La Nation Bénin...
Il
n’est jamais trop tard pour savoir lire et écrire. Du lundi au jeudi à l’école
Moridja, Patrice Kodjo Hounga, directeur du centre d’alphabétisation Fon et
Français, aide de courageux élèves qui ont arrêté l’école trop tôt, à améliorer
leur niveau de connaissance à travers l’enseignement du fon, du français ou de
l’anglais.
A
20 h, l’école primaire Moridja est silencieuse et les élèves sont déjà rentrés
chez eux. Tous ? Non. Des apprenants sont encore là pour bénéficier des leçons
de Patrice Kodjo Hounga, directeur du centre d’alphabétisation Fon et Français.
Ce
professeur tenace donne des cours destinés à tous les publics: jeunes et
adultes. L’objectif est de faire de l’apprentissage des langues une arme pour
reprendre le contrôle de leur parcours scolaire. A l’image de ces élèves qui
reviennent à l’école pour avancer dans leur vie, cet ancien enseignant de cours
primaire a repris l’université il y a quelques années pour devenir professeur
d’anglais. Il continue néanmoins de mettre à profit son expérience en tant
qu’enseignant avec des cours du soir qu’il dispense depuis 3 ans à ceux qui en
ont besoin. «L’initiative de donner des cours du soir en anglais, en français
et en fon est venue d’un rêve et aussi d’un besoin que j’ai senti sur le
terrain. J’ai constaté que beaucoup de personnes ne maîtrisent pas bien le
français, ne savent pas parler le français alors qu’ils ont le désir de
s’exprimer. Du fait qu’ils ne connaissent pas les lettres, l’alphabet, ça ne
leur permet pas de s’exprimer correctement ou bien ils s’expriment avec des
erreurs », déclare-t-il.
Monsieur Hounga s’attaque à un problème important dans la société béninoise. Le taux d’analphabétisme chez les personnes de 24 ans et plus avoisine en effet les 48 % pour les hommes et 57 % pour les femmes, selon le rapport de synthèse de l’Enquête régionale intégrée sur l’emploi et le secteur informel (Eri-Esi) en 2018. La définition retenue à la Conférence internationale sur l’éducation des adultes définit l’alphabétisation comme l’ensemble des processus d’apprentissage formel et non-formel grâce auquel les individus jeunes ou adultes, hommes et femmes, apprennent à lire, écrire, calculer par écrit et enrichissent leurs connaissances. A la lumière de cette définition, toute personne qui ne peut pas lire ou écrire en français ou en langue nationale est donc considérée comme analphabète. Alors que l’alphabétisation favorise l’autonomisation des individus, le fait de ne pas savoir lire et écrire rend plus vulnérable à la précarité économique, à la manipulation et à l’exclusion sociale.
Cursus
En
outre, les apprenants qui bénéficient de ces cours en ont souvent besoin pour
évoluer sur le plan professionnel, ainsi que sur le plan personnel. C’est le
cas de Mariette Donou, 19 ans, qui suit les cours depuis 3 ans et va passer son
Certificat d’études primaires (Cep). C’est en voyant les autres parler français
qu’elle a cherché à les suivre. De son côté, Saïdadou Alidou, 22 ans, déclare:
« C’était mon rêve. J’avais envie de faire ça mais mes parents n’avaient pas
les moyens pour m’inscrire alors, j’ai décidé de me débrouiller». Comme
Saïdadou Alidou, c’est parfois la barrière financière ou bien des problèmes
familiaux qui empêchent les enfants d’aller à l’école.
Pour
cela, Patrice Kodjo Hounga propose des cours de tous les niveaux en français.
Cela va du Cours initial (Ci) en Terminale, avec une attention particulière
pour les examens tels que le Brevet d’Études du Premier Cycle (Bepc) et le
Baccalauréat. « L’objectif à atteindre en misant sur les classes d’examen, est
de permettre à tous ceux-là qui n’ont pu décrocher les diplômes académiques
pour différentes raisons, de passer à nouveau leurs examens », souligne le
professeur.
La
langue est un outil important pour le développement durable d’une nation.
Savoir exprimer sa pensée en français ou dans sa langue maternelle est une
richesse inestimable.
D’autres programmes pour promouvoir la langue “fon” existent un peu partout sur le territoire mais toutes les zones ne sont pas couvertes. C’est pour cela que des initiatives personnelles comme celle de Patrice Kodjo Hounga sont si importantes, pour tous les jeunes et adultes béninois avides de savoir.