La Nation Bénin...
La
prospérité de l’économie mondiale au cours des prochaines décennies passera par
celle de l’Afrique, estime Kristalina Georgieva, directrice générale du Fmi,
qui insiste sur la lutte contre les inégalités pour un monde meilleur pour les
générations à venir.
Dans
les 100 prochaines années, l’économie mondiale se porterait mieux avec une
croissance plus durable, plus équitable et
plus résiliente, ce qui permettra aux pays d’être mieux armés pour
naviguer dans un monde davantage exposé aux chocs. C’est du moins la conviction
de Kristalina Georgieva, directrice générale du Fonds monétaire international
(Fmi) à travers son exposé « Les perspectives économiques pour mes
petits-enfants », fait le 14 mars dernier au King’s College, Cambridge.
«
Pour que l’économie mondiale prospère au XXIe siècle, l’Afrique doit
prospérer», allègue-t-elle, insistant sur la nécessité de renforcer les
dispositifs de protection sociale et l’autonomisation des femmes sur le plan
économique, en vue de parvenir à une accumulation de capital humain plus juste.
Abritant les populations les plus jeunes, le continent devrait accueillir 40 %
de la population mondiale d’ici la fin du siècle, en raison de la forte
croissance démographique, d’après les estimations.
Il
importe de « corriger la plus grosse anomalie de ces 100 dernières années, à
savoir la persistance d’importantes inégalités économiques », préconise la
conférencière. Il est question de « trouver des moyens de mieux relier les
abondantes ressources humaines de l’Afrique aux abondantes ressources
financières des pays avancés et des principaux pays émergents», lance-t-elle.
Pour
les pays africains, la clé est d’attirer les investisseurs à long terme et
d’assurer la stabilité des flux commerciaux. Cela passe, indique la directrice
générale, par la promotion d’une meilleure croissance avec l’amélioration du
climat des affaires, l’augmentation des recettes ou encore la réduction des
dépenses inefficaces. Cela dégagerait de la marge de manœuvre pour les dépenses
sociales essentielles pour les pays qui composent déjà avec un budget serré et
un endettement élevé, poursuit-elle.
Fondamentaux
«
Si nous parvenions à combiner le bon type de soutien international avec le bon
type de politiques intérieures, nous pourrions faire en sorte que l’Afrique
attire des investissements, des technologies et du savoir-faire sur le long
terme », estime Kristalina Georgieva qui plaide pour le renforcement du
dispositif mondial de sécurité financière. Elle espère que les fondamentaux
macroéconomiques et la saine stabilité financière que s’efforcent d’établir les
dirigeants actuels seront protégés et améliorés. L’ouverture commerciale sera
aussi cultivée en tant que moteur essentiel de la croissance, avec
l’entrepreneuriat en tant que moteur essentiel de l’innovation et de l’emploi,
ajoute-t-elle.
Un
renforcement des capacités fiscales dans les pays à faible revenu se traduirait
par une augmentation de leurs recettes annuelles pouvant atteindre
9
% du produit intérieur brut (Pib), ce qui permettrait d’aligner leur effort
fiscal sur celui des pays émergents, selon une étude du Fmi. Le dispositif
mondial de sécurité financière dans lequel le Fmi prend une part active,
contribuerait à libérer tout le potentiel des jeunes africains. Par conséquent,
cela créerait plus d’emplois en Afrique et freinerait l’émigration et
augmenterait le rendement du capital, estime la Dg/Fmi. Ces ressources
pourraient être utilisées dans les pays avancés, notamment pour améliorer la
viabilité des systèmes de retraite. « Globalement, nous aurions une économie
mondiale plus dynamique », projette-t-elle.
La
conférencière tire son inspiration de l’essai de John Maynard Keynes, père de
la macroéconomie moderne, intitulé Perspectives économiques pour nos
petits-enfants, et fonde son optimisme sur deux scénarios possibles établis par
les services du Fmi pour les prochaines décennies. Dans le premier dit « peu
ambitieux », le Pib mondial est trois fois supérieur et le niveau de vie à
l’échelle mondiale 2 fois supérieur aux niveaux actuels. Dans le second « très
ambitieux » reposant sur les taux de croissance bien plus élevés, le Pib
mondial est 13 fois supérieur et le niveau de vie 9 fois supérieur aux niveaux
actuels.
Trois domaines clés
«
Notre responsabilité aujourd’hui n’est pas de leur (Ndlr : nos petits-enfants)
laisser en héritage une inflation galopante, elle n’est pas d’accumuler des
dettes en attendant d’eux qu’ils règlent l’addition et qu’ils surmontent les
perspectives de croissance à moyen terme les plus moroses que nous avons vues
depuis des décennies », laisse entendre la directrice générale du Fmi. «Notre
mission, au Fmi, prône-t-elle, consiste à aider nos pays membres à entreprendre
des réformes fondamentales pour améliorer la productivité, et rendre l’économie
plus agile, plus durable et plus résiliente. »
Les
perspectives prendront également appui sur la capacité à affecter les capitaux
là où ils sont le plus nécessaires et où leur effet sera le plus bénéfique, et
à coopérer, de manière à faire avancer les progrès technologiques et à en
partager les bienfaits. Mme Georgieva identifie trois domaines d’investissement
prioritaires à savoir le climat à travers la lutte contre le réchauffement de
la planète, la prochaine révolution industrielle : les technologies dont
l’Intelligence artificielle (IA) qui révolutionne les secteurs et les emplois
et le capital humain à travers la santé et l’éducation.
Pour
y parvenir, elle propose une coopération, tant sur le plan économique que
social, qui devrait obéir à des principes de base. Ce « multilatéralisme du
XXIe siècle » serait plus représentatif, avec un meilleur équilibre entre pays
avancés, pays émergents et pays en développement, plus ouvert et plus à
l’écoute, non seulement des voix officielles, mais aussi des voix non
officielles fondées autour de l’intérêt commun et davantage axé sur les
résultats, avec des objectifs plus concrets, insiste-t-elle.