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24e journée de l’affaire Icc-Services: Les victimes défilent à la barre et réclament leurs sous

Société
Par   Thibaud C. NAGNONHOU, A/R Ouémé-Plateau, le 25 janv. 2019 à 08h29

Le procès criminel de l’affaire des structures illégales de collecte d’épargne et de placement d’argent dite Icc-Services a amorcé une étape cruciale, ce jeudi, avec l’audition des victimes qui défilent à la barre et exigent des accusés le payement de leur argent.

Le procès de l’affaire dite Icc- Services évolue lentement mais sûrement à la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet) à Porto-Novo.
En effet, après l’audition des accusés, des témoins et des sachants depuis le démarrage de l’audience criminelle, le 17 décembre 2018, la cour de céans a entamé, ce jeudi 24 janvier, la déposition des victimes. Celles-ci étaient une quinzaine à se lever quand le président de la cour de céans, Edouard Cyriaque Dossa, a voulu savoir s’il y avait dans la salle d’audience des victimes de la structure de collecte d’épargne et de placement d’argent Icc- Services. Elles se sont aussitôt alignées avec à leur tête Hermann Mèton, par ailleurs président de leur collectif. Lequel collectif est défendu dans ce procès par trois avocats, en l’occurrence Mes Gustave Anani Kassa ; Alain Orounla et Agathe Affougnon-Ago.
Deux victimes ont été écoutées en l’occurrence Paulette Olowolagba, commerçante au marché Dantokpa et Hermann Mèton, opérateur économique. Ils ont respectivement déposé 2,100 millions F Cfa et 750 mille F Cfa. Hermann Mèton par qui la cour a ouvert le bal, a déclaré à la barre avoir déposé ses sous à l’agence Icc-Services de Dédokpo, dans le troisième arrondissement de Cotonou. Il a fait le dépôt par deux fois. Il a remis une somme de 150 mille en septembre 2009 qui a généré un intérêt de 60 mille F Cfa qu’il a retiré au bout de trois mois, soit en décembre 2009. Ce retrait l’a incité à souscrire, le 7 janvier 2010, un contrat de 600 mille F Cfa en dehors des 150 mille déposés. Il allait retirer, trois mois après, l’intérêt que devrait générer ce dépôt quand il a constaté que l’agence était bondée de monde. Il a vu des clients qui tempêtaient parce que les payements posaient problèmes. Il n’a pas pu être payé jusqu’à ce jour. Hermann Mèton dit avoir perdu dans cette crise la somme de 690 mille F Cfa s’il devrait retrancher les 60 mille F Cfa d’intérêt qu’il a perçus. Il a apporté à la cour toutes les preuves de ces dépôts, notamment le carnet d’épargne des 150 mille et le contrat pour les 600 mille F Cfa. Les documents ont été reconnus et attestés par l’accusé Pamphile Ludovic Dohou, directeur général d’Icc-Services, cosignataire d’ailleurs des carnets et contrats. A la question de la cour de savoir ce qui l’a motivé à aller déposer ses fonds à Icc-Services, Hermann Mèton n’est pas allé par quatre chemins pour y répondre. Il a expliqué que c’est la fréquence des œuvres sociales des promoteurs de cette structure à l’endroit des couches démunies et la proximité de ces derniers avec les autorités au sommet de l’Etat qui l’ont surtout convaincu qu’Icc-Services devrait être une structure sérieuse.

Où est passée l’Ong Jas ?

Mieux, la plupart des dirigeants d'alors du pays étaient des docteurs en Economie et en Banque. Ceux-ci ne pouvaient pas laisser les promoteurs faire, de 2007 à 2010, si l’activité n’était pas licite. Hermann Mèton dit avoir eu la plus grande certitude le jour où il a vu l’ancien président de la République, Boni Yayi, recevoir en audience au palais de la présidence, les promoteurs d’Icc-Services. Avec son niveau d'études de la classe de Première, il ne pouvait pas douter un seul instant de la légalité de l’activité de collecte d’épargne et de placement de fonds que menait Icc-Services sur l’ensemble du territoire national. Pour lui, le silence du régime d’alors valait approbation. «Vous avez subi quel préjudice ?», demande le président de la cour de céans, Edouard Cyriaque Dossa, à Hermann Mèton. Celui-ci situe le préjudice financier à deux niveaux. Il y a d’abord les montants nominaux déposés à savoir 150 mille et 600 mille F Cfa. Il y a, ensuite, le montant que devraient générer ces fonds conformément aux clauses de l’accord qui lie Icc-Services à lui. Hermann Mèton semble ne pas trop vouloir tirer sur la ficelle en matière de réparation de préjudice subi. Il dit se plier à la décision que prendra la cour par rapport aux intérêts civils. Justement à ce sujet, un passage du contrat a surtout retenu l’attention de la cour de céans. Il a été écrit en effet que l’Ong Jas qui se définirait tel « Jeunesse action solidarité », avec qui Icc-Services serait en partenariat, garantit un taux de 1,2% à ses clients en cas de défaillance. La cour a voulu comprendre l’existence de l'Ong Jas et sa responsabilité dans la cause en examen. Edouard Cyriaque Dossa appelle à la barre le directeur général d’Icc-Services, Pamphile Ludovic Dohou, pour des questions d’éclaircissements au sujet des activités de cette Ong dont le nom n’est jamais sorti depuis l’enquête préliminaire jusqu’à la barre hier en passant par le magistrat instructeur. Très sérieux sur son objectif, le président isole le président directeur général d’Icc-Services, Guy Akpoglan, et le directeur départemental d’Icc-Services de l’Ouémé-Plateau, Emile Tégbénou dans deux salles distinctes pour éviter une certaine connexion entre eux sur la question. Pamphile Ludovic Dohou a été écouté le premier, ensuite, Guy Akplogan et en dernière position Emile Tégbénou. Mais, il a été remarqué que les deux derniers étaient beaucoup plus dans l’économie de la présence de l’Ong Jas dans l’organisation d’Icc-Services contrairement à Pamphile Ludovic Dohou. Celui-ci situait l’Ong en France. Les auditions de Guy Akplogan et d’Emile Tégbénou ont permis de savoir que l’Ong était plutôt à Cotonou. Selon le Pdg d’Icc-Services, l’Ong Jas est une structure de son jeune frère Jean-Marc Akplogan qui ne vit plus aujourd’hui. Icc-Services avait un contrat avec l’Ong et en vertu duquel elle devrait réparer les préjudices en cas de sinistre. Une sorte de police d’assurance qui ne dit pas son nom. A ce titre, l’Ong Jas percevait un taux de 5% sur les intérêts générés par chaque contrat. Lequel taux devrait lui permettre de supporter normalement en cas de survenance de sinistre qui mettrait Icc-Services en cessation de payement. L’Ong Jas, malheureusement, n’a rien pu, pour soulager la peine des clients depuis l’éclatement de la crise jusqu’à la mort de Jean-Marc Akplogan qui était également l’un des membres influents d’Icc-Services.