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Vol à main armée et coups et blessures volontaires (10e dossier): 10 ans de réclusion criminelle pour Olivier Ouhama Woba

Société
Par   Claude Urbain PLAGBETO, le 13 juil. 2015 à 22h10

Inculpé de vol à main armée et coups et blessures volontaires, le nommé Olivier Ouhama Woba, cultivateur de nationalité burkinabé, 22 ans, a été reconnu coupable samedi 11 juillet dernier. Dix ans de réclusion criminelle, c’est la sentence qui a sanctionné le procès de cette 10e affaire inscrite au rôle de la première session ordinaire de la Cour d’assises de la Cour d’appel de Parakou au titre de 2015.

Courant 2013, Bienvenu Sabi Tèyo, chauffeur et cultivateur à Banikoara, sollicite Olivier Ouhama Woba et Arouna (sans autres précisions) tous originaires du Burkina Faso, pour l’aider à travailler dans son champ à Ounet-Peulh. A la fin de la saison et des récoltes, il a rémunéré les manœuvres recrutés. Trois semaines plus tard et précisément le 10 décembre 2013, aux environs de 20 heures, Bienvenu Sabi Tèyo est allé chercher de l’eau à la pompe. De retour, il tombe dans une embuscade posée par le sieur Olivier Ouhama Woba. Lorsque Bienvenu Sabi Tèyo vient à passer, Olivier Ouhama Woba ouvre le feu à l’aide d’un pistolet de fabrication artisanale. Bienvenu Sabi Tèyo atteint à l’épaule, abandonne sa motocyclette. Olivier Ouhama Woba s’empare de celle-ci et prend la fuite. Il sera appréhendé plus tard et inculpé de vol à main armée et de coups et blessures volontaires ayant entraîné une incapacité de travail de plus de 20 jours.

Tels sont les faits qui ont motivé le renvoi du nommé Olivier Ouhama Woba devant la Cour d’assises de la Cour d’appel de Parakou pour être jugé conformément à la loi.
L’audience pour son jugement est présidée par Ignace Edouard Gangny assisté de Maximilien C. Claude Olympio et Ferdinand M. Dégbèlo ; la Cour était également composée des jurés : Jean Yoro Sotima, Azaratou Guerra Bagri, Clarisse Mandopa P. Dogo et Mêmounatou Bio Tchané. Le greffier de l’audience est Me François Nougbodohoué.

Les débats

Comme à toutes les étapes de la procédure, l’accusé a reconnu encore les faits samedi dernier à l’audience. Il dit être fâché parce que le sieur Bienvenu Sabi Tèyo lui devrait la somme de 30 000 F CFA (à raison de 10 000 F CFA x 3) qu’il lui a prêtée pour soigner son enfant et sa femme, mais ne voulait pas le rembourser. «Même les 115 000 F CFA représentant les trois mois de manœuvre dans son champ, il n’a pas voulu payer. C’est sa mère qui a payé». «Quand je l’appelle sur son téléphone portable, il coupe. Ça m’a fâché. Comme il ne voulait pas me donner mon argent, j’ai décidé de lui prendre la moto... En tirant, j’ai visé l’épaule ; je ne voulais pas le tuer», laisse entendre Olivier Ouhama Woba à la barre. En ce qui concerne l’origine du pistolet de fabrication artisanale, le détenteur illégal d’arme dit l’avoir acheté à
40 000 F CFA chez son compatriote ledit Arouna avec qui il a fait le sarclage et la récolte dans le champ de coton de Bienvenu Sabi Tèyo.
Un témoin en la personne de Sabi Olivier Sabi Tèyo, jeune frère de la victime, a déposé à la barre. Il raconte comment il a appris l’agression de son grand-frère et s’est porté à son chevet dans une clinique où il a été admis en état d’inconscience par des Peulhs voisins du lieu du crime. Il souligne que la moto a été reconnue par chance par quelqu’un qui les a alertés au village. Un communiqué radio sur la description de la moto frauduleusement soustraite suite à un braquage est passé en son temps à la radio, rappelle-t-il. Le voleur avait passé la moto à quelqu’un chez qui il a logé. La clé de la moto est perdue et ils ne savaient pas comment ouvrir le réservoir pour y mettre de l’essence quand le carburant est fini, poursuit-il. Interpellé, Olivier Ouhama Woba a tenté de fuir mais il a été vite maîtrisé et ligoté, avant d’être conduit plus tard à la gendarmerie, ajoute-t-il.
La victime, elle-même, a répondu présent à l’audience. Bienvenu Sabi Tèyo raconte son calvaire de cette nuit où de retour du forage, il constate que la piste est barrée à l’aide d’un tronc d’arbre, s’arrête pour contourner l’obstacle quand il se voit surprendre de dos. La suite, il reçoit une décharge à l’épaule gauche et réussit à s’enfuir, en abandonnant la moto sans pour autant reconnaître son agresseur qui n’était autre que son ancien ouvrier masqué avec un turban sur la tête. Dans son exposé des faits, Bienvenu Sabi Tèyo rejette les allégations de son ex-employé et soutient qu’il ne lui doit rien. Il se constitue partie civile mais ne donne pas un montant à titre de dommages et intérêts.

