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Justice environnementale: Une marche citoyenne contre la pollution urbaine

Environnement
Dans une ambiance à la fois solennelle et combative, les marcheurs ont voulu  marquer les esprits et attirer l’attention des décideurs Dans une ambiance à la fois solennelle et combative, les marcheurs ont voulu marquer les esprits et attirer l’attention des décideurs

A Cotonou, la société civile se lève pour exiger un air plus sain. Samedi 24 mai dernier, à l’initiative de l’Ong “Health Access Initiative”, des centaines de citoyens ont battu le macadam pour dénoncer l’inaction de l’État face à la pollution industrielle persistante dans la zone de Ganhi. Une marche pacifique pour défendre le droit fondamental à un environnement sain.

Par   Isidore Gozo, le 26 mai 2025 à 07h03 Durée 3 min.
#environnement sain

En début de matinée, ce samedi 24 mai, des centaines de marcheurs se sont retrouvés devant l’église Notre-Dame de Cotonou, point de départ symbolique d’une mobilisation qui s’est dirigée vers l’esplanade de l’Amazone. Des pancartes brandies à bout de bras affichaient des messages explicites : « Justice pour nos poumons et pour la santé de l’environnement », ou encore « Stop à la pollution à Xwlacodji ». Dans une ambiance à la fois solennelle et combative, les marcheurs ont voulu marquer les esprits et attirer l’attention des décideurs sur le danger de la pollution dans cette zone.

Est notamment indexée une société productrice de ciment, installée depuis plus de deux décennies dans la zone commerciale de Ganhi, en contradiction avec les normes d’urbanisme. Selon Ange-Marie Essè, coordonnateur exécutif de Health Access Initiative, la situation perdure depuis 2001. « Une étude environnementale commanditée par l’État avait conclu à l’irrégularité de l’installation. La Cour constitutionnelle avait ordonné la délocalisation. Mais jusqu’à ce jour, rien n’a été fait », a-t-il déclaré. Pire encore, le gouvernement, sous l’administration actuelle, avait réaffirmé cette décision en Conseil des ministres en 2021, fixant un ultimatum à décembre 2022. «Pourtant, la société continue ses activités comme si de rien n’était », regrette le militant.

Face à cette situation, les organisateurs prévoient d’introduire un recours collectif en justice et de lancer une pétition visant à recueillir 10 000 signatures pour renforcer leur démarche. Daniel Gangbé, volontaire du projet, rappelle que cette marche n’est pas une contestation politique, mais un soutien aux décisions déjà prises par l’État. « Nous voulons montrer que nous soutenons les décisions des ministres et exiger leur application. Trop souvent, on voit des décisions appliquées avec rigueur contre les pauvres, mais quand il s’agit de grosses entreprises, tout est au ralenti », a-t-il lâché.

Doria Tchiakpè, citoyenne volontaire, a tenu à porter la voix féminine dans cette lutte. « En tant que femme, je parle au nom de toutes celles qui élèvent leurs enfants dans un environnement toxique. Ce combat, c’est pour notre santé, notre dignité, notre avenir », a-t-elle lancé.

Pour Samson Essè, président du Comité de veille citoyenne, cette mobilisation est un signal fort adressé à l’État. « Nous ne pouvons plus détourner le regard. La zone de Ganhi et la ville de Cotonou ne peuvent continuer à être sacrifiées. Nous demandons que la délocalisation de cette usine devienne enfin réalité », a-t-il plaidé. Il a insisté également sur la nécessité d’un contrôle citoyen renforcé, appuyé par les jeunes, les Osc, les médias et l’ensemble de la population. Les organisateurs promettent que cette marche n’est qu’un point de départ. D’autres actions sont prévues à savoir : des campagnes de sensibilisation communautaire,  la mobilisation numérique, des actions judiciaires et, éventuellement, des recours auprès d’instances régionales comme la Cedeao. L’enjeu est de taille : faire respecter les décisions de justice et protéger les populations de Cotonou des conséquences d’une pollution industrielle qui ronge lentement mais sûrement leur droit à un environnement sain.