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Face aux importations massives de viande de volailles et aux limites structurelles des filières agricoles, le Bénin engage un projet d’envergure pour sa souveraineté alimentaire. Soutenu par la Bad, le Programme de transformation de l’agriculture dans la zone des savanes (Protas) - phase 1 entend restructurer les chaînes de valeur du maïs, du soja et de la volaille.
Le Programme de transformation de l’agriculture dans la zone des savanes – phase 1 (Protas-P1) est initié par le gouvernement pour accroître durablement la production nationale de viande de volailles répondant aux normes, par l’intégration des chaînes de valeur du maïs, du soja et de la volaille. L’objectif est de réduire la dépendance aux importations et de renforcer la souveraineté alimentaire, tout en améliorant la sécurité nutritionnelle et les revenus des acteurs ruraux.
La mise en œuvre du projet est prévue de janvier 2026 à décembre 2030, selon une approche progressive destinée à aligner la montée en puissance de la production avicole sur la disponibilité locale des intrants agricoles. Son coût total est estimé à 98,76 millions d’unités de compte, soit environ 76,06 milliards F Cfa, d’après le Rapport d’évaluation du projet publié par la Banque africaine de développement (Bad). Le financement est assuré principalement par un prêt de cette dernière pour un montant de 86,99 millions d’unités de compte soit environ 67 milliards F Cfa, complété par une contribution de l’Etat béninois et des bénéficiaires à hauteur de 11,77 millions d’unités de compte, soit environ 9,06 milliards F Cfa. Le 10 décembre dernier, le Conseil d’administration de la Banque a approuvé le prêt de 102,12 millions d’euros, soit environ 67 milliards F Cfa, en faveur du Bénin pour la mise en œuvre de la première phase du programme.
Trois composantes
Le Protas-1 s’articule autour de trois composantes complémentaires. La première est consacrée à la production et à la productivité résilientes au changement climatique et vise l’intensification durable de 120 000 hectares de maïs et de 80 000 hectares de soja, la promotion de pratiques agroécologiques, la mécanisation agricole et le développement de l’aviculture commerciale. Elle prévoit notamment la mise en place de couvoirs, de fermes avicoles, de poulaillers modernes et de systèmes d’irrigation alimentés par l’énergie solaire.
La deuxième composante porte sur le développement des chaînes de valeur, avec un accent mis sur le stockage, la transformation, la commercialisation et la structuration des acteurs. Elle comprend la construction de magasins de stockage, l’installation d’abattoirs de volailles, la mise en place d’unités de transformation et de plateformes digitales d’information sur les marchés, ainsi que l’appui aux partenariats productifs entre producteurs, transformateurs et acteurs financiers.
La troisième composante est dédiée à la gestion et à la coordination du projet. Elle couvre le suivi-évaluation, la gouvernance, la gestion financière, ainsi que la mise en œuvre des sauvegardes environnementales, sociales et climatiques, avec une attention particulière portée à l’intégration du genre et à la participation des jeunes.
Impacts attendus
Les analyses financière et économique réalisées par la Banque africaine de développement concluent à une rentabilité significative du projet. A partir de la cinquième année d’exploitation prévue sur 20 ans, le Protas-P1 devrait générer un impact financier annuel estimé à 6,1 milliards F Cfa, avec un ratio avantages-coûts de 2,03 et un taux de rentabilité interne supérieur au coût d’opportunité du capital, selon le rapport d’évaluation du projet.
Le programme devrait toucher environ 50 000 bénéficiaires directs et près de 500 000 bénéficiaires indirects dans la zone des savanes, dont au moins 30 % de femmes. Il ambitionne de créer des emplois durables, de renforcer les revenus agricoles, d’améliorer l’accès aux protéines animales et de contribuer à la stabilisation des populations rurales. Sur le plan environnemental, le projet est conçu pour renforcer la résilience climatique des systèmes de production et réduire l’empreinte carbone de l’aviculture, notamment par l’amélioration de la productivité et la promotion de pratiques durables.
A terme, le Protas-P1 se veut un levier structurant pour la transformation agricole du nord du Bénin. En misant sur l’intégration des filières maïs, soja et volaille, il ambitionne de poser les bases d’une agro-industrie plus compétitive, résiliente et créatrice de valeur locale, au service de la souveraineté alimentaire et du développement inclusif.
Face au défi de l’insécurité alimentaire
Pilier de l’économie béninoise, l’agriculture a contribué à près de 25,9 % du produit intérieur brut (Pib) en 2024 et représenté plus des deux tiers des recettes d’exportation (67,2 %), selon l’Institut national de la statistique et de la démographie (Instad). Malgré ce poids, la balance commerciale agricole demeure structurellement déficitaire, avec un déficit estimé à 116,68 milliards F Cfa en 2024, tandis que le pays continue d’importer massivement de la viande de volailles, à hauteur d’environ 100 000 tonnes par an, d’après la même source.
Le maïs et le soja sont des cultures vivrières à fort potentiel économique avec respectivement 2 094 824 tonnes et 652 454 tonnes produites en 2024 permettant de couvrir la demande nationale. Depuis 2024, l’exportation de soja brut est interdite. Le gouvernement a annoncé l’arrêt progressif dès 2023 des importations de poulets congelés et d’œufs de table, alors que la production atteignait à peine 11 835 tonnes de viande de volailles pour environ 100 000 tonnes de poulets congelés importés à destination du marché local mais aussi pour la réexportation.
Le Protas vient à point nommé pour réduire la pauvreté et stimuler l’économie rurale en renforçant les chaînes de valeur maïs, soja et volaille.
Le Protas soutient l'ambition du gouvernement béninois de faire de l'agriculture un moteur de croissance, de création de richesses et d'insertion professionnelle pour les jeunes