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Criet/ Viol sur mineure de moins de 13 ans: Le délibéré du dernier dossier de la session criminelle rabattu (Les âges des accusés et de la victime imprécis)

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La Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet), statuant en matière criminelle sur des faits commis à raison de sexe des personnes et protection de la femme, n’a pu vider, mercredi 21 février dernier, le 13e et dernier dossier inscrit à son rôle. Dans une décision d’Avant dire droit, elle a rabattu le délibéré et renvoyé la cause à une session criminelle ultérieure, le temps de mieux s’informer sur les âges des accusés et de la victime au moment des faits. 

Par   Thibaud C. NAGNONHOU, le 23 févr. 2024 à 12h15 Durée 3 min.
#Criet/ Viol sur mineure de moins de 13 ans
Quels âges ont réellement Mohamadou Namata Gado et Massaoudou Satchi accusés respectivement de viol sur mineure de moins de 13 ans et complicité de viol sur mineure de moins de 13 ans, au moment des faits en février 2020 à Bodjécali dans la commune de Malanville ? La victime dont l’acte de naissance ne figure pas au dossier a-t-elle effectivement deux ans, donc moins de 13 ans, à l’époque, comme affirmé sur certaines pièces ? La Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet), statuant en matière criminelle sur des faits commis à raison de sexe des personnes et protection de la femme, veut en avoir le cœur net pour démêler l’écheveau de cette affaire. Elle n’a pas pu forger, mercredi 21 février dernier, sa conviction sur ce treizième et dernier dossier inscrit au rôle de sa session, sa première au titre de l’année judiciaire 2023-2024. Les âges des deux accusés et même de la fille abusée, absente à l’audience, sont restés sans précision jusqu’à la clôture des débats. 
L’accusé Mohamadou Namata Gado, conducteur de tricycle, a été le premier à être invité à déposer par la cour de céans. A la barre, l’inculpé dit qu’il ne comprend pas trop français même s’il a été à l’école jusqu’en classe de Cours élémentaire deuxième année (Ce2). Il dit ne parler que dendi. La cour sollicite l’aide de l’interprète de la Criet pour assurer la communication entre elle et l’accusé. 
D’entrée, Mohamadou Namata Gado dit ignorer son âge. Il se rappelle seulement être né à Cotonou. Mais en quelle année, il dit ne pas le savoir. L’accusé dit avoir perdu contact de tous ses deux parents et que son père serait même mort. Toute tentative de la cour pour avoir une idée de l’âge de l’inculpé a été infructueuse. Mais il paraît physiquement plus jeune que l’âge de 19 ans environ inscrit au dossier, au moment des faits. Mohamadou Namata Gado reconnait les faits mis à sa charge. Il dit avoir abusé sexuellement de la victime. Mais il nuance pour dire que celle-ci était consentante des relations sexuelles. Ils étaient six jeunes répartis dans deux tricycles en circulation ce lundi 27 janvier 2020, aux environs de 21 h, jour du crime, quand ils ont croisé la fille pour la conjonction sexuelle. La victime a préféré lui parmi eux tous. L’accusé persiste et signe avoir été la seule personne à coucher avec la petite qui n’était non plus vierge.
 
