La Nation Bénin...
Depuis
le gel des financements américains décidé par l’administration Trump en janvier
2025, l’Organisation internationale pour les Migrations (Oim), agence onusienne
clé dans la gestion des crises migratoires, traverse une crise profonde.
Principal bailleur, les États-Unis couvraient plus de 40 % de son budget
annuel. Cette dépendance a rendu l’organisation particulièrement vulnérable et
a immédiatement provoqué des licenciements massifs ainsi que la suspension de nombreux programmes
essentiels. Sans solutions rapides et durables, des millions de migrants et de
déplacés risquent de se retrouver sans assistance, aggravant les crises humanitaires
mondiales.
Depuis l’annonce du gel, environ 6 000 sur les 22 000 personnes employées dans le monde, ont perdu leur emploi, plongeant l’organisation dans une situation sociale et opérationnelle critique. D’autres suppressions de postes sont attendues, notamment au siège de Genève (Suisse) où un tiers des effectifs (1000 personnes) pourraient être concernés dans les prochains mois. Par ailleurs, le gel du financement a entraîné la réduction ou la suspension de nombreux programmes essentiels, comme l’aide au retour volontaire des migrants en Amérique latine, compromettant l’assistance apportée à des populations parmi les plus vulnérables.
Critiques et peur
La
crise financière a également provoqué une crise de confiance et de gouvernance
au sein de l’organisation. Plusieurs employés, qu’ils soient encore en poste ou
récemment licenciés, reprochent à la direction de s’aligner trop étroitement
sur les priorités de la nouvelle administration américaine, notamment à travers
le programme d’aide au retour volontaire, perçu comme une caution à la
politique d’expulsion menée par les États-Unis.
De
plus, des critiques ont émergé concernant la suppression ou la modification de
contenus liés à la diversité, l’égalité et l’inclusion sur les plateformes
officielles de l’Oim, dans un contexte où ces valeurs sont contestées par
l’administration Trump. Le climat interne est désormais marqué par la peur,
l’incertitude et la colère, face à la brutalité des licenciements et à la
pression exercée sur les managers pour atteindre les objectifs de réduction des
coûts.
Direction américaine par tradition
La situation actuelle est d’autant plus sensible que, par tradition, l’Oim est dirigée par un ressortissant américain, une pratique quasi ininterrompue depuis la création de l’organisation en 1951. L’actuelle directrice générale, Amy Pope, a été élue en 2023 après avoir mené une campagne très soutenue, bénéficiant d’un fort appui de la Maison-Blanche et du président Joe Biden, dont elle était auparavant une proche conseillère. Première femme à diriger l’organisation, Amy Pope dont l’expertise est unanimement reconnue, avait affiché l’ambition de promouvoir une migration respectueuse des droits humains. La crise actuelle met à l’épreuve sa capacité à maintenir l’équilibre entre les intérêts des États membres et la survie opérationnelle de l’Oim.
Recherche de fonds
De
nombreux appels ont été lancés pour trouver de nouveaux donateurs pour combler
le vide laissé par les États-Unis, certains plaidant même pour un « Plan
Marshall » afin de sauver la Genève internationale et ses institutions. La
crise actuelle pose la question de la diversification des sources de
financement et de la résilience du système onusien. La réponse de la communauté
internationale dans les prochains mois sera déterminante pour l’avenir de
l’organisation et la survie de nombreux programmes vitaux.
Catherine Fiankan-Bokonga