La Nation Bénin...

Les femmes béninoises continuent d’être victimes du non-respect de leur droit à la propriété foncière. Cela persiste à cause de l’ignorance des lois régissant le foncier par les différents acteurs, et par défaut de mise en œuvre effective des principes d’égalité d’accès à la propriété foncière entre les deux sexes.
L’accès des femmes à la terre demeure encore un vœu pieux au Bénin. Le phénomène prend des proportions inquiétantes dans les milieux ruraux où l’égalité homme-femme aux droits fonciers est encore très mal perçue.
Selon la coordonnatrice du Réseau, femme, droit et développement en Afrique (Wildaf), Huguette Bokpè Gnacadja, le principal blocage à l’accès des femmes à la terre réside dans la non-application des législations existantes en matière d'égalité de genre. Elle pointe dans ce registre, l’ignorance des lois qui encadrent les droits fonciers des femmes et la persistance d'attitudes socioculturelles contraires à la législation formelle.
Selon elle, ce schéma inégalitaire persiste en dépit de l’évolution des lois régissant le foncier. Lesquelles posent le principe de l’accès égal des femmes et des hommes à la terre et à la propriété foncière. A en croire la coordonnatrice du Wildaf, les femmes acquièrent moins de terres que les hommes, quel que soit le mode d’acquisition considéré.
Dans un contexte où l’héritage demeure le mode d’accès le plus couramment observé dans les milieux ruraux, les femmes continuent d’être exclues de l’héritage foncier de leurs époux ou de leurs ascendants du sexe masculin, relève-t-elle.
Si elles sont les premières victimes à souffrir des barrières socio-culturelles, les acteurs classiques des transactions foncières (les chefs d’arrondissement, de village, de quartier, les maires, les notables et autres leaders d’opinion), n’en sont pas moins coupables du fait de leur méconnaissance des lois régissant le foncier, se désole-t-elle.
A ce tableau sombre, s’ajoute l’influence du niveau d’éducation des populations et en particulier des femmes. Dans le monde rural, les femmes sont souvent exclues du système juridique, car leurs mariages ne sont pas formalisés en droit écrit et elles sont exposées aux expropriations après le décès de leur mari, constate l’avocate, ajoutant, par ailleurs que les questions de l'information et de l'analphabétisme. « Dans les zones rurales, les taux d'analphabétisme sont très élevés chez les femmes, ce qui soulève le problème des modes de diffusion de l'information juridique », souligne-t-elle.
Pourtant, la problématique des droits fonciers des femmes concerne une large frange de la population béninoise. Pour une population totale de 10 008 749 habitants dont 5 120 929 femmes (Rgph4, 2013), la proportion de femmes dans les ménages agricoles au Bénin est de 50,2% et cela s’observe aussi bien en zone urbaine (50 %) qu’en zone rurale (50,3 %). 36% des ménages pratiquent l’agriculture dont 46% cultivent une propriété familiale. Cependant, la proportion de femmes chefs de ménage agricole n’est que de l’ordre de 14,1% (pour la zone urbaine, 12,6 % et pour la zone rurale 14,5%), renseigne-t-elle. Pour corriger les inégalités dans le domaine foncier, le Bénin gagnerait à s’inspirer des exemples d’autres législations africaines.
Sur ce point, Huguette Bokpè Gnacadja cite en exemple l’Afrique du Sud dont la Commission sur l'égalité entre les hommes et les femmes intervient dans le cadre foncier. Au Ghana, la Commission pour les droits de l'Homme et la justice administrative (Chraj), originellement mise en place pour s’attaquer aux violations des droits de l'Homme et résoudre les conflits entre les citoyens et l'État a été efficace pour protéger dans les conflits familiaux, les droits des femmes à la terre, indique-t-elle.