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Poursuivi pour faux et usage de faux en écriture publique et escroquerie :Cajus Agonhossou condamné à 12 mois avec sursis et acquitté pour la 2e infraction (22e dossier)

Société
Par   Didier Pascal DOGUE, le 07 avr. 2015 à 05h39

C’est une affaire qualifiée de faux et usage de faux en écriture publique et escroquerie qui a alimenté jeudi 2 avril dernier les débats de la Cour d’assises de la Cour d’appel de Cotonou lors de l’étude de son 22e dossier. La formation qui en a connu était présidée par Damienne Dossa Lima. Les assesseurs avaient noms, Célestine Bakpé et Thérèse Kossou. Pascal A . Adjiwanou, Désiré D. Gbedehessi, Louise O. Hounmènou et Chantal B. Houessinon ont siégé en tant que jurés ; le greffier d’audience était Edouard Zavonon et le ministère public représenté par Julien Tiamou.

Les faits de faux et usage de faux en écriture publique et d’escroquerie déférés devant la cour jeudi 2 avril dernier, ont été disqualifiés en délit de fausse attestation. L’accusé Cajus Agonhossou a été condamné à 12 mois d’emprisonnement assortis de sursis et à 200 000 F CFA d’amende.
En ce qui concerne l’escroquerie, il a été acquitté pour infraction non constituée. Les frais ont été mis à la charge du trésor public.
Les faits qui fondent la procédure remontent à 2008. C’est en cette année que dame Rosaline Adjignon a souscrit auprès d’une société de promotion immobilière pour l’acquisition de deux parcelles à Hèvié dans la commune d’Abomey-Calavi, pour un montant de
1 400 000 F CFA.
Courant 2008, alors qu’elle venait de solder son compte, dame Rosaline Adjignon a eu la désagréable surprise de constater que les promoteurs de ladite société ont disparu sans lui avoir délivré ses conventions de vente.
Elle a alors sollicité l’aide du nommé Cajus Agonhossou qui a vécu la même situation qu’elle auparavant et qui avait obtenu satisfaction. Cajus Agonhossou a accepté sans hésiter et aurait fait appel à Eric Koubasso qui serait le directeur commercial de l’agence immobilière. Ainsi, ces deux personnes ont exigé de dame Rosaline Adjignon, le paiement de 400 000 F CFA pour lui établir les conventions, après lui avoir pris 25 000 F CFA pour les vérifications au répertoire. Deux semaines plus tard, Cajus Agonhossou a annoncé à dame Rosaline Adjignon la mort accidentelle de Eric Koubasso. Après avoir perçu la somme exigée, Cajus Agonhossou a remis à dame Rosaline Adjignon, les actes de vente revêtus des cachets et signatures du chef du village.
Désormais munie de ses documents, dame Rosaline Adjignon a entrepris de construire lorsqu’elle a été contrainte d’arrêter les travaux, la parcelle étant devenue litigeuse. Des investigations menées lui ont permis de se rendre compte que les conventions remises par Cajus Agonhossou se sont révélées porteuses de faux cachet et signature de l’autorité locale.
Par ailleurs, le nommé Cajus Agonhossou aurait illégalement réussi à soutirer à dame Rosaline Adjignon, la somme de
100 000 F CFA, lui faisant croire qu’il pouvait l’aider à obtenir un crédit bancaire.
Interpellé sur ces faits et inculpé de faux et usage de faux en écriture publique et escroquerie, Cajus Agonhossou n’a pas reconnu les faits mis à sa charge. Le bulletin n°1 du casier judiciaire de l’accusé ne porte mention d’aucune condamnation antérieure. Le rapport psychiatrique ne relève aucun trouble mental au moment des faits. Voilà le résumé tel que présenté par Damienne Dossa Lima.

