La Nation Bénin...
La tradition, l’extrême pauvreté et la méconnaissance des conséquences découlant du mariage précoce sont quelques-uns des facteurs qui expliquent encore le mariage des enfants au Bénin. Un phénomène qui brise pourtant la vie des enfants.
La commémoration de la Journée de l’enfant africain a démarré cette année à Johannesburg, en Afrique du Sud. Le thème retenu dans ce cadre est intitulé, «25 ans après l’adoption de la Charte africaine des enfants: accélérons nos efforts pour mettre fin au mariage des enfants en Afrique». Si l’Union Africaine a fait l’option de démarrer les activités dans ce pays précédemment soumis au phénomène de l’apartheid, c’est sans doute pour rappeler à chaque famille, communauté, confession religieuse, institution, autorité administrative et politique, Organisations de la Société civile… qu’elles doivent travailler en synergie pour enrayer toutes autres formes d’apartheid qui résisteraient aux temps modernes puisque les violences faites aux enfants sont quelque peu comparables à la pratique de l’apartheid. Au nombre desdites violences, le mariage des enfants figure en bonne place.
Il se caractérise par des mariages forcés, contre l’échange de biens ou d’une somme d’argent et par enlèvement.
Une étude réalisée en 2008 sur la violence à caractère sexiste menée dans 13 communes du Bénin indiquait que 23% des 594 enfants interrogés avaient été objet de mariages forcés ou précoces. Dans le cas des mariages forcés, la tradition veut que le futur époux enlève et viole sa future épouse mineure.
Causes traditionnelles
«Cette pratique est très répandue dans les régions rurales malgré les efforts du gouvernement et des ONG pour l’éradiquer au moyen de séances d’information sur les droits de la femme et de l’enfant», se désole le président du collectif des OSC, Norbert Fanou Ako.Le phénomène puise ses racines dans des pratiques traditionnelles ancrées dans les habitudes de certaines communautés, dans la pression de l’autorité parentale de dénier à l’enfant la liberté et le temps de choisir librement son époux ou épouse, a-t-il expliqué. Il y a également la pauvreté extrême qui sévit au sein de certaines familles nombreuses et qui pousse les géniteurs à imposer à leurs enfants mineurs un époux portant des signes extérieurs de richesse. Certaines communautés méconnaissent également les conséquences découlant du mariage des enfants qui peuvent aller jusqu’au suicide.
Ce phénomène assez fréquent dans le rang des filles n’épargne pas les garçons. Certaines traditions ont instauré des normes sociales qui autorisent des familles à conclure entre elles des mariages entre leurs enfants mineurs sans leur consentement dans le but de renforcer les liens de sang, disent-elles, ou pour s’assurer d’un meilleur placement de leurs filles auprès d’une famille supposée nantie. De ce fait, « des jeunes garçons encore élèves dans certaines régions pour répondre à la tradition deviennent des époux prématurés des femmes souvent plus âgées qu’eux, héritées parfois d’un frère ou d’un parent décédé», dénonce encore le président du collectif des OSC. Les conséquences en sont nombreuses. Mais il est essentiel de savoir que les mariages d’enfants privent un nombre considérable de filles et de garçons du droit de vivre une vie saine et épanouie, il renforce le cycle de la pauvreté et empêche les filles d’aller à l’école et de recevoir une éducation élémentaire et secondaire.
Que faire ?
Sans une action intensive et soutenue de tous les acteurs de défense et de protection des droits de l’enfant à divers niveaux, «des centaines de millions de filles subiront des dommages totalement inutiles et profondément irréversibles», prévient Norbert Fanou Ako.
Si des pays africains tels que l’Ethiopie, le Tchad, la République démocratique du Congo, le Niger et le Madagascar ont lancé la campagne pour mettre fin au mariage des enfants, en tant qu’acte injuste, et ceci en répondant ainsi à la campagne continentale lancée par l’Union africaine à tous les gouvernements africains, le Bénin peut aussi se guérir de ce mal. Ceci passe par «un dialogue politique autour d’une dynamique nationale dans laquelle les organisations de la société civile toujours présentes dans les actions de proximité amèneront le gouvernement et les parties prenantes à travailler en synergie pour mettre fin à tout acte de violence qui viole les droits de l’homme et particulièrement ceux de l’enfant», propose Norbert Fanou Ako.