La Nation Bénin...
Perdus dans la jungle, livrés à tous les risques, ployant
sous le poids de la fatigue, de la faim, voire de leurs propres consciences ;
le sergent Xavier et le jeune soldat Faustin sont passés par bien des épreuves.
Projeté vendredi 6 octobre dernier à l’espace culturel Le Centre, le film « La
miséricorde de la jungle » de Joël Karekezi a plongé les cinéphiles dans les
méandres de la deuxième guerre du Congo. Occasion pour l’espace culturel de
réaffirmer la vision de Wà Cinéma et d’annoncer d’alléchantes perspectives.
Entre silence, murmures et questionnements, les cinéphiles
semblaient bien embarrassés par le film « La miséricorde de la jungle » de Joël
Karekezi. C’est une de ces réalisations qui captivent et requièrent une attention
particulière si l’on veut en saisir la trame. 91 minutes de concentration !
Nous sommes en 1998, dans la région du Kivu, à la frontière
entre le Congo et le Rwanda où la deuxième guerre du Congo bat son plein. Une
guerre meurtrière qui fait d’innocentes victimes. Des villages pillés,
détruits, laissés en ruine. Des communautés entières massacrées. Au front dans
cet environnement belliqueux, le sergent Xavier, héros de guerre rwandais, et
le jeune soldat Faustin qui a grandi dans les champs, perdent la trace de leur
bataillon. Se fourvoyant dans la plus vaste et hostile jungle du continent, ils
doivent survivre à la faim, à la soif, au désespoir et même à la torture de
leurs propres consciences agitées par les horreurs du passé et du présent. Les
deux aventuriers de fortune se soutiennent mutuellement et bravent ensemble
toutes les épreuves, se liant d’amitié. Au bord du gouffre, ils parviennent à
échapper à un détachement de rebelles qui les traquent, et finissent par tomber
sur des bienfaiteurs qui leur font bon accueil dans leur petit village et les
orientent. Le sergent Xavier et le jeune soldat Faustin retrouvent enfin leur
bataillon et croient être sortis d’affaire. Ils sont hélas considérés comme des
déserteurs, des espions et sont torturés, emprisonnés avant d’être relâchés. Le
sergent Xavier est réadmis mais le jeune Faustin voit ses efforts mal
récompensés; il est promis à un rapatriement incertain. Au travers d’une
attaque intestine, nocturne, la troupe est décimée par un mystérieux soldat. Seul
survivant, le sergent Xavier traque l’assaillant mais est surpris de le
reconnaître. Ce dernier, profitant de l’hésitation du sergent, lui tire dessus
et s’enfuit. L’on verra dans la dernière scène le jeune Faustin au champ,
chérissant sa famille. Libre court aux interprétations… Charlemagne Zocli,
comptable de profession, en ressort d’ailleurs avec beaucoup d’interrogations.
« y a-t-il un acteur principal ? Qu’est-il advenu du
sergent Xavier. A-t-il succombé au coup de feu ? Qui lui a tiré dessus ? Serait-ce
le jeune Faustin ? ... ». Seul Joël Karekezi pourra satisfaire à tous ses
questionnements.
Tourné au Rwanda et en Ouganda, ce long métrage produit en
2018, a reçu l'Etalon d'or de Yennenga au Fespaco en 2019. Il a été projeté,
vendredi 6 octobre dernier, à l’espace culturel et artistique Le Centre dans le
cadre du programme Wà Cinéma.
Perspectives
Lancé le 7 mai 2021 par Le Centre sis à Lobozounkpa, Wà
Cinéma a été initié pour raviver la culture du cinéma ; valoriser et promouvoir
les productions cinématographiques issues ou en lien avec le continent
africain. Ce programme, accompagné par l’Institut Français du Bénin, reçoit en
moyenne cent cinéphiles chaque premier vendredi du mois. De plus en plus, les productions béninoises
bénéficient d’un intérêt particulier. « Nous travaillons depuis quelques années
à élargir ce champ afin de recevoir beaucoup plus de productions made in Benin.
Nous avons entrepris le projet de valorisation des productions béninoises
depuis l’année dernière. Nous avons déjà diffusé quelques films made in Benin
dont ‘’La canne du Roi’’ de Reilinght Tchobo qui est lié au pouvoir de la
récade dans l’ancien royaume du Danxomè et qui fait aussi le lien avec le Petit
musée de la récade sis dans l’enceinte de l’espace Le Centre », indique Mora
Gaba, chargé de communication de l’espace Le Centre. A l’en croire, Le Centre
entend rester sur la même dynamique. « Nous sommes en train de négocier des
partenariats avec des plateformes de diffusion et des structures de productions
cinématographiques au Bénin. Ce qui nous permettra de recevoir plus de
productions. Le challenge est donc d’arriver à trouver des films de très bonne
qualité aussi bien pour ce qui est de l’audio, du visuel que du scénario »,
précise Mora Gaba.
Wà Cinéma prépare un programme alléchant pour les
cinéphiles dans les jours à venir.
« Nous envisageons de ramener ici la crème de la crème. Il
y a des films qui ont été réalisés dernièrement et qui ont suscité beaucoup
d’engouement sur les réseaux sociaux, que nous pensons ramener ici. Je sais
déjà que cela va réjouir les cinéphiles qui auront le privilège d’avoir accès à
ces films gratuitement. Car très généralement dans les autres centres, c’est
payant. C’est notre manière de rendre le cinéma accessible à tous; de permettre
aux Béninois d’apprécier ce que font nos jeunes réalisateurs », fait savoir
Mora Gaba.