De faux documents

Cajus Agonhossou, à la barre, a expliqué que c’est par le biais de son épouse, qu’il a connu Rosaline Adjignon, les trois partageant la même confession religieuse. Ses explications n’ont pas convaincu la présidente qui a exigé qu’il retrace exactement ce qui s’est effectivement passé et s’est interrogée s’il n’avait pas conscience qu’il remettait à dame Rosaline Adjignon de faux documents. Ce que l’accusé conteste.
Face aux questions du ministère public relativement aux chefs d’accusation de faux et usage de faux et d’escroquerie qui lui sont reprochés, Cajus Agonhossou dit ne pas les reconnaître.
Comparaissant comme témoin, l’ancien délégué de Hèvié, Joseph A. Azimagba a déclaré reconnaître l’authenticité de l’imprimé, mais assure ne pas certifier le cachet, encore moins les signatures. La présidente lui a fait signer séance tenante sur du papier blanc pour viser, afin de comparer cette signature avec celle qui figure au dossier de la cour.
Lors de la confrontation chef de village-accusé, relativement à la contestation de l’authenticité des signatures, Cajus Agonhossou a confié que c’est Eric Koubasso qui s’est chargé des formalités et que le faux relevé ne lui serait pas imputable.
C’est alors que la partie civile, dame Rosaline Adjignon expliquant ce qu’elle en sait, a déclaré avoir acquis une parcelle auprès de la société dans laquelle Eric Koubasso travaillait. C’est à cette occasion que Cajus Agonhossou s’est offert pour l’aider à faire les courses afin d’avoir les papiers d’achat, parce qu’ayant aussi acquis une parcelle auprès de la même structure. Elle a confié que c’est quand elle a soldé les sous réclamés en vue des formalités, qu’elle s’est portée sur le domaine acquis pour le forage de puits. C’est en ce moment, précise-t-elle, qu’il lui a été signifié d’arrêter les travaux parce que la parcelle ne lui appartiendrait pas. Elle s’est donc lancée dans les démarches pour disposer de papiers authentiques. Elle a déclaré avoir versé, à ce titre, 525 000 F CFA à Cajus Agonhossou qui les lui a réclamés. Mais l’accusé n’a reconnu avoir encaissé de ses mains que 300 000 F CFA pour lesquels il déclare avoir délivré décharge. Ainsi après ces explications et la lecture des pièces, Julien Tiamou a pris la parole pour ses réquisitions.
Sur ce volet, le ministère public, Julien Tiamou a soutenu que la dénégation systématique ne peut résister à l’analyse des faits de faux et usage de faux et d’escroquerie prévus et punis par les articles, 146, 147 et 405 du Code pénal. Ainsi, pour lui, l’accusé était conscient qu’il proposait de faux documents à celle qu’il prétendait aider. Il a donc indiqué à la cour de retenir sa responsabilité pour les chefs d’accusation retenus contre lui.

