelques reliefs dans la société, je les dois à plus de 80 % à cet homme », a-t-il indiqué. Il confesse même que certains personnages de ses romans portent le nom choisi par Hado, preuve de l’influence profonde qu’il a exercée sur lui. Malgré la vie qui les a parfois éloignés, Gaston Zossou retient surtout la dignité et l’intégrité de son mentor, même face aux défis et aux épreuves. « Les grandes personnes ne sont pas celles qu’on voit, ce sont celles qui agissent dans l’ombre et façonnent le monde », dit-il.
Des collègues marqués
Edgard Couao-Zotti, porte-parole des anciens collègues de
La Nation, rappelle, quant à lui, les combats quotidiens de Philippe Hado pour
maintenir à flot le journal. « Quand le quotidien a commencé par vaciller, il
n’a pas lâché prise », a-t-il rappelé. Homme discret, précise-t-il, Hado ne
cherchait ni la lumière ni les honneurs. « Il ne parlait pas beaucoup, il
n’avait pas le sourire facile, mais son sourire, c’était le travail bien fait
», a-t-il martelé. Edgard Couao-Zotti évoque aussi la maladie, discrète
compagne des dernières années, et le départ brutal qui laisse derrière lui une
épouse et deux filles, orphelines d’un mari et d’un père attentif. Tout au long de sa carrière, Philippe Hado a
incarné une vision du journalisme exigeante, faite d’intégrité et de sérieux.
Au-delà des diplômes et titres, Philippe Hado laisse un héritage plus précieux encore. Celui d’un homme qui a su transmettre sa passion et ses valeurs. Les témoignages concordent : il a formé, conseillé et soutenu sans jamais chercher la lumière. Dans l’ombre, il a façonné des carrières et inspiré des générations. Alors que la presse béninoise lui rend un dernier hommage, ses collègues, élèves et amis retiennent de lui cette rigueur, cette humilité et cet amour du métier. Philippe Hado s’en va, mais laisse derrière lui des plumes qu’il a contribué à aiguiser et des consciences qu’il a éveillées.
Parents, amis, confrères, l'importance de la mobilisation pour rendre hommage à Philippe Hado témoigne éloquemment de la qualité de l'homme qu'il était