La Nation Bénin...
L’essor
économique et démographique du Bénin aggrave la pollution et met en péril la
qualité de l’air. Une étude signée Olaniran Franck Balogoun et Latif Dramani
met en lumière des chiffres alarmants et appelle à accélérer la transition
énergétique.
La
prospérité économique du Bénin a un impact direct sur l’environnement. Selon
une étude publiée dans la Revue d’analyse des politiques économiques et financières
(Rapef, Vol. 7, décembre 2024), une augmentation de 1 % du produit intérieur
brut (Pib) entraîne une hausse de 1,4 % des émissions de carbone. Cette étude,
réalisée par Olaniran Franck Balogoun et Latif Dramani, chercheurs à
l’Université Iba Der Thiam de Thiès (Uidt) au Sénégal, porte sur les « Effets
de la croissance économique et des dynamiques de population sur la qualité de
l’environnement au Bénin ».
A l’aide d’un modèle statistique (Ardl), les chercheurs ont analysé les relations à long terme entre le Pib par habitant, la taille de la population et les émissions de carbone, en utilisant des données allant de 1990 à 2019. Les résultats montrent que la contribution du secteur manufacturier au Pib, bien qu’essentielle, génère une élévation de 1,8 % des émissions de CO2 pour chaque point de croissance supplémentaire. Toutefois, un tournant positif survient au-delà d’un revenu annuel par habitant de 876 dollars Us (environ 525 000 F Cfa). A ce seuil, la pollution commence à diminuer, validant ainsi la théorie de la Courbe de Kuznets Environnementale (Cke), selon laquelle la dégradation environnementale augmente au début du développement économique, mais diminue après un certain niveau de richesse avec l’adoption des technologies plus propres et des politiques environnementales plus strictes.
Pression démographique
La
croissance de la population joue un rôle encore plus préoccupant. L’étude
révèle qu’un accroissement de 1 % de la population entraîne une augmentation
disproportionnée de 3,99 % des émissions de CO2. Cette accélération est due à
une demande accrue en énergie et à une urbanisation non maîtrisée. Par
ailleurs, la structure de l’économie béninoise influence directement la
dégradation de l’environnement. En effet, la transition énergétique n’est pas
encore pleinement engagée, et le secteur manufacturier reste toujours dépendant
pour une bonne part des énergies fossiles.
Les conséquences sont visibles sur la qualité de l’air. En 2019, la concentration de particules fines, celles de moins de 2,5 micromètres (PM2.5), a bondi de 14,63 %. Près de 45,22 % des Béninois respirent désormais un air plus pollué que les normes établies par l’Organisation mondiale de la santé.
Politiques à réajuster
Les
conclusions de l’étude sont sans appel. La phase d’industrialisation entamée
par le Bénin, avec la création de zones industrielles et le renforcement des
petites et moyennes entreprises (Pme) dans l’agroalimentaire, pourrait
intensifier la sensibilité de la variation des émissions de carbone au secteur
manufacturier dans le temps, à moins qu’une politique environnementale ne soit
mise en place.
Ainsi,
le Bénin doit adapter rapidement son modèle de développement pour éviter une
crise environnementale irréversible. Une croissance plus verte et une gestion
plus efficace de la démographie sont essentielles pour garantir un avenir
durable.
Face
à cette situation, plusieurs pistes d’action s’imposent. Les auteurs de l’étude
recommandent d’accélérer la transition énergétique par des investissements dans
les énergies renouvelables et des mesures d’efficacité énergétique. Ils
soulignent également l’urgence de développer un secteur industriel respectueux
de l’environnement, grâce à des réglementations strictes et des incitations à
l’innovation verte.
L’urbanisation doit également être mieux encadrée. Une planification efficace et des politiques de logement durable permettraient d’atténuer l’impact écologique de la croissance démographique. L’éducation et la sensibilisation des populations représentent également des leviers incontournables pour freiner la dégradation de l’environnement.