Les manœuvres frauduleuses

Par rapport au faux et usage de faux, il a indiqué qu’il s’agit de l’altération frauduleuse de la vérité dans un écrit, de la falsification d’un document. D’ailleurs, relève-t-il, le témoin a confirmé que ce n’est pas sa signature ni le cachet qu’il a l’habitude d’utiliser pour certifier ou signer les dossiers ; dès lors le faux est établi, retient-il. Au moment où la convention a été signée, le délégué n’était plus en fonction et c’est en connaissance de cause qu’il a fait des propositions à la dame, a déduit Julien Tiamou. Il y a eu des manœuvres frauduleuses qui induisent l’escroquerie ; notamment explique-t-il, les conventions établies sont fausses ; l’escroquerie suppose la mauvaise foi, l’intention qu’on a de tromper : les deux infractions sont constituées, conclut-il.
«L’accusé a restitué les sous mais cela n’arrête pas la poursuite ; c’est un faussaire, la dame est de bonne foi ; l’imputabilité des faits est irrévocable ; il ne sera pas question de parler de doute s’il a signé ou pas», développe-t-il par ailleurs. L’enquête de moralité a retenu qu’il est spécialisé en contrefaçon de convention de vente ; quand on fait du bien on ne le retourne pas par le mal, a-t-il expliqué avant de retenir que c’est inopérant. «Je requiers que Cajus Agonhossou est coupable de faux et usage de faux et escroquerie, de le condamner à 15 ans de travaux forcés et ce sera justice», a retenu Julien Tiamou. Ce qui a suscité la réaction de la défense représentée par Me Sakariyaou Nourou Guiwa.
«J’ai de la peine, car je ne sais pas où commencer alors qu’il y a beaucoup à dire pour 15 ans de travaux forcés», s’est exclamé la défense. Pour lui, Cajus Agonhossou était poursuivi pour fausse attestation. Le ministère public ne m’a pas convaincu techniquement, a-t-il confié. «Mon client n’est pas l’auteur de la contrefaçon ; les contradictions de la partie civile, ses revirements en disent long», a-t-il insisté.
Me Sakariyaou Nourou Guiwa a procédé à un bref rappel des faits et selon sa lecture du dossier, Eric Koubasso, directeur commercial de la société Crédit meubles et travaux publics a été appelé à la rescousse.
La défense a déploré que par un jeu de requalification, son client soit poursuivi pour faux et usage de faux en écriture publique alors qu’il avait déjà été reconnu coupable de fausse attestation. Pourtant, a-t-il fait remarquer, nous sommes plutôt en présence d’une convention sous seing privé et on parle de faux en écriture publique. «Je plaide l’inapplicabilité des dispositions de l’article 147 du Code pénal à mon client ; il n’est pas fonctionnaire d’Etat et ce n’est pas un acte authentique, c’est un acte sous seing privé», insiste-t-il. Et Me Sakariyaou Nourou Guiwa de poursuivre que la doctrine enseigne qu’il y a le faux en écriture de commerce et elle parle de faux en écriture de banque s’il s’agit de faux relatifs à ces matières. Cajus Agonhossou n’est pas un agent de l’Etat et cette disposition que vous suggère le ministère public ne tient pas la route, relève par ailleurs la défense.
Le tribunal d’Abomey-Calavi a déjà réglé le problème en parlant de fausse attestation. Et il cite le "Vocabulaire juridique" portant les griffes de Gérard Cornu Association Henri Capitant.

Disqualifier et requalifier

«La preuve n’est pas rapportée que c’est lui qui a signé ; il n’y a pas eu de faux ; donc il y a doute et le doute profite à l’accusé ; je sollicite que vous disqualifiez l’infraction avant de la requalifier, car il n’a pas pu falsifier, n’a pas pu imiter une quelconque signature, encore faudra-t-il vérifier», insiste-t-il.
Relativement à l’escroquerie, développe-t-il, cela suppose une fausse qualité. Or, le plan d’affaires dont il est question n’existe pas au dossier. «Nous sommes en matière pénale et l’application des textes est d’interprétation stricte. Je sollicite l’acquittement pur et simple pour infraction non constituée et vous aurez rendu justice et vous nous aurez épargné des erreurs judiciaires», fait-il observer.
La cour s’est retirée et après délibérations, elle a fondé sa décision non pas sur les articles 147, 148 et 405 du Code pénal. Les faits déférés s’analysent, selon elle, en fausse attestation. Elle a donc décidé de disqualifier les faits en délit de fausse attestation sur la base de l’article 161 al 1 du Code pénal et a condamné Cajus Agonhossou à 12 mois d’emprisonnement assortis de sursis et 200 000 F CFA de dommages et intérêts.
Mais en ce qui concerne le deuxième chef d’accusation, la cour l’a acquitté pour délit non constitué.
Statuant sur les intérêts civils, la cour demande à dame Rosaline Adjignon ce qu’elle réclame pour préjudices subis. Elle a demandé cinq millions. La cour lui explique qu’elle a été saisie pour une infraction pénale et non pour une affaire de litige domanial. Elle fut priée de réfléchir pour se prononcer, afin de réajuster ses prétentions. Mais elle persiste sur cette demande.
Le ministère public requiert de lui donner acte de sa constitution et de la débouter de ses prétentions, ces dernières n’ayant aucun fondement. Surtout, relève le ministère public qu’elle a reconnu avoir déjà été remboursée par l’accusé.
La défense quant à elle fera siennes ces réquisitions et trouve que ce sera justice.
Délibérant, la cour l’a reçue en sa constitution de partie civile, l’a déboutée de ses prétentions de cinq millions de francs de dommages intérêts