Dans un futur pas si lointain, il sera agréable de naviguer sur le lac Nokoué et la lagune de Porto-Novo et de profiter d'une vue attrayante sur le milieu lacustre. « La destination, on la connaît maintenant. Il faut que la vision soit partagée », réagit à chaud Yvonne Adjovi-Boco, conseillère technique à l'écocitoyenneté et à la déconcentration du ministre du Cadre de vie et des Transports. Elle réagissait ainsi au Plan d'actions présenté par Erik Zigterman et Belfrid Djihouessi de Royal HaskonningDhV & Cowi Netics lors de l'atelier de restitution et validation des études de préfaisabilité technique, économique et financière du projet de réhabilitation du lac Nokoué, les 27 et 29 juin 2023. En effet, lancées le 16 décembre 2021, les études de faisabilité technique, économique et financière dudit projet aboutissent à une vision claire et à un plan d'actions présentés et débattus à cette occasion avec les membres du comité de pilotage, les représentants des ministères sectoriels et des personnes-ressources. Pour le directeur général de l'Environnement et du Climat, Prof. Martin Pépin Aïna, la tâche est immense et primordiale. « Pendant dix-huit mois, sans relâche, nous avons travaillé avec toutes les parties prenantes pour formuler des propositions techniques et des conclusions pertinentes à soumettre aux autorités, sous le regard vigilant du comité de pilotage », souligne le professeur Aïna, qui préside également le comité de pilotage.
Un diagnostic approfondi
Les travaux de terrain et de laboratoire du consultant international ainsi que du consortium béninois de laboratoires de recherche universitaire ont été présentés. Pour le lac Nokoué, on estime à plus de 2 cm par an la vitesse de sédimentation au cours des 40 dernières années. Cette sédimentation entraîne une diminution de la capacité de stockage de l'eau ; ce qui réduit l'autoépuration du plan d'eau, affaiblit la productivité aquatique et entrave le transport fluvial. Le déboisement incontrôlé dans le bassin versant en amont augmente aussi le transport des sédiments déposés dans les plans d'eau en aval. La profondeur actuelle des plans d'eau est insuffisante, limitant ainsi le tirant des bateaux à 1 ou 2 mètres. L'option logique serait la construction de chenaux de navigation entre les ports/embarcadères importants, ce qui nécessiterait un dragage à une profondeur de 4 mètres ou plus. L'expansion des surfaces occupées par les acadjas entraîne également une augmentation de la production de matière organique, ce qui accentue l'eutrophisation, réduit le taux d'oxygène et diminue la transparence moyenne de l'eau des lacs.
Près de 400 milliards de Fcfa à mobiliser
Le plan d'investissement est d’ores et déjà élaboré et a été présenté par le directeur général de l'Agence pour le Développement intégré de la zone economique du lac Ahémé et ses chenaux (Adelac). Il faudra à peu près 400 milliards F Cfa sur une période de quinze ans pour la mise en œuvre des actions prévues dans les trois domaines : le développement du transport fluvio lacustre et lagunaire, le développement des berges et des bas-fonds, ainsi que la promotion de la production halieutique, de l'écologie et du tourisme. Les parties prenantes suggèrent qu’une priorité soit donnée à la construction de chenaux de navigation plus profonds entre la frontière du Nigéria, Porto Novo, Cotonou et Abomey-Calavi, ainsi qu'à la modernisation des embarcadères et à la création de ports lacustres. Dans tous les cas, le dragage du lac sera nécessaire pour augmenter le volume d'eau et la capacité d'autoépuration du plan d'eau, ainsi que pour accroître le tirant d'eau en vue du développement du transport lacustre. « Les trois domaines ont en commun le dragage, qui permettra d'atteindre un tirant d'eau nécessaire, de mobiliser les matériaux nécessaires pour les remblais, d'assurer une meilleure circulation et qualité de l'eau, et de restaurer la biodiversité. Ce dragage sera réalisé de manière sélective, en respectant un rythme permettant à l'écologie de se régénérer naturellement. Les parties prenantes reconnaissent que cette activité aura un impact positif », souligne Belfrid Djihouessi. Il est également envisagé d'assainir le lac, d’enlever les acadjas et de les remplacer par des installations d'aquaculture modernes, de restaurer la biodiversité et de valoriser les berges. « Les différents plans proposés contribuent à l'assainissement du plan d'eau », ajoute-t-il. Tout cela nécessite des moyens. L'Agence néerlandaise Invest International s'est déjà engagée dans le projet, par le biais d'un mémorandum d'entente avec le Bénin, pour un financement de 30 millions d'euros sous forme de don et de 30 millions d'euros sous forme de prêt concessionnel, soit un financement total disponible de 60 millions d'euros. Le projet va pouvoir passer à une autre phase les prochaines semaines, notamment l’assainissement du plan d’eau ■