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Au cœur de la Forêt sacrée de Ouidah: Sculptures Vodun et mystères du culte des ancêtres

Culture

A Ouidah, la cité de Kpassè, la Forêt sacrée dévoile ses légendes et sculptures chargées de spiritualité. Un parcours initiatique où traditions et symboles ancestraux fascinent des visiteurs toujours plus nombreux.

 

Par   Claude Urbain PLAGBETO, le 22 janv. 2025 à 07h15 Durée 3 min.
#Forêt sacrée #Art et culture

Un site mystique où sculptures, légendes et spiritualité vodun se mêlent pour faire revivre l’héritage du Royaume Xwéda. Depuis trois jours, la Forêt sacrée de Kpassè, à Ouidah, accueille des dizaines de visiteurs dans le cadre des Vodun days, une célébration qui plonge au cœur des traditions spirituelles du Bénin.

S’étendant sur une superficie de 4 hectares, cette forêt abrite une exposition permanente et vivante illustrant la richesse de la cosmogonie vodun et les divinités qui régissent cette terre mystique. Elle sert également de lieu de rituels et de libations de grande importance à de nombreuses divinités, qu’il s’agisse d’initiations ou de conjurations de mauvais sorts pour les adeptes et, parfois, pour toute la nation.

Ce jeudi 9 janvier, le président de la République a honoré de sa présence la Forêt sacrée de Kpassè, suscitant une grande joie chez le conservateur des lieux, Désiré Kpassènon. « Sa visite témoigne d’une reconnaissance nationale pour la valorisation de nos cultes endogènes, lui qui a initié les Vodun days à cet effet », a-t-il confié avec enthousiasme.

Guidé par Audryo Gomez, notre groupe de visiteurs découvre une vingtaine de stations marquées par des sculptures fascinantes. Chaque œuvre est une fenêtre ouverte sur la spiritualité et les valeurs sociétales des Xwéda.

« La cosmogonie vodun repose sur quatre éléments fondamentaux: l’air, l’eau, la terre et le feu, auxquels s’ajoute l’énergie », explique le guide.

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Légendes captivantes

Parmi les divinités présentées, Dambada Ayidohouèdo, représenté par un serpent se mordant la queue, symbolise la loi du retour (à l’envoyeur) : « Le mal que vous faites vous revient. » Le « vieux sage » sculpté incarne, quant à lui, le respect envers les aînés, une valeur cardinale dans la société africaine.

Les visiteurs sont ensuite guidés vers des arbres empreints de mystères. Le premier, tombé il y a un siècle, se serait redressé seul après une nuit d’abandon par des jeunes chargés de le débiter. Un autre arbre, le « Kpassè Loko », est encore plus révéré. Selon la tradition, il serait la réincarnation du roi Kpassè qui a disparu. « Les visiteurs y posent la main gauche pour formuler des vœux, et certains affirment avoir obtenu satisfaction sur-le-champ», raconte le conservateur, non sans avertir : « Mais gare à ceux qui souhaitent du mal aux autres, car cela pourrait se retourner contre eux ».

La préservation de l’environnement est également au cœur de la philosophie vodun. « On ne tue aucun être, aussi petit soit-il », insiste le guide Audryo, soulignant ainsi la profonde connexion entre le vodun et la nature.

Les sculptures de la divinité Hêbiosso, le justicier, et de Gu, le dieu du fer, captivent aussi les visiteurs. Le cultivateur portant une houe évoque l’importance de l’agriculture dans la cité.

Syncrétisme religieux et fusion 

La statue de Lègba, gardien du temple, veille sur les lieux, tandis que celle du « boconon » avec le signe « Gbé-woli » honore le prêtre fâ du roi, chargé de consulter les oracles et de prévenir des événements majeurs ou des dangers.

Un symbole marquant du syncrétisme religieux au Bénin est également visible à travers une sculpture représentant Gu, le dieu du fer, portant un encensoir utilisé par les prêtres catholiques, arrivés dans la ville il y a un siècle et demi. « Cette fusion entre différentes spiritualités reflète la tolérance religieuse dont notre pays peut être fier et qu’il doit préserver », souligne Audryo Gomez, évoquant la coexistence harmonieuse de plusieurs croyances au sein de la même communauté.

En quittant la forêt, les visiteurs repartent avec un sentiment d’émerveillement et de respect pour cette culture vivante. « C’est une expérience bouleversante», confie Ferdinand, un festivalier venu de Cotonou avec un groupe associatif. « C’est comme une plongée dans un autre monde, où le passé et le présent se rencontrent », ajoute Serge, son compère.

Le conservateur, Désiré Kpassènon, conclut : « La Forêt sacrée de Kpassè est le cœur battant de notre histoire. En valorisant cet héritage, nous assurons sa transmission aux générations futures. »

Avec ses sculptures empreintes de symbolisme et ses légendes mystiques, la Forêt sacrée de Ouidah demeure un joyau inestimable du patrimoine béninois, un lieu vivant où chaque pierre, chaque arbre, chaque sculpture porte un message ancien, et toujours actuel.

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