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Prise en charge de la fente labio-palatine: L’enfant, un patient à suivre délicatement

Santé
Par   Arnaud DOUMANHOUN, le 19 août 2021 à 07h17
Longtemps considérée comme une malédiction, la fente labio-palatine est une affection curable de nos jours. La prise en charge de l’enfant, le petit patient, exige des spécialistes une vigilance accrue. « J’ai toujours pensé que c’est comme ça que Dieu m’a créée. Je ne savais pas qu’il y avait un traitement. Je me cachais parce que j’avais honte de mon état… », raconte après son opération chirurgicale, dame Bio Ramath, qui a vécu avec son affection jusqu’à l’âge de 26 ans. « Autrefois, certains nommaient cette pathologie le bec de lièvre, ce qui est un terme péjoratif, car c’est un peu comme pour dire de l’enfant qu’il est un lièvre ». En lieu et place de ce terme dégradant, le chirurgien pédiatre Serge Mètchihoungbé a préféré parler de la fente vue comme une malformation congénitale. Elle est dite labiale, au niveau des lèvres et palatine, relativement au palais. C’est une pathologie qui se soigne avec le concours de plusieurs spécialistes, chirurgiens, nutritionnistes, anesthésistes, orthophonistes. Et dans ce processus de prise en charge, le rôle dévolu aux infirmiers présente beaucoup d’intérêt. A juste titre, l’Ong Smile Train, qui propose une chirurgie corrective aux enfants souffrant de fentes labiales et palatines, met un accent particulier sur la formation de cette catégorie de personnel soignant. « Le premier risque que court le patient au bloc opératoire est lié aux voies respiratoires, surtout chez l’enfant. Le second, le saignement au niveau des lèvres, surtout au niveau du palais. Tout patient est à risque, mais les enfants méritent une attention particulière… », a déclaré Dr Nina Cakpo Chichi, directrice de programme par intérim de l’Afrique de l’Ouest pour Smile Train. A en croire Dr Serge Méwanou, médecin anesthésiste, réanimateur, en service au Centre national hospitalier universitaire (Cnhu) de Cotonou, les soins infirmiers sont essentiels dans la chaine de prise en charge des fentes labio-palatines et vont de l’évaluation du patient qui sort du bloc à la prévention de complications postopératoires en passant par sa surveillance. Le rôle de l’infirmier consiste donc à évaluer, décider et réagir pour prévenir le pire, surtout lorsqu’il s’agit des enfants, considérés comme de petits patients à suivre de près. « Ces petits patients qui n’ont pas la même physiologie que les adultes constituent l’avenir de demain et il faut connaitre leur spécificité pour bien s’en occuper… », souligne Dr Serge Méwanou. Une diversité de fentes… Il existe plusieurs formes de fentes variant d'une simple bifidité de la luette (prolongement vertical du bord postérieur du voile du palais, formant un petit appendice charnu, à l’entrée du gosier) à une fente labio-palatine bilatérale totale. En effet, la fente peut concerner uniquement les lèvres et est dite dans ce cas labiale. Elle peut concerner la gencive, ce qui donne lieu à la fente labio-alvéolaire. Si elle concerne la gencive et le palais, elle est appelée fente labio-palatine. La fente peut aussi se retrouver au niveau du palais : soit le palais mou, soit le palais dur. La fente touchant ces deux parties du palais est la fente palatine. Par contre, lorsqu’elle est spécifiquement liée au palais mou, il s’agit de la fente vélaire. Quand la fente est au niveau de la luette, il est question de la bifidité de la luette. Et si elle se retrouve des deux côtés de la luette, on parle d’une fente labio-palatine bilatérale totale. Prévenir tant qu’on le peut Les facteurs responsables de cette pathologie sont multiples. On dit généralement qu’elle est héréditaire, mais elle provient également de quelques facteurs exogènes, qui dépendent de l’état de la mère qui veut accoucher, de ce qu’elle a fait ou subi pendant la grossesse. Le médecin anesthésiste Dr Serge Méwanou relève au titre de ces facteurs exogènes, l’alcoolisme, le tabagisme, mais aussi l’usage des médicaments tératogènes (proscrites pour les femmes enceintes) qui nuisent au développement du fœtus. Selon le chirurgien pédiatre Serge Mètchihoungbé, il a été remarqué que les femmes ayant accouché d'enfants à fentes, sont en grand nombre des alcooliques ou consomment du tabac. Dr Serge Mètchihoungbé explique également que certaines femmes ne suivent pas leur grossesse. Or, une grossesse ne doit pas être un accident mais plutôt programmée. A l’en croire, la non prise de l’acide folique au cours de la période conceptionnelle est aussi une cause de malformation (apoptose). Avant de tomber enceinte, la femme doit se préparer, car certaines substances, notamment l’acide folique (la foldine) doivent être en quantité suffisante dans son corps pour empêcher des malformations. La foldine est un élément qu’il est important pour la femme désireuse de tomber enceinte de prendre dès qu’elle se met à en faire le programme avec son époux avant même de passer à l’acte procréateur. « On a remarqué que le manque de la foldine dans le sang cause des malformations non seulement au niveau de la face de l’enfant mais aussi au niveau de beaucoup d’autres tissus », indique le chirurgien. En dehors de l’alcool, du tabac, des médicaments tératogènes et du manque de foldine, il y a d’autres facteurs tels que la pauvreté, la soumission ou l’exposition de la femme enceinte à des insecticides et pesticides, le jeune âge de la femme enceinte (moins de 18 ans) ou son âge avancé (au-delà de 36 ans) et l’exposition aux radiations ionisantes (à travers les examens radiographiques) qui peuvent également occasionner les fentes. La fente labiale/palatine est la deuxième anomalie congénitale la plus fréquente après le pied bot (malformation du pied qui peut être pied tordu, ou sembler être à l'envers). Elle peut varier d’un petit défaut dans le vermillon de la lèvre supérieure à une fente complète du visage s’étendant au-delà du nez et jusqu’aux yeux. « Il faut faire des consultations prénatales régulières et suivre les conseils du gynécologue obstétricien », conseille Dr Serge Méwanou.