Effet de foule plaidé 

Les autres dont Massaoudou Satchi n’ont pas participé au crime. Ils lui ont porté assistance en gardant les pieds de la victime afin de neutraliser tout agissement pouvant obstruer la consommation de l’infraction.  Invité à la barre, Massaoudou Satchi, lui aussi, ne parle pas français. Il n’a jamais été à l’école. L’inculpé ne connait pas aussi son âge. Il n’a pas d’acte de naissance. Les pièces du dossier renseignent sans autre précision, qu’il avait, lui comme son acolyte, 19 ans environ au moment des faits. Mais lui-même dit qu’il est Béninois vivant à Bodjécali à Malanville. Massaoudou Satchi ne reconnait pas les faits de complicité de viol sur mineure de moins de 13 ans. Il déclare n’avoir jamais couché avec la victime. Seul son co-accusé l’a fait. Mais il était présent sur les lieux du crime, avoue-t-il. Une déposition qui corrobore les déclarations de la victime lors de son interrogatoire au fond. «Même si Massaoudou Satchi n’a pas eu de rapports avec moi, il a gardé mes pieds», a déclaré la fille absente à l’audience et dont le père a dit à l’avocate de la partie civile ne plus faire revivre cette situation à sa fille. Il n’a pas jugé opportun de faire déplacer la victime en dépit des diligences du parquet spécial près la Criet. Les quatre autres membres de la bande à bord des deux tricycles au moment des faits sont en fuite. Ils ne sont jusqu’ici pas appréhendés pour l’infraction. Leur cas a été disjoint de ceux de Mohamadou Namata Gado et Massaoudou Satchi. Le certificat médical de la victime n’a pas révélé de défloration, attestant que la fille n’était pas vierge. L’examen a constaté une pénétration vaginale récente. Ce qui est consécutif au viol subi par la victime. Puisque au sens des dispositions de l’article 3 de la loi n°2011-26 sur les violences faites aux femmes et de l’article 553 al.1 du code pénal, le viol consiste à se rendre coupable d’acte de pénétration vaginale, anale ou buccale par le sexe d’autrui ou par un quelconque objet sans le consentement intelligent et volontaire de la personne pénétrée.     
Pour Me Alexandrine Saïzonou-Bédié, constituée aux intérêts de la partie civile, c’est-à-dire la victime et l’Institut national de la Femme (Inf), les faits de viol sur mineure de moins de 13 ans sont établis. Toutefois, elle déplore la jeunesse d’âge des deux accusés. Au nom de la partie civile, l’avocate au barreau de Cotonou réclame aux deux inculpés la somme de 20 millions F Cfa à raison de 10 millions par tête à titre de dommages-intérêts pour la victime. 

Délibéré rabattu  

Au nom de la société qu’il représente, Regan Hounguè, 1er substitut du procureur spécial près la Criet, requiert la cour de retenir Mohamadou Namata Gado et Massaoudou Satchi dans les liens de l’accusation. Il propose que le premier soit condamné à 15 ans et le second à 10 ans de réclusion criminelle. Le ministère public requiert que la cour réserve les intérêts de la victime et le franc symbolique à l’Inf pour toutes causes de préjudices confondues. 
Me Filbert Toïdè Béhanzin, commis d’office pour défendre les deux accusés, a plaidé coupable. Il a imploré la clémence de la cour. Me Filbert Toïdè Béhanzin a démontré qu’il ne s’agit pas d’un viol collectif qui peut constituer des circonstances aggravantes pour ses clients. Seul Mohamadou Namata Gado a eu des rapports sexuels avec la victime dont aucun acte officiel n’atteste son âge au moment des faits, plaide l’avocat de la défense. Me Filbert Toïdè Béhanzin invite la cour, dans son délibéré, à écarter le crime de viol collectif et surtout à regarder de près le jeune âge de ses clients. Lesquels ont agi sous « l’effet de foule ». Délibérant, la cour annonce le rabat du délibéré et la réouverture des débats. Les deux accusés sont invités à la barre. Ils ont été à nouveau questionnés sur la situation exacte de leur âge. Les réponses n’ont toujours pas éclairé la cour qui a jugé de la nécessité d’un complément d’information sur l’âge des deux inculpés. Ainsi, dans une décision Avant dire droit, la cour a renvoyé la cause à une session ultérieure. L’un des assesseurs a été ordonné d’accomplir ces diligences et recherches nécessaires dans un délai d’un mois pour que soit connu l’âge exact des accusés ainsi que celui de la victime dont l’acte de naissance ne figure pas au dossier. Ce qui permettra une bonne administration de justice. En attendant cette session ultérieure qui les fixera sur leur sort, les deux accusés sont retournés en prison où ils sont incarcérés depuis le 6 février 2020.