La Nation Bénin...

Affaire de "faux médicaments": L'article 90 de la Constitution sauve momentanément le député Atao devant le juge

Société
Par   Thibaud C. NAGNONHOU, A/R Ouémé-Plateau, le 28 avr. 2018 à 07h30
[caption id="attachment_28982" align="alignnone" width="1024"]Deputé Atao Hinnouho[/caption]

A la surprise générale, le député Taofick Mohamed Hinnouho alias Atao qui a pris le maquis depuis le 8 décembre 2017 suite au déclenchement de l’affaire de « faux médicaments » dans laquelle il serait considéré comme étant le cerveau, est sorti de sa cachette, ce vendredi 27 avril.

Il s’est rendu de lui-même à la justice. Il était devant le premier cabinet d’instruction du tribunal de première instance de première classe de Cotonou en charge du dossier. Il a été auditionné par le juge qui l’a inculpé pour, entre autres infractions, « d’exercice illégal en pharmacie, vente de médicament falsifié, trafic de produits médicaux contrefaits, association de malfaiteurs, blanchiment de capitaux et faux en écriture privée et usage de faux en écriture privée ». Après le magistrat instructeur, Taofick Mohamed Hinnouho a été ensuite écouté par le juge des libertés et de la détention qui devrait décider de son incarcération ou non.

Ici, l’opérateur économique a frôlé la prison. Le juge n’a pu placer le député sous mandat de dépôt comme ce fut le cas avec ses co-prévenus dont les grossistes et autres répartiteurs de produits pharmaceutiques déjà condamnés par le tribunal à quatre ans d’emprisonnement ferme. Atao a raté la prison à cause de l’immunité parlementaire dont il jouit et qui nécessite la réalisation de certains préalables avant toute poursuite. En réalité, le juge des libertés et de la détention a buté sur l’article 90 de la Constitution du 11 décembre 1990 du Bénin.

Lequel dispose que : « Les membres de l’Assemblée nationale jouissent de l’immunité parlementaire. En conséquence, aucun député ne peut être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé à l’occasion des opinions ou votes émis par lui dans l’exercice de ses fonctions. Aucun député ne peut, pendant la durée des sessions, être poursuivi ou arrêté en matière criminelle ou correctionnelle qu’avec l’autorisation de l’Assemblée nationale, sauf cas de fragrant délit. Aucun député ne peut, hors session, être arrêté qu’avec l’autorisation du bureau de l’Assemblée nationale, sauf les cas du flagrant délit, de poursuite autorisée ou de condamnation définitive. La détention ou la poursuite d’un député est suspendue si l’Assemblée nationale le requiert par un vote à la majorité des deux tiers ».

Les dispositions de cet article 90 de la Constitution du 11 décembre 1990 ont été d’ailleurs soulevées devant la justice par l’avocat du député de la 15e circonscription électorale pour plaider la libération de son client. Le juge des libertés et de la détention a donné raison à la défense qu’à l’étape actuelle de procédure il ne peut jeter Atao en prison n’ayant pas au dossier la décision du bureau ou de l’Assemblée nationale qui autorisent la poursuite du député mis en cause. Le député Atao est donc rentré chez lui libre de ses mouvements en attendant certainement l’issue de l’examen de la demande de levée d’immunité parlementaire déjà introduite contre lui au Parlement par le parquet général près la Cour d’appel de Cotonou via le ministre chargé de la Justice. C’est donc une victoire judiciaire partielle pour Mohamed Atao Hinnouho. Son avocat, Me Alfred Boccovo, en est d’ailleurs conscient que son client est libre certes, mais n’est pas pour autant sorti définitivement d’affaire. « Les poursuites ne sont pas arrêtées. On reviendra devant la justice quand l'Assemblée aura dit son mot. », conclut l’avocat au barreau de Cotonou.