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Gestion des terres arables: Recourir aux bonnes pratiques pour préserver le sol

Environnement
Par   Didier Pascal DOGUE, le 11 déc. 2015 à 01h28

La Journée mondiale des sols a été célébrée le 5 décembre dernier. A cette occasion, le colonel à la retraite, conseiller technique en gestion durable des terres à la GIZ (projet Prosol), Comlan Marcel Kakpo s’est prononcé sur les mesures pour une bonne conservation des sols.

L’état des sols inquiète. L’érosion et les mauvaises pratiques (parlant des techniques culturales) en sont les principales causes, a déploré Comlan Marcel Kakpo, conseiller technique en gestion durable des terres à la GIZ. Les problèmes liés à la gestion durable des sols concernent tout le monde.

Pour l’ancien officier des eaux, forêts et chasse, le sol n’est pas une ressource renouvelable. «Nous devons en prendre soin correctement. La jeunesse doit comprendre que nos sols sont en danger. Il faut recourir aux bonnes pratiques pour les maintenir en bon état et les gérer de manière durable», suggère Comlan Marcel Kakpo qui admet que la sensibilisation et la communication sont nécessaires pour atteindre de pareils résultats. «C’est ce qu’il faut pour que les populations prennent conscience. Nous tous marchons sur le sol et l’utilisons pour mener toutes nos activités», confie-t-il.
L’agriculture sur brûlis est une agriculture itinérante, fait remarquer Comlan Marcel Kakpo, mais qui concourt à une rapide dégradation des sols. Depuis les années 1995, il a été relevé que 29% de nos terres sont extrêmement dégradées, 33% le sont moyennement et 35% sont faiblement dégradées. Du Nord au Sud, toutes les huit zones agro-écologiques sont concernées, constate-t-il. Il est normal que les jeunes prennent conscience du danger qui guette la postérité.
S’agissant des qualités d’un bon sol, il faut d’abord qu’il soit perméable, avec une granulométrie acceptable qui permet une circulation aisée de l’eau et de l’air. Dans ce cadre les micro-organismes peuvent bien jouer leur partition et permettre au sol d’être actif.

Préserver les sols

Pour préserver le sol, il faut, conseille le colonel retraité, mettre en œuvre plusieurs mesures. Il y a la manière la plus simple : quand on finit de récolter normalement, les résidus de plantes ne devraient pas être brûlés. Il faut comprendre que le sol emmagasine les éléments nutritifs et s’en enrichit. Les sous-produits retournent au sol et lui font du bien. Ce qui est déplorable est qu’on les ramasse complètement ou on les brûle. Alors qu’il suffit de les laisser pour le paillage simple qui permet de les protéger contre l’érosion éolienne et hydrique. «Si vous êtes sur un sol déjà dégradé, il y a des méthodes qu’on utilise, notamment le zaï qui consiste à creuser et à y enfouir les matières organiques pour ensuite planter les cultures qu’on veut», indique-t-il.
Il y a également que sur les sols dégradés, poursuit Comlan Marcel Kakpo, les éléments qu’on appelle les cordons pierreux. C’est selon lui, en suivant les courbes de niveaux (plus difficile à faire mais bon) qu’on peut récupérer les sols.
Sur le plateau d’Abomey par exemple, il y a des pratiques simples par lesquelles on procède en utilisant les plantes de couverture comme le mucuna qui ont la capacité de restaurer mais dont seulement les paysans sont méfiants parce que ce n’est pas une plante comestible.

La jachère améliorée

On peut également procéder par jachère améliorée, conseille Comlan Marcel Kakpo. Ce qui consiste, poursuit-il à laisser un peu le sol se reposer mais on complète par des espèces telles que le glycédia qu’on peut mettre dessus pour enrichir le sol, indique le spécialiste.
Les arbres et/ou essences qu’on peut planter pour enrichir le sol et cultiver en même temps sont les légumineuses de manière générale, relève l’officier retraité. La nature les a dotées, souligne-t-il, de systèmes qui permettent de capter surtout l’azote qui est nécessaire pour les plantes. Par exemple le soja, si vous avez un sol pauvre indique-t-il, et que vous cultivez le soja dessus, cette légumineuse donne le produit cultivé et en même temps enrichit le sol. De sorte que quand vous finissez de récolter, retient-il, au lieu de brûler, vous laissez et cela enrichit le sol.
Entre l’utilisation des engrais et la méthode naturelle, le conseiller technique à la gestion durable retient qu’il n’est pas interdit d’utiliser l’engrais mais de savoir comment en faire usage. Il explique qu’il y a des zones où l’on peut faire usage de l’engrais et rien avoir parce que le sol est mort. Car, le sol a besoin d’une certaine quantité de matière organique pour bien réagir dans certaines conditions, avant que l’engrais ne fonctionne.
Dans le cadre de la gestion intégrée de la fertilité de sols, on combine les deux, à savoir matière organique et engrais, cela donne d’excellents résultats», conseille-t-il. Le problème qui se pose, nuance le technicien, est de disposer de moyens pour avoir les engrais. «Il faut un mécanisme de financement pour disposer des intrants et faire les combinaisons», rappelle-t-il
Malheureusement, aujourd’hui, c’est beaucoup plus le coton qui est bien côté et mis en exergue dans le cadre du mécanisme d’apport d’engrais, retient l’ancien officier.
«Il faut maintenant essayer de mettre les engrais spécifiques à la portée des paysans pour les soutenir. Le leur offrir afin qu’ils se le procurent à un prix acceptable pour leurs activités. Ce qui va permettre d’utiliser cette méthode pour évoluer», préconise l’ancien officier.
Nous ne devons plus parler de l’agriculture extensive, conseille le technicien, parce que, observe-t-il, il faut maintenant aller à l’agriculture intensive. «L’agriculture intensive va nous permettre de bien gérer nos sols, car si on fait de l’extension, quand on finit quelque part, on continue alors que la population s’accroit au fil des ans, de sorte que dans 10, 20, 30 et 40 ans, c’est la même superficie qu’on aura. Il convient dès lors qu’on réfléchisse sur notre agriculture pour voir comment y évoluer afin de continuer à nourrir nos populations», conçoit l’ancien officier.