La Nation Bénin...
La
culture de champignons est en expérimentation dans la ville de Natitingou,
grâce à une technique développée par Tatanty Victor Gnagna qui s’y emploie
depuis 2008. Son expérience fait école auprès de jeunes entrepreneurs. Mais par
défaut de moyens, ils hésitent à s’engager dans le cercle restreint des
producteurs de champignons très prisés pour leurs valeurs nutritives.
La
culture de champignons est en expérimentation à Natitingou, dans un centre
situé au quartier Tchirimina. Un vrai incubateur de production de champignons
cultivés dans les champignonnières, une case ronde réalisée en paille pour
maintenir la température froide. Dans ce centre, l’on découvre en plus des
champignonnières, la semencière, le laboratoire, l’atelier de travail… Tatanty
Victor Gnagna tient son centre depuis 2008, pour non seulement y produire de la
semence, mais aussi des champignons. Décrivant le processus, il informe qu’il y
a une variété de semences produite en milieu de culture.
« La variété de semences que nous utilisons est produite en milieu de culture. On cultive une partie saine du champignon qui va en fait libérer son mycélium qu’on peut après inoculer sur du riz Paddy ou sur le sorgho stérilisé », indique Tatanty Victor Gnagna. Au bout de trois semaines, le cycle de production du champignon commence. Il souligne que si l’on veut faire la production en milieu de culture ou le piquer sur le riz Paddy ou le sorgho, il faut deux à trois mois pour avoir une semence de champignon. « Cette semence, un producteur peut l’utiliser et avoir des champignons », a rassuré Victor Gnagna. Il découvre sa passion dans la culture de la semence et des champignons et utilise comme substrat de fructification beaucoup plus la paille du riz qu’on retrouve en abondance autour de Natitingou notamment à Péporyakou.
Une champignonnière pour la culture des champignons
Dispositifs
adéquats
Comme
toute production l’exige, la culture des champignons nécessite aussi des
infrastructures. Il faut disposer d’une champignonnière qui est une case ronde
en paille, d’une marmite numéro 40 pour y stériliser la paille du riz. Disposer
d’un foyer, d’une table de lardage, d’une bâche, d’une fourche pour enlever la
paille, d’un égouttoir pour égoutter la paille et en plus des sachets pour
faire le lardage, c’est-à-dire y mettre les semences et les attacher, est
important.
Victor
Gnagna conseille un peu de scotch aussi pendant la période de production, parce
qu’il peut arriver que le sachet soit percé, après plusieurs séances
d’arrosage, selon ses explications. « Si vous avez du matériel, deux à trois
semaines, les champignons commencent à pousser. Quand ça commence à pousser,
vous pouvez faire la récolte pendant un à deux mois avant que le substrat ou la
paille de riz utilisé ne soit usé et on peut renouveler le cycle », a-t-il
détaillé.
Il
a démarré cette aventure en 2008 tout timidement. À l’époque, il allait
s’approvisionner en semences à l’Université d’Abomey-Calavi auprès du
laboratoire de recherche du docteur Jean Claude Codjia. Quelques difficultés,
entre-temps, l’ont obligé à avoir recours au Togo et au Ghana. Les difficultés
ont persisté et il a décidé de se faire former dans la culture des semences en
achetant le matériel adéquat pour pouvoir produire. Bien qu’archaïque, il
parvient à produire la semence. « En période d’harmattan, c’est plus facile de
produire les semences, parce que ça colonise bien et s’incube convenablement.
Mais en période de chaleur, à partir de janvier jusqu’en juin, c’est difficile
de produire les semences à cause de la température qui augmente », se désole-t-il.
L’utilisation
d’une climatisation pour refroidir la semencière en période de forte chaleur
revient très coûteux. Il est donc contraint d’arrêter momentanément, selon ses
explications. L’autre difficulté qu’il évoque, c’est le peu de producteurs qui
s’intéressent à l’activité. S’il y en a un grand nombre, estime-t-il, leurs
commandes pourraient permettre, selon les quantités, de pouvoir atteindre le
seuil de rentabilité pour continuer la production. « Voici les difficultés,
mais nous avons foi en cette culture. Si vous avez sept champignonnières, vous
pouvez faire des recettes jusqu’à 500 000 francs le mois. C’est une filière
d’avenir, et elle ne nécessite pas grand travail à part les jours de production
et vous avez deux mois de récolte », fait-il savoir.
Promouvoir
la filière
Des
jeunes sont intéressés par l’activité et se font former. Après leur formation,
ils éprouvent des difficultés à réaliser une champignonnière et acquérir le
matériel. Il urge que les autorités voient comment accompagner les acteurs pour
bien organiser la filière. « Je pense que si nous arrivons à les accompagner à
réaliser les unités de production, cela va les aider à se lancer véritablement
dans la culture de champignons. Il y a un avenir parce que le marché
d’écoulement n’est pas un problème. Il y a les gros consommateurs comme les
restaurants, les supermarchés qui achètent de grandes quantités de même que
beaucoup de ménages habitués à consommer le champignon », détaille V. Gnagna.
Un entrepreneur qui s’installe à proximité des grandes villes peut quotidiennement
convoyer ses champignons pour les commercialiser, dit-il. L’on peut conserver
le champignon en le séchant au soleil, selon lui.
Après
ces années d’expériences, Victor G. note que le champignon est méconnu du grand
public au point où les acteurs sont parfois écartés des appels à projets. Ce
qui le motive davantage à faire connaître la filière pour y drainer beaucoup
d’acteurs et produire assez de champignons.
« Nous
faisons l’effort de former beaucoup de personnes dans la filière grâce à
certaines Ong et des partenaires internationaux qui s’investissent pour la
promotion de la culture. Si les bénéficiaires de nos formations se lancent dans
l’activité, cela créera une chaîne de producteurs. Ce qui va permettre de faire
grandir la filière. Mon souhait est que les autorités s’intéressent à ce que
nous faisons, à la culture du champignon et décident un jour d’en faire une
filière », a-t-il suggéré. Le travail de reconnaissance peut conduire à en
faire une activité pour tous afin que toute la population prenne goût aux
champignons qui constituent une solution aux problèmes de santé. La
consommation du champignon permet de lutter contre la malnutrition chez les
enfants. Le champignon est très riche en minéraux et sa consommation permet de
combattre beaucoup de maladies telles que le diabète, la tension, le cancer,
parce qu’il contient des antioxydants très puissants. Au regard de ces
éléments, il appelle à soutenir et à accompagner les acteurs pour relever les
défis de cette culture qui nécessite des moyens considérables.
Victor
Gnagna informe que d’autres producteurs y travaillent dans la zone de
Porto-Novo et à Abomey-Calavi. Mais tous sont confrontés aux mêmes difficultés:
problèmes d’incubation des semences, d’approvisionnement en semences… Un
producteur de champignons doit avoir une source d’approvisionnement en semences
à proximité de lui. Pour la promotion de cette culture, beaucoup de chercheurs
mènent des études au Bénin depuis les années 2000. Au nombre des pionniers, on
peut citer le professeur Jean-Claude Codjia et bien d’autres chercheurs de
l’Université de Parakou. Des Organisations non gouvernementales forment, par le
biais de ces enseignants-chercheurs, des hommes et femmes et investissent pour
promouvoir cette culture.