Hémophilie: Une maladie génétique peu connue
Santé
Par
Isidore Alexis GOZO (gozoalexis6@gmail.com), le 06 mai 2021
à
09h15
Douleurs articulaires, saignements internes ou externes, les sujets atteints de l’hémophilie n’ont pas une existence normale. Caractérisée par une anomalie de la coagulation du sang, cette maladie génétique, peu connue du public, touche plus les personnes de sexe masculin et entraîne parfois la mort si elle n’est pas vite diagnostiquée. Les hémophiles au tréfonds de leur douleur ne demandent qu’une seule chose, de meilleurs traitements.
« La seule chose qui me perturbe est l’hémorragie interne. Lorsque je commence par sentir des douleurs, je viens dans ce centre et les médecins m’injectent du plasma et du sang. Arrivé à la maison, je continue le traitement à base des plantes pour pouvoir me retrouver.
A chaque fois, ils me recommandent l’hospitalisation. Or moi je ne suis pas prêt puisque je n’ai pas les moyens », confie Charles-le-bon B., un hémophile rencontré dans une salle d’hospitalisation du service Hématologie du Centre national hospitalier universitaire Hubert Koutoukou Maga de Cotonou, une unité de prise en charge de l’hémophilie et des autres maladies hémorragiques.
Dans ce centre de référence, les médecins au nombre de six, sous la direction du professeur Dorothée Akoko Kindé Gazard, reçoivent tous les jours des malades souffrant de l’hémophilie.
Tous prennent en charge les hémophiles ainsi que les maladies du sang avec les moyens mis à leur disposition. Charles-le-bon B. a été diagnostiqué hémophile en 2015 à l’âge de 17 ans. Il a alors été hospitalisé au Cnhu de Cotonou.
Charles-le-bon B. vit avec son frère et leurs parents. Ils se débrouillent pour subvenir à leurs besoins. « Nous ne bénéficions d’aucun soutien. Nous nous débrouillons pour pouvoir nous en sortir. Dès que je me retrouve à l’hôpital, c’est mon petit frère qui commence par se battre pour m’apporter à manger et à payer le loyer », poursuit le patient, ordonnance en main et ne sachant que faire.
Vivre avec l’hémophilie: le coût
Hugues G., professeur de mathématiques dans un collège public de la place, est lui aussi hémophile.
Contrairement à Charles-le-bon B., la maladie a été détectée chez lui depuis qu’il avait 28 mois et jusqu’à ce jour, il n’a pas de repos. Toutes les semaines, il doit se rendre à l’unité de prise en charge de l’hémophilie et autres maladies hémorragiques du Cnhu pour se faire soigner. Son malheur a commencé depuis son enfance où il a été blessé par une lame au niveau de l’index.
Ce qui a provoqué des saignements à n’en point finir malgré les soins reçus dans les hôpitaux. Hugues G. ajoute que son enfance n’a pas été heureuse, car, avoue-t-il, il n’arrivait pas à fréquenter normalement comme tous les autres enfants. « A chaque fois que j’ai un saignement dans une articulation, j’abandonne l’école pendant des jours.
C’est dans cette souffrance que ses parents ont eu connaissance de l’unité de prise en charge de l’hémophilie et autres maladies hémorragiques du Cnhu qui s’appelait dans le temps, Chimax. Admis dans ce service, il a fait des tests qui ont démontré qu’il souffrait de l’hémophilie, il est déficitaire en facteur 8. « Mon taux de facteur de coagulation est de 4 %.
Dans le temps, on m’administrait les poches de plasma qui est un produit sanguin que l’on obtient à la banque de sang et dont l’unité coûtait 2000 F Cfa. Ce qui pesait sur les parents parce que je devrais prendre deux poches le matin et deux le soir sur 7 jours et plus, sans oublier les frais d’hospitalisation qui revenaient un peu plus cher», fait-il comprendre.
Ses parents dépensaient même au-delà de 200 000 F Cfa en une semaine. Tout récemment, en octobre 2020, il avait eu un problème au niveau du genou gauche dû à l’hémophilie et les parents ont banalement dépensé 163 000 F Cfa. Lors du traitement, explique-t-il, les médecins se sont rendu compte que ce n’est plus un problème qui relève de leur ressort et qu’il fallait qu’il aille en kinésithérapie.
Jusqu’à ce jour, il a du mal à plier le genou gauche. « Ils m’ont expliqué que depuis mon enfance, j’ai toujours saigné dans l’articulation gauche, ce qui a détruit le cartilage », précise-t-il. Au service aujourd’hui, c’est très difficile pour moi parce que toutes les semaines, le genou enfle. Il me suffit de rester légèrement debout sur le pied et ça commence par me déranger», précise-t-il.
Les hémophiles rencontrés manifestent tous leur gratitude au personnel du Cnhu, à l’Association béninoise des hémophiles et la Fédération mondiale des hémophiles qui leur envoie de temps en temps des facteurs pour leur survie. Mais cela ne suffit pas. « Nous demandons l’aide de l’Etat afin qu’on ait plus de facteurs pour traiter chaque hémophile. Nous avons vraiment besoin de la prophylaxie. Si l’Etat peut créer des centres pour le traitement hémophile dans le centre et au nord du pays, cela va faciliter la tâche aux frères hémophiles qui vivent dans le septentrion », suggère Hugues G.