La Nation Bénin...
La
mini-vidéo de rythme Goumbé exécuté par une section musicale de l’Armée
béninoise a abondamment circulé sur les réseaux sociaux, ces jours-ci. Elle a
suscité visiblement un regain d’intérêt pour ce rythme typiquement du
département des Collines. Identité culturelle des Idaatcha, ce rythme musical,
bien que très emballant, ne parvient pas à s’imposer hors des Collines.
Le
rythme Goumbé est très dansant mais ne parvient pas à s’imposer ailleurs, au
sein des autres communautés. Comme beaucoup de rythmes traditionnels de chez
nous, il est exécuté à partir des tam-tams, des castagnettes et autres gongs.
Dans la plupart des cas, ces instruments musicaux, notamment les tambours, sont
manipulés à la main. Mais le "Goumbé" y fait exception. Si les autres
instruments tels que les gongs et les castagnettes sont maniés à la main, les
tam-tams "Omonglé" et "Akatcha" ou les tambours en forme
carrée se jouent avec le talon et les deux mains. Une particularité du
"Goumbé".
«
Le Goumbé est une percussion exclusive du peuple Idaatcha de Dassa-Zoumè »,
reconnait l’artiste Kio Ayédjo dit
"Alayo". Il explique que le son "Goum" est produit
par le talon et les mains produisent le son "b-é" d’où le nom
"Goumbé" attribué à ce rythme.
Les chansons sont composées pour la plupart dans la langue Idaatcha. Ce rythme qui est l’un des éléments
constitutifs de la sève nourricière de la communauté Idaatcha encastrée dans
les collines de Dassa-Zoumè a bien une origine. En se référant à l’histoire,
Kio Ayédjo retrace les pans du "Goumbé". En effet, selon ses
explications, ce rythme est une création
du peuple Idaatcha. Installé à Dassa-Zoumè suite aux mouvements migratoires, ce
peuple n’avait pas voulu adopter les anciens rythmes de son pays d’origine, le
Nigeria.
Goumbé, l’identifiant de l’Idaatcha
Ainsi, il a dû inventer un nouveau rythme dont l’appellation "Goumbé" provient du son que produisent les instruments à percussion. Resté à l’étape embryonnaire durant des décennies, le "Goumbé" a reçu la touche particulière d’Oliworo, l’artiste émérite des Collines. Sorti donc des sentiers battus, le rythme "Goumbé" a été enregistré comme musique pour la toute première fois sur un support magnétique dans le but de permettre aux mélomanes de savourer cette richesse culturelle de l’aire Tchabè. C’était vers les années 80. Devenu alors un rythme de réjouissances populaires, le "Goumbé", sans aucun mythe, est autorisé à animer les cérémonies de baptême, de sortie d’enfant, les funérailles et autres.
Après
1988, suite au décès d’Oliworo, le dépositaire incontournable de
"Goumbé", ce rythme, qui autrefois faisait la fierté du peuple
Idaatcha, a connu un déclin parce que la relève n’était pas bien assurée,
souligne André Kio Ayédjo qui précise que les jeunes à cette époque
s’intéressaient très peu à la musique. «
Les quelques artistes qui s’essayaient à la chose n’avaient pas la même
vocation que leur aîné Oliworo. En plus, ils ne disposaient pas de moyens
puisque produire un chef-d’œuvre à l’époque n’était pas une mince affaire » se
souvient-il. Pour alors redorer le blason du rythme "Goumbé", Aline
D., l’une des filles de Oliworo, elle aussi artiste, a bien voulu sauvegarder
les efforts de son feu père. Depuis quelque temps, elle a initié un festival
sur le "Goumbé", une rencontre biennale qui lui a permis de
constituer un répertoire d’artistes s’inscrivant dans ce rythme exclusif des Collines.
A partir de ce répertoire, elle ambitionne de faire la promotion de ce rythme à
travers la formation et son assistance aux artistes du milieu.
Il
faut reconnaitre que, quel que soit l’endroit où il est joué, ce rythme
mobilise du monde et ne laisse personne indifférent. Même ceux qui ne
comprennent pas la langue, ni le message
véhiculé par les chansons esquissent des
pas de danse. Alors, ne parlons pas de la communauté Idaatcha. C’est magique !
A l’intonation des tambours, l’Idaatcha est comme hypnotisé par le rythme
Goumbé. C’est plus qu’un appel des origines. Il a besoin d’être davantage
popularisé loin des Collines pour y être adopté.