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Finances locales au Bénin: Une dépendance accrue aux subventions en 2024

Economie

Pour la première fois en cinq ans, les communes du Bénin n’ont pas pu couvrir leurs dépenses de fonctionnement avec leurs ressources propres en 2024. La forte dépendance aux subventions soulève des questions sur la pérennité de leur autonomie financière.

Par   Claude Urbain PLAGBETO, le 29 avr. 2025 à 08h50 Durée 3 min.
#Finances locales au Bénin

L’année 2024 a marqué un tournant préoccupant pour les finances locales au Bénin. Pour la première fois en cinq ans, les ressources propres des communes n'ont pas suffi à couvrir leurs dépenses réelles de fonctionnement. Ce constat met en lumière la fragilité des finances locales et soulève des interrogations sur la viabilité financière des collectivités à moyen terme.

D’après la dernière Note de conjoncture des finances locales, publiée par la direction générale du Trésor et de la Comptabilité publique (Dgtcp, mars 2025), les ressources propres des communes n’ont couvert que 63 % de leurs dépenses réelles de fonctionnement en 2024. Le reste a été financé grâce aux subventions de l’Etat et de divers partenaires financiers. Cette situation met en exergue une forte dépendance des communes vis-à-vis des aides extérieures, particulièrement pour les communes ordinaires. Leur ratio d’autonomie financière a chuté à 0,51, bien en deçà de la moyenne de 0,81 observée entre 2020 et 2023. Cette faiblesse financière limite leur capacité à développer des projets locaux sans une aide extérieure.

Le rapport souligne également que l’épargne brute, un indicateur clé de l’autonomie financière, a fortement diminué. Elle est passée de 0,43 en 2023 à seulement 0,18 en 2024, son niveau le plus bas depuis cinq ans. Cette dégradation est particulièrement marquée à Cotonou, où une désépargne de -0,72 a été enregistrée. Dans les autres communes, les résultats sont également préoccupants, avec des scores modestes allant de 0,21 à 0,38.

 

Recettes fiscales en baisse 

La principale cause de cette dégradation des finances locales réside dans la baisse des recettes fiscales. En 2024, la part des recettes fiscales dans les finances locales a chuté à seulement 27 %, contre 48 % en moyenne sur les quatre années précédentes. Ce déclin souligne les difficultés croissantes des communes à collecter leurs recettes fiscales. Plusieurs facteurs expliquent cette baisse, notamment des problèmes dans la collecte des taxes et le non-transfert effectif des recettes fiscales par l’État, en particulier pour certaines communes à statut particulier.

Cette réduction des ressources fiscales s’accompagne d’une vulnérabilité accrue, car les communes peinent à financer leurs projets de manière autonome. En conséquence, elles se retrouvent de plus en plus dépendantes des subventions extérieures pour maintenir leur équilibre budgétaire.

En dépit de ces difficultés, les communes ont redoublé d’efforts pour entretenir leur patrimoine communal, après trois années de recul. En 2024, les dépenses d’entretien ont atteint 3,45 milliards de F Cfa, soit 12,5 % des ressources propres des communes. Ce financement est jugé essentiel pour maintenir les infrastructures en bon état et éviter des coûts de réhabilitation futurs. Cependant, cet effort reste limité par les contraintes financières actuelles.

La Note souligne également une augmentation des dépenses rigides, notamment les salaires des agents et les émoluments des élus, qui représentent désormais 44 % des dépenses de fonctionnement, contre 36 % en moyenne sur les quatre années précédentes. Cette tendance est particulièrement marquée dans les communes à statut particulier, ce qui accentue leur dépendance aux subventions pour couvrir leurs charges fixes.

Face aux enjeux

En dépit de cette dépendance aux subventions, l’année 2024 a été marquée par une relance des investissements dans les communes. Le ratio des dépenses d’investissement a atteint son meilleur niveau depuis le lancement de la réforme de la décentralisation, atteignant 49 %. Cela a été rendu possible par un sursaut observé au dernier trimestre de l’année. Toutefois, ce regain d’activité reste fragile, car il est insuffisant pour couvrir les besoins en infrastructures et services publics, notamment dans les communes ordinaires.

Les communes à statut particulier bénéficient d’une situation financière plus favorable, mais les communes ordinaires restent vulnérables et peinent à réaliser des projets structurants sans le soutien extérieur. Cela met en évidence les inégalités financières entre les différentes catégories de communes.

Il est donc crucial que les communes renforcent leur capacité à générer des ressources propres. La Dgtcp appelle à une réforme en profondeur de la fiscalité locale, visant à améliorer la collecte des recettes fiscales et à garantir un transfert régulier des ressources par l’Etat. Il est également recommandé de renforcer la gestion financière au niveau communal, avec la mise en place de plans de gestion plus rigoureux et l’identification des causes des défaillances dans la gestion de trésorerie.

Une réforme efficace de la fiscalité locale pourrait permettre aux communes de réduire leur dépendance aux subventions et d'assurer une stabilité financière à long terme. Cependant, il reste essentiel de maintenir un soutien continu aux communes les plus vulnérables, en veillant à ce que les dotations et subventions de l’Etat soient régulières et adaptées à leurs besoins spécifiques. Cela permettra non seulement de maintenir l’équilibre budgétaire mais aussi de garantir un développement local cohérent.