Une peine proportionnelle à l’acte ?

Le représentant du ministère public, Jules Chabi Mouka, s’est évertué à démontrer que les éléments de vol à main armée et de coups et blessures volontaires sont constitués, lesquelles infractions sont prévues et punies respectivement par les articles 381 et 309 du Code pénal. L’avocat général n’en veut pour preuves que le port effectif de pistolet par l’accusé, le coup tiré par ce dernier à l’aide de l’arme, la soustraction frauduleuse de la moto de sa victime, les plaies faites à l’épaule gauche de cette dernière par l’impact de balle, l’intention criminelle manifeste à travers la volonté du sieur Olivier Ouhama Woba de s’approprier le bien dont Bienvenu Sabi Tèyo est légitime propriétaire. «Il a agi délibérément et sciemment», signale le ministère public. Se basant sur le certificat médical versé au dossier qui révèle la présence de plaies et de corps étranger au niveau de l’épaule de la victime, Jules Chabi Mouka fait observer que l’accusé a porté atteinte à l’intégrité corporelle de la victime qui a d’ailleurs du mal à se servir désormais de son bras gauche. Les coups et blessures volontaires sont la conséquence directe du vol à main armée perpétré, constate-t-il. Pour ces faits, il requiert 15 ans de réclusion criminelle contre Olivier Ouhama Woba, accessible à la sanction pénale parce que lucide au moment de l’action aux termes de l’article 64 du Code pénal selon le rapport d’examen psychiatrique et médico-psychologique.
Avocat-conseil de l’accusé, Me Macaire Adossou avoue d’entrée de sa plaidoirie, que c’est pour la première fois qu’il prend en main un dossier de cette ampleur. Il plaide d’emblée coupable car, dit-il, «On m’a appris qu’on ne plaide pas contre l’évidence». Il demande la clémence de la Cour pour que la sanction soit «douce» afin de récupérer ce jeune homme qui, estime-t-il, a encore des valeurs dont la société a besoin. Il n’a pas manqué d’attaquer l’enquête de moralité qui serait biaisée selon lui, au regard de la qualité des personnes interrogées: la victime, sa mère et le responsable des ressortissants du Burkina Faso à Banikoara. Ces personnes ne connaissent en réalité pas grand-choses de la vie de son client, mais se sont contentées de faire des allégations en déduction de l’acte qu’il a posé, regrette-t-il.
Au sortir du délibéré, la Cour rend un arrêt de condamnation en déclarant le nommé Olivier Ouhama Woba coupable de vol à main armée et de coups et blessures volontaires ayant entraîné une incapacité d’au moins 20 jours, en vertu des articles 379, 381 alinéa 1er et 309 alinéa 1er du Code pénal. Elle le condamne à 10 ans de réclusion criminelle et aux frais envers l’Etat, ordonne la confiscation et la destruction du pistolet dont l’accusé a fait usage pour commettre le crime, fixe la durée de la contrainte par corps à deux mois. Le mis en cause bénéficie d’un délai de trois mois pour s’en acquitter. La Cour avise également le condamné qu’il dispose de trois jours francs pour se pourvoir en cassation.
Pour les intérêts de la partie civile, la Cour après en avoir délibéré renvoie la cause à une prochaine session, réserve les dépens.